Nouvelle rubrique sur Justfocus : la fameuse rétrospective ! Le but : au travers de quelques films d’un(e) réalisateur(trice) (et pas forcément les plus connus), dresser le parcours artistique et l’évolution de l’intéressé(e). En tout cas, tenter de comprendre le parcours artistique de ce(tte) cinéaste. On débute avec Denis Villeneuve.
Ce passionné de cinéma a commencé en tournant des clips et des reportages, avant de réaliser son premier long-métrage de fiction à 31 ans. Il a une jolie histoire d’amour avec les Oscars puisque parmi ses quatre films « canadiens », trois ont été nommés pour le Meilleur Film Etranger. Hollywood a donc vite capté ce québécois de naissance. Cinq films déjà pour Villeneuve (depuis 2013) et un casting toujours plus flamboyant (Amy Adams, Mélanie Laurent, Emily Blunt, Jake Gyllenhaal, Forest Whitaker, Jeremy Renner, Hugh Jackman, Josh Brolin, Benicio Del Toro…). Villeneuve possède cette « patte » que chaque artiste recherche. Sur des genres complètement différents, il arrive toujours à raconter de belles histoires. Parce qu’un réalisateur c’est ça au final : un conteur d’histoires.
Son prochain film, la suite tant attendue du Blade Runner de Ridley Scott, est sortie en salles le 4 octobre. Et d’après le réalisateur on assistera à une director’s cut (chose malheureusement trop rare à Hollywood…).
Un 32 août sur Terre (1998) – 1er film
Une entrée dans la cour des grands sur les chapeaux de roues ! Denis Villeneuve, qui s’est exercé dans les clips et la publicité, débarque en long-métrage avec une « comédie romantique ». Un 32 août sur Terre est difficile à classer et déjà c’est bon signe. On dira plutôt un drame avec des pointes d’humour. L’idée de base est à la fois simple et barrée. Ce qu’en a fait Villeneuve se distingue nettement. Car le réalisateur canadien se présente au public avec une oeuvre touchante, mûre, dotée d’une narration fluide et forte, sans réel balbutiement pour un premier long-métrage. Des débuts très prometteurs. On distingue déjà un style atypique et prononcé. Les cadres sont très symboliques et le cinéaste puise avec brio dans l’étendue de la grammaire cinématographique. Il applique les règles et les transgresse quelquefois.
Chose inédite dans sa carrière : le réalisateur québécois débute son parcours avec une comédie. En tout cas, quelque chose de léger. On ne peut s’empêcher de voir dans Un 32 août sur Terre des effets comme chez Klapisch (le film de Villeneuve est antérieur), voire même la rythmique effrénée d’un Edgar Wright. La comédie est un genre qui appelle un rythme cherché, très rapide, qui tient de la chorégraphie. Pari réussi où le « novice » Villeneuve joue admirablement sur les contretemps et exploite les possibilités du montage avec un dynamisme efficace. Le premier tiers du film expose tout l’enjeu de l’intrigue par un subtil mélange entre cut hyper rapides, des panos filés et de magnifiques scènes dialoguées filmées en plan séquence. Et c’est très rare, il faut le souligner, d’avoir un premier film aussi prometteur et qui n’hésite pas à prendre un parti artistique si clair (sur le continent américain en tout cas).
André Turpin (qui signera la photo de trois de ses quatre premiers films) manie la caméra avec brio. Chaque mouvement est justifié et le rendu final (parfois grâce à l’aide de la musique) est saisissant de symbolisme. Filmer un désert plat et uniforme peut devenir un casse tête pour un metteur en scène débutant. On constate l’inverse dans le film. Turpin et Villeneuve composent admirablement une image riche en couleur et en signification.
Denis Villeneuve a écrit pour ce film des dialogues vivants, spontanés et drôles. Des situations très originales et quelques rebondissements sont également présents. L’accent québécois vient alimenter l’effet comique (pour nous petits français) en apportant un charme naturel aux acteurs. On sent déjà que chaque plan est pensé. L’image vient vraiment fusionner avec le son. Tous les codes de la comédie sont respectés et le cinéaste imprime déjà une touche personnelle et originale.
Côté interprétation, Villeneuve nous montre qu’il maîtrise tous les rôles d’un réalisateur. Rappelons-le, une mise en scène ambitieuse, une écriture drôle et profonde et un style encore embryonnaire, mais qui a le mérite d’exister. Pascale Bussières et Alexis Martin en sont les exemples vivants. Le duo marche, nous émeut et respire la spontanéité. L’actrice nous emporte facilement dans sa quête obstinée d’avoir un enfant. La direction d’acteurs est réussie. Les deux amoureux sont beaux ensemble et séparément. Villeneuve, qui débute, n’est pas impressionné par ses acteurs plus chevronnés que lui. La mayonnaise prend et le tout fonctionne.
Un dernier mot pour évoquer la musique. On verra par la suite que les compositions originales des films ont un sens et qu’elles viennent servir l’image. Denis Villeneuve n’a pas pris trop de risques en proposant un film assez silencieux, musicalement parlant (car nous sommes dans les codes de la comédie). Certains adoreront, d’autres détesteront, mais la voix hurlante de Robert Charlebois ne peut nous laisser indifférent. Son morceau, écrit vingt ans plus tôt, est inclassable. « Tout Ecartillé » n’a rien de conventionnel. Du patriotisme efficace !
Que d’éloges car on devine (facile à dire après coup) un « petit quelque chose » chez ce cinéaste québécois. Le film ne sortira qu’en 2000 en France.
Bande Annonce Un 32 août sur Terre :
Incendies (2010) – 4ème film
Intéressons-nous à la dernière pierre de l’aventure canadienne pour Villeneuve. Une énorme claque ! Le film est l’adaptation de la pièce de théâtre de Wajdi Mouawad, qui est elle-même inspirée de la vie de Souha Bechara. Denis Villeneuve est tombé sous le charme de cette histoire de famille dramatique et puissante quand il l’a vue au théâtre en 2004. Un long processus d’écriture (tournage de Polytechnique entre) qui aboutira six ans plus tard. Bien que jouant sur l’ambiguïté en ne révélant que le nom des villes, le récit de Wajdi Mouawad s’inspire d’événements qui ont eu lieu dans son pays d’origine : le Liban. Les noms des lieux sont remplacés. Ainsi la prison clandestine de Khiam devient Kfar Ryat et Souha Bechara devient Nawal Marwan.
La pièce avait tout pour être transposée à l’écran. Le récit est subtilement mené et l’intrigue se dévoile agréablement. Denis Villeneuve s’inscrit définitivement dans le registre dramatique. Et ajoute la corde « thriller » a sa gamme. La quête des jumeaux pour retrouver leur père et leur frère est captivante. Le conteur d’histoires maîtrise parfaitement son sujet. Un thème nouveau apparaît dans la filmographie de Villeneuve : la religion. Impossible de faire l’impasse puisque Incendies met en scène la chasse des palestiniens présents au Liban par les chrétiens extrémistes de l’ASL. Bien au-delà de divergences religieuses, le film porte surtout un message pacifiste et de pardon. Loin de tomber dans le manichéisme avec les gentils d’un côté et les méchants de l’autre, le récit de Wajdi Mouawad propose un dilemme complexe et intelligent. Il appelle à voir derrière les apparences. Un certain humanisme dont Villeneuve semble être un des nombreux porte-paroles dans le 7ème art.
Oeuvre sombre et qui prend aux tripes, Incendies est la dernière collaboration entre André Turpin et Denis Villeneuve à ce jour. Encore une fois, l’image est ultra-expressive. On retiendra des plans magnifiques qui viennent éblouir la rétine tout au long du film. La mise en scène a un vrai sens narratif et surtout émotionnel. Un drame sombre filmé dans les déserts éblouissants de Jordanie. Aucune image n’est en trop et la grammaire classique du cinéma est utilisée avec brio. André Turpin travaille avec Xavier Dolan maintenant.
Ce casting polyglotte porte l’oeuvre au fil des scènes. La mère (Lubna Azabal), les jumeaux (Mélissa Desormeaux-Poulin qui a débuté à la TV et Maxim Gaudette, déjà vu dans Polytechnique) ainsi que le notaire plein de talent (Allen Altman) font vivre ces personnages. Denis Villeneuve confirme son goût pour la direction de comédiens. Il leur laisse de la place pour s’exprimer et surtout du temps. Il tire d’eux la note juste qui s’inscrit sans accroc à sa partition globale.
On observe ici un traitement particulier de la musique. Grégoire Hetzel et Denis Villeneuve collaborent pour la première fois. Le compositeur français (souvent présent chez Desplechin) nous joue des airs orchestraux et « européens » en évitant avec brio l’écueil du récit « oriental ». Le spotting (emplacements décidés au préalable de la musique sur l’image) surprend par sa timidité européenne – et ce n’est pas un reproche – mais vient finalement accompagner l’intrigue sans tomber dans un pathos envisageable. La musique ne résonne pas quand on s’y attend. Elle est souvent brève et par moments longue. Une vraie ritournelle grinçante et mélancolique composée de violons et de chœurs. On pourrait voir dans les chants la théâtralité originelle d’Incendies. Et malgré tout, Villeneuve ne fait pas du Malick, ouf ! Et bravo.
Impossible de faire l’impasse sur la présence de Radiohead dans cette enquête familiale terrible. La voix de Thom Yorke titille le divin dans son utilisation. La matière brute est déjà très particulière. Pour aller plus loin, nous vous conseillerons l’ouverture de Vanilla Sky de Cameron Crowe (2001). You and Whose Army nous plonge avec terreur et intérêt dans un Liban malade et qui a perdu toute humanité. Et l’orchestration à contre-courant de Like Spining Plates apporte un point de vue artistique fort.
Le film surprend après coup par une immersion sonore totale. Il n’y a pas voire très peu de silence. Il y a toujours un souffle d’air, un ronronnement de climatisation, les mouvements de l’eau qui nous maintiennent dans l’histoire. C’est d’autant plus réussi que les dialogues en profitent quand ils sont silencieux. On en sort avec une sensation de continuité et de présence de l’action, ce qui est le signe d’un grand moment de cinéma. L’univers de l’action peut échapper à l’œil de la caméra, il sera toujours présent à l’oreille.
Bande Annonce d’Incendies :
Prisoners (2013) – 6ème film
Après quatre long métrages, Denis Villeneuve fait ses premières armes à Hollywood. Le réalisateur canadien débarque sur le continent de l’oncle Sam avec un thriller entraînant et rondement mené. Il aura fallu six ans au scénariste Aaron Guzikowski pour voir son histoire portée à l’écran (après avoir figuré sur la Black List). Le déclin croissant vers des récits de plus en plus sombres passe un cap avec Prisoners. Denis Villeneuve est à un carrefour de sa carrière. Il n’écrit plus, se concentrant sur la réalisation avec une équipe technique nouvelle (et qui va durer par la suite pour certaines personnes). Ainsi apparaît un nouveau chef-opérateur (on en parle plus loin), une nouvelle costumière (Renée April), un nouveau décorateur (Patrice Vermette) et un nouveau compositeur (Jóhann Jóhannsson). En parallèle à Prisoners, il faut également apprécier Enemy, tourné juste avant (son 5ème film).
Prisoners s’inscrit dans la catégorie néo-noir. Un film noir mais avec de la couleur pour faire court – pour aller plus loin sur le sujet, lire The Philosophy of Neo-Noir par Mark T. Conard – Et que dire de la lumière ! Villeneuve s’entoure pour la première fois du grand Monsieur Roger A. Deakins (give that man an oscar…). Le début d’une collaboration prometteuse (admirez son travail sur Blade Runner 2049). A la limite de l’éblouissement parfois, très marquée et sombre à d’autres moments, la lumière du film est un personnage à part entière. Elle pourrait personnaliser Keller Dover par sa dualité marquée : des intérieurs très contrastés et des extérieurs plus plats et vastes. Le talent du chef op attitré des frères Coen joue énormément dans l’ambiance pesante qu’a souhaitée le réalisateur. Denis Villeneuve avait de grandes idées, l’œil de Deakins les a mises en image. On apprécie énormément cette première collaboration qui rappelle que le cinéma est un travail d’équipe.
Villeneuve offre un rôle poignant et intense à Hugh Jackman. L’acteur australien nous rappelle qu’il est bien plus que Wolverine (allez faire un tour du côté du Prestige de Nolan et vous comprendrez). Ce père qui mène son propre combat, hors des limites légales, nous pose de multiples questions d’ordre éthique et moral. Le duo de pères et le duo père/policier constituent la base du propos du film. Denis Villeneuve nous propose encore un questionnement sur les limites de l’être humain. Jusqu’où sommes-nous prêts à aller pour protéger ceux qu’on aime……surtout quand notre lutte est basée sur des suppositions ? A l’image du labyrinthe « Mac Guffinien » du film, le réalisateur nous entraîne de piste en piste et arrive à tromper les détectives les plus avisés. Certains pourront reculer devant la longueur du film, mais son histoire a besoin de ce temps pour briller et faire sens. Pour une plongée dans le grand bain américain, la direction d’acteur est maîtrisée. Jake Gyllenhaal est méconnaissable et admirable. Denis Villeneuve dirige avec justesse et profondeur ses acteurs tiraillés, poussés jusqu’aux limites de l’animalité.
Le traitement de la musique est vu comme un contrepoids de l’ambiance dramatique qui se dégage du film. Avec Prisoners, Jóhann Jóhannsson, compositeur islandais, écrit des mélodies douces, légères et planantes. Des nappes musicales qui progressent dans l’intensité à mesure que les personnages s’enfoncent dans l’abîme de leur moralité. Un message plein d’espoir de la part du cinéaste qui rappelle qu’au fond, il existe du bon dans l’Homme. Le public assiste également à l’émergence d’une nouvelle tension sonore. Les cors graves et profonds viennent surprendre l’oreille. On retrouvera cette approche dans Arrival, de manière plus marquée.
On retrouve un fil conducteur sur ces six premiers films : l’exploration de l’humanité. Dans chacun d’eux, Villeneuve se penche sur le combat interne, plus important à ses yeux que les conflits mondiaux. Il a parlé de la maternité, des relations familiales, de l’amour et là on touche à un sujet sensible : les enfants. Les histoires qu’il nous raconte parlent d’invasions, d’événements exceptionnels et de la réaction des personnages à leur égard. La religion est à nouveau évoquée comme source de divergences morales et éthiques, sans jamais devenir le thème principal et c’est cette timidité qu’on apprécie car le sujet a le mérite d’être évoqué.
Bande Annonce Prisoners :
Arrival (Premier Contact) (2015) – 8ème film
Villeneuve s’essaie à un genre nouveau avec Arrival : la science fiction. Le film est adapté de la nouvelle Story of Your Life de Ted Chiang. Le noyau dur de l’histoire est maintenu avec quelques changements de nom de personnages, propres à l’adaptation. Toutefois on dénote dans le scénario d’Eric Heisserer une portée nettement plus humaniste et pacifiste. Villeneuve tournait Prisoners quand il a reçu le scénario. Le changement de ton est radical puisqu’Arrival se pose comme un film de société, où le thème central est la communication. Puisant dans l’oeuvre originale, le réalisateur propose ici une approche onirique, une oeuvre de réflexion sur les échanges avec les personnes en société (l’arrivée du vaisseau n’est en fait au fond qu’un prétexte pour parler des relations entre les pays de notre planète). Bien que la science-fiction, d’après Ted Chiang, soit un moyen de raconter des problèmes de société majeurs au travers d’un univers futuriste, le seul côté « scientifique » du genre est incarné par ces heptapodes mystérieux et bons. Arrival est un savant mélange entre plusieurs styles, passant du thriller à la narration contemplative d’un Terrence Malick (on avait aimé la pirouette d’Incendies, manquée ici…). Le réalisateur suit l’héroïne et ses interrogations quotidiennes, résultant de l’arrivée des extra-terrestres.
Depuis presque 100 ans, le cinéma nous a fait voyager dans des futurs plus ou moins probables. La science-fiction est une étape quasi obligatoire pour tout réalisateur chevronné. Pour son baptême, Villeneuve a voulu aller au fond des choses et apporter une vision personnelle (jusqu’à construire des décors immenses comme le sas où communiquent les humains et les extra-terrestres). Pas d’explosions ou de fusils lasers. Le film s’inscrit dans une temporalité contemporaine. Le traitement narratif des E.T. est nouveau, à savoir le décryptage de leur langue. Dans beaucoup de films, humains et non-humains communiquent trop rapidement, et le cinéaste impose au spectateur que l’Homme puisse se faire comprendre tout de suite par des formes de vie venues d’autres planètes. Denis Villeneuve lui-même trouve que cette théorie est très arrogante. D’où ce traitement lent et très bien argumenté sur l’entente entre deux entités que tout oppose. Le décryptage de la langue des heptapodes est le sujet central du film. Villeneuve, au travers de ses héros, effectue une remise en question de notre système de communication. Il nous appelle à voir au-delà des croyances anciennes, à voir le problème sous un autre angle et à se positionner d’une manière lucide et objective. Il propose la communication comme remède à l’invasion.
A ce stade, il faut se tourner vers le traitement des heptapodes. L’imaginaire collectif veut que les E.T. aient des bras, des yeux, des membres similaires à ceux des humains. Pour Villeneuve, ces entités d’ailleurs n’obéissent pas aux mêmes règles que sur Terre. En résultent des créatures inédites et intrigantes. L’approche artistique va au-delà de l’apparence physique. Le travail du son est également méticuleux, avec des tonalités lourdes, graves et qui résonnent. On aime parce qu’on n’a que rarement vu ça !
Concernant l’image, Denis Villeneuve travaille avec Bradford Young pour la première fois (Deakins étant sur le tournage d’Avé César). Ce directeur de la photographie, qui préfère tourner en lumière brute (raw light), joue sur les ombres dans le film. Les décors sont sombres et le but avoué est de donner l’impression d’une matinée pluvieuse d’automne. Comme si ces E.T. et leur arrivée devenaient pesantes pour la planète. La caméra propose des longs mouvements subtils (quasiment imperceptibles). La patte est contemplative et la lenteur de certains plans permet au spectateur de sentir l’immensité du problème évoqué. Et chez Villeneuve, quand une personne est dans une combinaison type espace, son visage est quand même éclairé pour plus de réalisme et d’empathie !
Un mot également sur la bande son de Jóhann Jóhannsson. Il collabore à nouveau avec le réalisateur québécois, après Prisoners. On remarque que l’aventure hollywoodienne a apporté avec elle un bagage musical plus important. La musique est d’autant plus présente qu’elle a parfois un rôle dominant dans l’émotion (bien que ce qui va suivre puisse paraître contradictoire). Ce n’est pas un défaut mais on constate que Villeneuve sait déjà nous émouvoir avec sa mise en scène et ses acteurs. Dans Arrival, une musique très peu mélodieuse et ultra lancinante se fait ressentir. Des sons organiques plutôt qu’électroniques (osé et diablement efficace pour de la science-fiction). La réussite sonore du film tient de la simplicité de sa bande-son. On joue sur les silences. Puis un énorme cor vient nous saisir aux tripes avant de s’éloigner lentement (tout comme dans Prisoners, mais avec un écho plus puissant et un rythme plus irrégulier). Tout comme les heptapodes devant la barrière de verre. Ajoutez ça à un rythme visuel millimétré et l’effet est saisissant !
Arrival vient confirmer la bonne forme de Denis Villeneuve. Outre ses huit nominations aux Oscars (une seule récompense obtenue pour le montage-son), le film vient surtout apporter une approche nouvelle au genre. Pas besoin d’être en 2234 pour avoir quelque chose à dire. Un seul vaisseau spatial et deux êtres tentaculaires suffisent à poser le débat sur la communication entre les humains. C’est quand même osé de dire qu’il faille attendre l’arrivée d’extra-terrestres pour que les être humains se comprennent enfin !
Bande Annonce Arrival :
Denis Villeneuve est devenu l’un des réalisateurs les plus bankables d’Hollywood. Les projets les plus ambitieux et populaires lui sont désormais confiés et c’est loin d’être immérité. Artiste contemporain, il ne cesse de creuser les maux personnels de notre société. Il voyage (et nous fait voyager) dans des mondes sombres où l’invasion est omniprésente. On remarque qu’il s’oriente de plus en plus vers des univers futuristes. Parmi eux, bien évidemment Blade Runner 2049, mais également une nouvelle adaptation de la saga littéraire de Frank Herbert, Dune. Un retour dans les salles obscures pour Paul Atréïdes et les Frémens que les fans attendaient depuis l’échec (rare) de David Lynch et le fantasme jamais réalisé d’Alejandro Jodorowski. Dernièrement, on apprend que Villeneuve serait pressenti pour réaliser le 25ème James Bond (sur les recommandations de Daniel Craig, s’il vous plaît). Ils n’ont pourtant jamais travaillé ensemble mais cette union est plus qu’alléchante !
Le parti pris de taire les récompenses est assumé. Le réalisateur québécois le rappelait d’ailleurs dernièrement dans l’émission québécoise Tout le Monde en Parle :
Honnêtement je suis compétitif, mais gagner un Oscar n’est pas une obsession.