Veronica est une actrice de renommée qui a été révélée aux yeux du grand public dès son plus jeune âge. Après une double mastectomie elle va chercher à se ressourcer en s’engageant dans une retraite collective loin de tout en Ecosse, c’est là qu’elle va faire face à ses elle-même et nouer un lien très particulier avec la terre des sorcières brûlées des siècles auparavant qui à travers leurs voix vont l’aider à prendre leur revanche sur ceux qui l’ont traumatisée. She Will c’est une histoire de femmes, de leurs traumatismes, de comment ils sont transmis génération après génération, mais avant tout l’histoire d’une vengeance.
Female rage
A travers son sujet et ses thèmes principaux, on ne peut nier la portée sociale, presque sociologique d’un film comme She Will. C’est une réécriture de plusieurs concepts à la fois horrifiques et féminins, voire même féministes. Tout d’abord le rape and revenge, ces récits de femmes violées qui prennent leur revanche sur leur bourreau, dont il partage plusieurs codes. Mais aussi la female rage, littéralement cette rage, cette explosion d’émotions renfermées qui détruisent tout sur leur passage une fois que le personnage féminin blessé ouvre la bouche ; ici ce sont les sorcières qui hurlent toutes ensemble comme pour venger des générations entières de femmes meurtries à travers l’histoire de Veronica. C’est un film de femmes, qui parle pour elles, et dans lequel le public féminin peut se retrouver de manière viscérale, à travers une sorte de traumatisme intergénérationnel commun.
Entre horreur classique et contemporaine
She Will puise des inspirations, dans son écriture comme dans sa réalisation, d’horreur classique mais aussi d’horreur moderne. Le film produit par Dario Argento se veut par exemple inspiré de Suspiria, comme l’avoue la réalisatrice Charlotte Colbert dans l’interview qu’elle nous a consacré (à voir en fin d’article) ; dans son aura à la fois étouffante et libératrice. On retrouve les codes classiques des films d’horreurs que l’on connaît tous : la cabane au fond des bois, les sorcières brûlées au bûcher… Mais liés à une réinvention plus contemporaine des choses, par exemple la figure de la personne âgée est ici un personnage principal en quête de renaissance, et non pas une figure morne, étrange, terrifiante.
Un film qui éveille les sens
De ce mélange d’inspirations naît une mise en scène très sensorielle, qui reprend l’aspect viscéral qui est la force du film. A l’aide d’un montage très vif, qui pose une ambiance tantôt très calme tantôt très angoissante et effrénée ; mais aussi d’un travail sonore, l’aspect le plus frappant de cette réalisation sensible aux sens. Le sentiment d’angoisse monte vite, puis s’échappe, avant de faire un retour inopiné comme un traumatisme que l’on essaye d’étouffer. Une manière efficace de retranscrire ce sentiment et de le faire partager au spectateur.
Une réécriture intéressante de la femme dans le film d’horreur, doublée d’un discours social à plusieurs niveaux ; tout cela englobé dans une mise en scène à ambiance prenante : c’est la promesse de She Will.
Nous avons eu la chance d’interviewer la réalisatrice du film Charlotte Colbert, qui parle avec passion de son histoire, de ses actrices, du traumatisme intergénérationnel et de ses inspirations dans l’horreur.