Shiva Baby, une réunion familiale dans toute sa splendeur

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Le film raconte l’histoire de Danielle, une jeune femme juive et bisexuelle qui assiste à une shiv’ah avec sa famille, au cours de laquelle elle rencontre son ex-petite amie Maya, son sugar daddy Max ainsi que sa femme Kim et leur nouveau-né. Dans un cadre spatio-temporel réduit, Danielle explore ses projets romantiques et professionnels sous le regard intense de sa famille, ses amis et ses voisins. (Wikipedia).

Fiche technique

Réalisation : Emma Seligman
Scénario : Emma Seligman, d’après le court-métrage éponyme
Pays d’origine : États-Unis, Canada
Langue : Anglais
Genre : Comédie
Durée : 78 minutes
Date de sortie : États-Unis : avril 2020

Distribution

Rachel Sennott : Danielle
Molly Gordon : Maya
Danny Deferrari : Max
Polly Draper : Debbie
Fred Melamed : Joel
Dianna Agron : Kim Beckett

Impressions

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Danielle se retrouve catapultée à son insu dans une situation kafkaïenne. Elle doit assister à l’enterrement de… de qui déjà ? Elle essaye de passer inaperçue en jouant à la jeune femme gentille, sympa et pleine de projets. Mais tous les convives de cette after shiva semblent focalisés sur elle. Elle ne connaît presque personne. La plupart des invitées font partie de la famille qu’elle n’a pas vue depuis longtemps ou qu’elle n’a jamais vue. De la famille de la famille, des amis éloignés, des dinosaures dont la principale diversion n’est autre que le jugement acide et corrosif de ses faits et gestes. Les questions auxquelles elle ne veut absolument pas répondre : « que fais-tu en ce moment ? », « As-tu un travail ? », « Tu manges ? », « As-tu un petit ami ? », perdent de l’importance au moment précis où son sugar daddy Max arrive à enterrement avec sa séduisante femme et leur petite fille.

Un film avec peu de moyens

Il est toujours surprenant de constater à quel point, un film avec peu de moyens, peut être percutant, poignant, et considéré comme un bon film sans avoir besoin de gros budgets, de célébrités ou d’effets spéciaux. Malgré certaines maladresses, cette caméra à l’épaule et cette petite fille qui hurle tout le long de l’événement renforcent cette claustrophobie latente, ce papier à bulles qui explose consciencieusement à chaque fois qu’on lui fait comprendre qu’elle est minable.

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Cette pièce de théâtre semble jouir de tous les éléments d’un huis clos, malgré le nombre et la dispersion des invités. Parce que finalement, peu importe s’ils sont 2 ou 2000, les questions sont toujours les mêmes, comme si un gros monstre à 2000 bouches s’entêtait à tenir les mêmes propos. Son mal-être devant son ex copine, présente aussi à l’événement, devant ses parents qui racontent des histoires peu élogieuses sur elle, comme si elle n’était pas présente. Comme si elle avait cinq ans. La petite fille qui pleure obligeant les convives à parler très fort. La mère qui n’arrête pas de demander aux autres de donner un travail à sa fille. Son sugar daddy, qui lui jette des regards luxurieux, la femme de celui-ci, qui se déplace avec une perfection qui dérange.

L’espagnole qui vous parle a eu une sensation de déjà-vu, des échos des réalisateurs espagnols qui décrivent avec une précision exhaustive les réunions familiales. Tout être sur cette planète avec une famille a eu droit un jour, à une réunion familiale en bonne et due forme. Luis Buñel, même Saura (sans le glauque) me sont venus en tête. Mais, finalement, ce film aurait pu être tourné au milieu du salon de mes parents, avec mes tantes, mes oncles, mes cousins, les cousins de mes parents qui, comme des Terminators, semblaient être dotés de scanners intégrés et qui savaient toujours toucher là où ça faisait mal. La directrice de photographie aurait fait des merveilles chez moi. Elle se complait à faire des premiers plans sur tout une myriade d’émotions qui luttent pour rester cachées. Et on angoisse avec l’actrice principale. On devient la cible de toutes ces fléchettes adroitement lancées et on rêve de partir. Mais c’est impossible ! L’un des invités barre toujours le passage !

La fin

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Une fin digne et à la hauteur de tout le film, qui pérennisera le mal-être jusqu’au bout. Et on en rira. Parce que l’angoisse est tellement poussée à l’extrême, qu’elle devient de la dérision. Pourquoi il y a toujours ce parent qui insiste et insiste alors que personne ne veut faire ce qu’il demande ? Voici la touche géniale de Shiva Baby. Autant l’histoire, le contenu, sont dramatiques, autant il nous permet de rire à grands éclats quand on s’y attend le moins. Cela nous permettra de respirer et de compatir avec Danielle dès l’extérieur, sans trop s’impliquer. Ce film- bocal ne nous séquestre pas. Tout en compatissant, il nous permet de prendre de la distance. L’angoisse, le mal-être restent à leur place et nous à la nôtre. Voilà pourquoi Shiva baby se laisse regarder sans trop nous inviter au transfert. Peut-être pas « The » chef-d’œuvre mais un très bon film très bien structuré, cohérent et qui sait garder son objectif jusqu’à la dernière seconde.