Difficile aujourd’hui d’être passé à coté de la frénésie True Détective. Après une première saison s’étant fait l’écho de la poursuite d’une enquête au fin fond du bayou de la Nouvelle-Orléans, entre acteurs hollywoodiens au sommets (Matthew McConaughey et Woody Harrelson en tête) et ambiance poisseuse, la chaine HBO a cru bon de décliner une deuxième fois son concept. Fini donc les marais de Louisiane, et place aux faubourgs urbains et malfamés de Vinci, ville industrielle (fictive) de Californie, qui va voir encore une fois, un meurtre irrésolu prendre des proportions dramatiques.
Au vu du retour critique tout bonnement assassin, et profitant de la sortie de ladite saison en cette fin Janvier, on s’est dits à la rédaction qu’il serait agréable que de vous rappeler le génie de cette anthologie et pourquoi cet échec rencontré par les faibles audiences est aussi incompréhensible que décevant. Du coup, on vous donne 5 bonnes raisons de se frotter à cette série, qui si elle n’est pas aussi médiatisée que Game of Thrones ou House of Cards, mérite pourtant largement le coup d’oeil.
Un casting dithyrambique.
Colin Farell (Alexandre, Bon Baisers de Bruges), Rachel McAdams (Il Etait Temps, Spotlight), Vince Vaughn (Dodgeball, La Rupture) et Taylor Kitsch (Battleship, John Carter) et Kelly Reilly (Flight, l’Auberge Espagnole) Peu de séries peuvent aujourd’hui peuvent se targuer d’afficher pareilles têtes d’affiches. Sans doute bien aidé par un format court (cette saison n’affiche que 8 épisodes au compteur), la série n’en demeure pas moins l’occasion parfaite pour voir certains acteurs jouer à contre-emploi et surtout s’essayer au format télévisuel qui ne cesse de prendre de l’ampleur. On pensera ainsi à Vince Vaughn, figure majeure de la comédie US, s’essayer ici à un rôle bien plus dramatique, l’américain jouant ici le rôle d’un homme d’affaire un brin mafieux et à la violence parfois expéditive.
Un scénario étoffé et bien plus riche que le reste de la production télévisuelle US.
A l’heure ou les séries américaines brillent par leur capacité à susciter l’intérêt en ponctuant presque tous leurs épisodes par d’odieux cliffhangers et des développements narratifs peu élaborés, il est rare de pouvoir compter sur des séries prenant la tangente de ce modèle. Et c’est précisément ce qui fait le sel de True Détective. Non content de s’engouffrer dans un genre déjà bien labouré par le cinéma US, en l’occurrence, le thriller/polar, le scénario prend heureusement le pas à ce style et puise dans le vivier de la filmographie de Guy Ritchie et plus indirectement Quentin Tarantino, en affichant un scénario complexe, à la chronologie diffuse et aux retournements de situations nombreux. Et autant dire qu’avec ce ballet de personnages aux motivations diverses et tous frappés par ce meurtre qui les obsèdent, on reste admiratif devant le travail de Nic Pizzolatto, showrunner du show et véritable pierre angulaire du projet. qui continue de s’imposer comme l’un des meilleurs scénaristes de la télévision US.
Des images et un sens du cadre à faire pâlir les cinéphiles.
Au vu des impératifs de productions auxquels doivent se soumettre toutes les séries du câbles, il est parfois regrettable de voir une série riche de par son scénario, ne pas embrasser une qualité similaire sur le plan visuel. Heureusement, True Detective sait palier à tout instant à ce manque en donnant à voir une mise en scène soignée. Après l’enfer suffoquant de la première saison, brillamment personnifié par l’humidité et la moiteur des marais avoisinants, on avait un peu peur que la série perde cette ambiance, sitôt qu’elle se voit apposée sur le bitume aride de Californie. Et inlassablement, la série continue à nous donner tort. Bien qu’on pourra regretter un changement de réalisateur au fil des épisodes, ce qui empêche véritablement la série d’adopter une ambiance similaire à la première saison, ce cru 2015 arrive à impressionner par la qualité de ses plans, dénonçant sans peine la société dans toute sa complexité et son opacité.
Une bande-originale classieuse.
En embauchant T-Bone Burnett, producteur et musicien reconnu aux Etats-Unis et notamment proche collaborateur sur le plan musical des frères Coen (Fargo, The Big Lebowski), autant dire que la production a frappé un gros coup. Musique lancinantes, quasi oppressantes, la musique, à l’instar du rôle qu’elle tenait dans la première saison, est un des personnages clés du show, arrivant avec grâce à rendre compte de la mélancolie infusant les images. On en vient à comprendre que la ville de Vinci, certes fictive, est une représentation à peine voilée de la Californie actuelle, un paradis pour certains mais qui n’a à rien à envier à l’enfer. Drôle de crédo qu’a d’ailleurs suivi à la lettre le musicien, qui pour le générique a choisi une musique de Leonard Cohen, Nevermind, autre gros nom de la scène musicale américaine à la voix grave et très fataliste. Pour rappel, voici la musique du fantastique générique de cette saison 2 :
La preuve irréfutable que le fossé entre cinéma et télévision tend à se réduire.
On l’a dit plus haut, mais True Detective est une des séries télévisées majeures de ces dernières années. Que ça soit par la qualité de son écriture ou la performance de ses acteurs, la série prouve que l’image de canard boiteux accolée jusqu’alors aux productions télévisuelles tend lentement à disparaitre. Et en ça, cette saison est importante car elle permet aux personnes averties de voir la mutation de la télévision, qui sans surprises, louche maintenant vers le milieu du cinéma, que ça soit par le choix des plans ou les acteurs choisis.
Bande annonce :
Pour information, la série est disponible en DVD/Blu-Ray à partir du 27 Janvier est à créditer de la part du studio Warner Bros, qui a eu la logique de proposer des coffrets incluant aussi la première saison. Une occasion à ne pas rater donc.