En vue d’un prochain album, le groupe électro-dubstep anglais a frappé fort, en produisant un live… dans un train qui, calibré, devient un instrument à part entière le temps d’un trajet en Pologne. Vers où? Peu importe, affirme la petite vidéo résumant le concept : l’important ici, c’est comment on voyage. En musique et en images.
Texte & Photos Piotr Gruzinski Photographies
Dans le ventre instrumental d’un train
« Ca fait longtemps qu’on a pas joué en live, ça rassure d’avoir d’aussi bonnes réactions« . Ca détonne surtout très fort dans les oreilles des quelques varsoviens chanceux qui ont pu se délecter d’un DJ live pas commun il y a quelques semaines. Le groupe? Mont Kimbie, une référence dubstep majeure de ces dernières années, qui oscille entre la « cloud-mélancolie » cisaillée de James Blake et un abstrakt-hip-hop bien gouailleuse qui oriente l’atmosphère plus dans l’urbain. Pas commun? En effet, le concept se veut ambitieux : le groupe a été sollicite pour se produire dans un train, a travers un ingénieux système parrainé par la marque de bière Desperados. Des capteurs placés sur les rails et réagissant au passage du train font se produire au sein du wagon des beats que le groupe accompagne de son liveset. Ce ne sont pas seulement une guitare, un synthé ou une batterie qui sont présents dans ce wagon, puisque parmi ces instruments s’ajoute donc le train (ou plutôt les rythmes divers de sa cadence que les capteurs auront donc restitué, pour ceux qui ne suivraient pas).
Une fois rentré dans ce train « augmenté » de diodes et de sondes sonores, et les quelques bières sirotés (de la despé bien sur, gracieusement offerte), le train fait quelques tours de chauffe, et progressivement les musiciens s’installent dans le wagon-scène. Atypique, dubstep, décalé : il ne fallait pas plus de qualificatifs pour attirer quelques millennials, blogueurs très calé style et vie nocturne alternative, et provoquer des selfies à profusion pour promouvoir au passage le nouvel haut à paillettes et se démarquer parmi ces mods « indie-electronic« .
Une mise en abime magritienne
La musique dans ces compartiments étroits était aussi rapide que le train allait en s’accélérant, l’immersion des spectateurs dans le ventre même de l’instrument principal du groupe est en cela un mise en abime magritienne intéressante. Plus encore, les spectateurs-voyageurs étaient à même de jouer avec les caméras et lumière, faisant d’eux de vrais VJ. Le contenant allait faire oublier le contenu, et c’était un set d’environ une heure où les titres anciens (leur dernier album « Cold Spring Fault Less Youth » date de 2013) s’enchainaient avec ce qui va constituer leur prochain opus, dont ce « Synthi » qui collait parfaitement au principe.
Pas à son premier essai (l’année dernière c’était « Bass Drop » qui faisait se produire des DJ dans un avion) , Desperados a donc permis de servir le talent de Mount Kimbie via le « Train Trax », sans pervertir leur esprit. Ou quand le sponsoring finance une certain avant-garde musicale tout autant qu’il garde l’intégrité de ses acteurs.
Le petit film Desperados de la soirée