La rentrée des théâtres parisiens débute cette année avec le Théâtre Hébertot qui ouvre le bal et frappe fort d’emblée avec Victor de Henri Bernstein, une pièce très années 50, mais d’une puissante actualité grâce à des dialogues truculents qui donnent du grain à moudre à des comédiens de ce niveau, et une mise en scène de circonstance de Rachida Brakni.
L’histoire pourrait être classique, un ménage à trois avec l’amour s’exprimant avec retard et ne trouvant jamais son but, qui illustre avec poésie une certaine idée de la solitude humaine, et de la vacuité de l’existence, sauf qu’Henri Bernstein est habile et inspiré et il sait donner de l’épaisseur aux premiers comme aux seconds rôles. Victor, joué par Bernard Blier à la création de la pièce, fête le triomphe de Grégory Gadebois qui, une fois de plus, s’affirme comme l’un des comédiens les plus virtuoses d’aujourd’hui.
Maniant la force (physique) et la sensibilité extrême de jeu, le spectacteur en reste bouche bée. Autour de lui, l’équipe est très soudée et prend un plaisir évident à interpréter cette partition. Eric Cantona s’avère une ignoble brute tout à fait crédible et on en redemande de sa gestuelle à nulle autre pareille et de son naturel tellement charismatique. Caroline Silhol qui est la femme que les hommes désirent, jouent des atermoiements dans un séduisant numéro de charme, et Marion Malenfant a tout pour vite devenir un premier rôle, tout comme Serge Biavan qui nous a convaincu également.
Bref, tentez l’aventure, et allez-y les yeux fermés, c’est du grand théâtre, qui offre une palette de sentiments, et présente une vraie magie d’interprétation qui valent à la pièce de longs et mérités applaudissements.
« Victor » à 21 h au Théâtre Hébertot
78 bis, boulevard des Batignolles 75017 Paris