Succès depuis le festival d’Avignon 2016, We Love Arabs réunit deux danseurs dans un choc Juif/Arabe, contre les préjugés. A découvrir au Théâtre du Rond Point jusqu’au 8 octobre.
Une succession de clichés…
Hiller Kogan est chorégraphe, un chorégraphe égocentrique en panne d’inspiration. Pour son nouveau spectacle, il cherche l’espace, explore le sol, varie les appuis… Mais il se heurte à l’impression que l’espace le rejette, que le lieu s’oppose à lui. Il découvre que l’espace lui « résiste ». Et si cet espace prenait la forme de « l’autre », du territoire opposé ? On comprend dès lors que We Love Arabs sera un spectacle engagé, ironique et acerbe.
Hillel est juif, intellectuel, artiste. Il convoque alors un Arabe, Adi Boutrous, pour personnaliser cette rivalité. Mais cet Arabe « n’a pas la tête de l’Arabe ». Le Juif et l’Arabe se ressemblent, les spectateurs « risquent de confondre ». Rien de plus simple, Hillel demande à Adi de lui dessiner une étoile de David sur le torse, et il trace un croissant sur le front d’Adi, « comme ça, ils comprennent ». Mais malaise. Adi n’est pas musulman, mais chrétien. Eh oui, il danse autre chose que la danse du ventre. Eh oui, il comprend les métaphores quelque peu hurluberlues du chorégraphe. Les clichés opposant danseur et chorégraphe se muent en clichés racistes au détour d’un mot.
… Pour une parodie piquante et enlevée
Les deux danseurs se lancent alors dans une chorégraphie pleine d’allégories, une sorte de lutte fratricide sensuelle. La prose aussi ampoulée que confuse de Hillel révèle une tentative d’emprise sur l’autre. Alternant danse et discours, on se demande rapidement qui est la victime et qui est le bourreau. Comme si la caricature cachait quelque chose de plus complexe :
« si le juif était le bourreau, il n’en resterait pas moins victime de ses propres préjugés. »
L’originalité de la pièce vient donc de ce ton ironique d’une efficacité redoutable. Ironie renforcée par les petits sourires en coin de Adi, qui viennent contrebalancer sa passivité feinte. We Love Arabs, ce titre racoleur et provocateur n’est donc que l’emballage d’un spectacle qui se libère du politiquement correct. Sans compter qu’on appréciera également que l’humour n’entache en rien la qualité chorégraphique des parties dansées.
« Tout bon flatteur vit au dépens de celui qui l’écoute, cette leçon vaut bien un peu de houmous sans doute… »
Informations pratiques :
Au Théâtre du Rond Point
du mardi au dimanche à 18h30
Informations et réservations : Le site officiel du théâtre