L’Homme-sirène, de Carl-Johan Vallgren : un roman suédois entre drame et fantaisie

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Entre injustice et imaginaire, L’Homme-sirène nous embarque dans la Suède de 1980.

« J’étais incapable de prononcer un mot. Je ne pouvais détacher les yeux de cet être, quel que soit le nom qu’on puisse lui donner, je le fixais comme jamais je n’avais rien regardé de ma vie. »

Couverture de la version poche

  • Date de parution en France : 2017
  • éditeur : Le livre de poche / JC Lattès pour la version grand format
  • 320 pages
  • prix e-book : 7,99€

Il était une fois un petit garçon, Robert, gauche et timide, se heurtant à tous les obstacles sur sa route en raison d’un problème de vue.

Il était une fois sa grande sœur Nella, et leurs parents, invisibles et différents.

Deux enfants au passé tragique et au futur plus qu’incertain, qui tentent d’affronter la dure réalité de la vie. Quand Robert subit des moqueries quotidiennes et devient peu à peu le souffre-douleur d’une bande de collégiens, Nella se retrouve totalement désemparée. C’est alors qu’un être mi-homme mi-poisson surgit de la mer comme une apparition mystérieuse.

Il va constituer pour eux un moyen de s’évader de leur quotidien morne pour s’autoriser à rêver un peu. Et finalement, c’est presque la seule entité vraiment humaine qu’ils côtoieront pendant cette aventure.

S’échapper d’un quotidien tragique

L’Homme-sirène est un véritable conte, une fable moderne qui met en scène des personnages forts et attachants. Dans ce récit fantastique sur fond de drame familial, le lecteur cherche lui aussi à échapper à la pression amenée par l’histoire : un foyer détruit par l’alcoolisme et la négligence, deux enfants perdus, peinant à trouver leur voie… 

« Les parents de Robert et Nella n’étaient pas comme les autres parents. Ils ne vivaient pas comme les autres, ne pensaient pas comme les autres – enfin si, ils l’avaient peut-être fait jadis, seulement il y avait tellement longtemps que personne ne s’en souvenait plus. »

Nella doit s’occuper de son frère, de la maison, gérer les courses, parce que personne d’autre ne le fera. Si jeune, elle porte déjà la responsabilité de s’occuper d’un foyer entier, tout en tentant de gérer ses soucis à l’école. Heureusement, elle peut compter sur son ami Tommy, le fils d’un ancien pêcheur.

Une écriture prenante et une inspiration folklorique

Ce roman est une véritable plongée dans le folklore suédois. L’auteur mélange habilement la dureté de la vie dans le petit village de Skogstorp et l’irruption de la fantaisie dans le quotidien des enfants. Et c’est rafraichissant ! 

« On aurait dit une lampe qui se serait allumée brusquement ; tout à coup, il était parfaitement réveillé. Il nous a tenus sous son regard l’un après l’autre, très calmement, comme pour fixer nos visages dans sa mémoire. Ses grands yeux sombres étaient remplis d’une sorte de stupeur. »

L’écriture est à la fois simple et très imagée, remplie d’empathie pour les personnages ; on s’y attache rapidement, et on se prend au jeu de l’imagination.

Et si le thème de L’Homme-sirène vous plaît, on ne saurait que trop vous conseiller l’énigmatique film de Guillermo Del Toro La forme de l’eau (The Shape of Water). Elle aborde elle aussi la rencontre entre une jeune femme au quotidien difficile, et une créature aquatique aussi étrange qu’attachante.