Les finlandais d’Amorphis signent leur 13ème opus avec Queen Of Time. L’album est-il à la hauteur des précédents ?
Amorphis est un groupe qui n’a jamais vraiment déçu ses fans. Bien qu’il se soit éloigné du pur death metal de ses débuts (notamment avec leur premier album, The Karelian Isthmus en 1992), Amorphis a su évoluer et apporter beaucoup de relief à sa musique depuis plus de 20 ans. L’arrivée de Tomi Joutsen au chant pour leur album Eclipse (2006) a largement contribué au succès du groupe, et a signé le tournant musical des finlandais. Sur une note personnelle, je les ai découvert avec Skyforger en 2009. J’ai tout de suite apprécié le côté heavy du groupe, contrebalancé par des mélodies folk, le tout entouré d’une aura épique qui fonctionne vraiment bien.
La recette classique d’Amorphis, mais pas que
Quand on entend un morceau d’Amorphis, on reconnaît tout de suite leur son et l’ambiance générale de leurs morceaux. C’est une des forces du groupe.
Dans cet album, ce son reconnaissable se mélange à de nouvelles idées, comme dans Daughter Of Hate. Ce morceau de 6 minutes s’ouvre d’une façon classique pour Amorphis (bien que en 7/4), puis nous surprend avec un solo de saxophone (joué par Jørgen Munkeby) et un passage mystique raconté par le parolier du groupe, Pekka Kainulainen. Ce passage nous ramène au Kalevala, l’épopée nationale finlandaise. C’est une oeuvre comportant une multitudes de récits et de légendes, et qui reste une des plus grosses influences d’Amorphis tout au long des années.
Among Stars s’enrichit de la voix claire d’Anneke Giersbergen, en contraste de celle de Tomi Joutsen. On notera aussi la présence dans l’album de Chrigel Glanzmann d’Eluveitie aux flûtes.
The Bee, le morceau qui ouvre l’album, permet au groupe de nous livrer encore une fois un refrain entêtant, sur un riff orientalisant comme il en a le secret.
Wrong Direction paraît aussi classique pour Amorphis au premier abord, servi par un refrain assez pop. Mais l’écoute s’enrichit grâce aux percussions du début des couplets, qui viennent soutenir le passage folk et la voix modifiée avant le dernier refrain.
Une production riche qui grandit l’album
Pour la première fois de sa carrière, Amorphis a fait appel à un orchestre et une chorale.
Queen Of Time comporte des thèmes mythologiques et se centre sur la naissance et la chute des civilisations.
Pekka Kainulainen (le parolier d’Amorphis), toujours inspiré du Kalevala, explique: «…The lyrics on this album are distant echoes of ancient forest peoples, from a time when meaning was proportioned by the cosmic forces that govern birth and death. If the connection was lost, they sought for a strand of knowledge, found a new direction, and a new age began.»
Comme pour Under the Red Cloud (2015), Amorphis a travaillé avec Jens Bogren, un producteur et ingénieur du son suédois qui a notamment travaillé avec Dark Tranquillity, Opeth, Moonspel ou Devin Townsend. Le travail des arrangements de Queen Of Time apporte un réel relief aux compositions et permet à l’album de sonner extrêmement épique et massif. Avec des thèmes abordés aussi graves et mystiques, l’album se devait de sonner comme ça. Et c’est réussi. On pense notamment à The Golden Elk où l’on entend des choeurs féminins et instruments à cordes.
Les parties claviers de Santeri Kallio (membre du groupe depuis 1999) sont très bien construites et s’adaptent à d’autres nappes de synthétiseurs.
Grain Of Sand ou Message in the Amber sont typiquement les exemples de ce qui marche dans cet album. On ne s’éloigne pas de la recette à succès d’Amorphis, mais on la rend plus grandiloquente.
Queen Of Time finit avec Pyres On The Coast, qui démontre encore une fois la puissance de l’album. Le morceau alterne des passages calmes et des arrangements orchestraux, suivis de riffs qui feront bouger tout metalhead.
On notera également le superbe artwork de l’album, réalisé encore une fois par Jean Valnoir Silmoulin.
Note: 9/10
Avec Queen Of Time, Amorphis réussit à nous donner un album puissant et homogène. La recette du groupe ne change pas, mais s’étoffe d’une certaine grandeur apportée par les arrangements orchestraux. La construction des morceaux est du pur Amorphis, quoique toujours améliorée et portée par le talent de ses musiciens.