Leslie et Renard s’ennuient dans leur petite banlieue dortoir et au détour d’une escapade imprévue, ils trouvent un artefact étrange qui semble venir d’un autre temps. Grand Paris c’est l’histoire de leur épopée, mi-drôle mi-sensible, à travers l’Ile-de-France pour trouver une utilité à cet objet mystérieux.
Comédie efficace
Grand Paris est un film très drôle qui fait reposer une grande partie de son humour sur la naïveté de ses protagonistes et la pureté qui se dégage d’eux. Une grande sincérité et des situations rocambolesques, ce genre de choses qui font sens dans leur petit univers mais qui sont aussi hilarantes en tant que spectateur. Une attention toute particulière est portée à l’écriture des dialogues et au timing comique, ce qui rend le tout fluide et efficace. Les personnages sont archétypaux et ça fonctionne aussi très bien en plus de contribuer à cette dynamique. Entre blagues de potes, moments étranges et grandes bouffées d’air la force de Grand Paris c’est aussi, bien plus que sa sincérité, cette impression de réalité simple qu’il évoque : la vie est une drôle d’aventure malgré l’adversité.
Banlieue et sensibilité
La représentation de la banlieue au cinéma a pour habitude d’être dure et de plutôt relever soit du film d’action, soit du drame social, soit carrément de la dystopie. Ici la volonté est toute autre, et même en empruntant le chemin de la comédie, on évite tout raccourci potache ou autre facilité semblable. La sincérité, encore une fois force ultime de Grand Paris, laisse place à une grande sensibilité qui est présentée subtilement. Les personnages du film n’ont pas de but dans la vie et la plupart du temps ils s’ennuient. Ils cherchent à faire quelque chose de leur existence et ils ont du mal à comprendre leurs sentiments dans un environnement où on n’exprime pas forcément ce genre de choses. A sa manière, avec toute la pudeur de ses personnages, le film parle aussi d’amour. L’amour fraternel d’un meilleur ami, celui qu’on porte à la personne de qui on est tombé amoureux mais qui a dû partir en nous laissant un goût amer dans la bouche, et avant tout l’amour de soi et ce qu’on en fait. Le film est touchant de par son honnêteté maladroite, et c’est plutôt rafraîchissant à voir.
Place à la créativité
Grand Paris est, comme le dit le réalisateur lui-même, un long freestyle. Comédie touchante bien sûr, le film approche aussi le fantastique. Entre théories du complot et science-fiction, il nous fait voyager au-delà de et à travers sa vision rafraîchissante de la banlieue parisienne. L’objet étrange trouvé par Leslie et Renard crée un véritable mystère et permet à cette banlieue de prendre des airs de décors mystique. On voit les pyramides des quatre coins de la région, les souterrains d’un métro à en devenir… Que ce soit l’architecture banlieusarde singulière qu’on ne prend que rarement la peine d’apprécier ou les graffitis qui jonchent de nombreux bâtiments, tout ici prend cette dimension à la fois familière et étrange grâce à la mise en scène et au travail de l’image. Des lumières de nuit qui rappellent la science-fiction et un travail de la colorimétrie déjà un peu déroutant de jour, on est directement plongé dans un univers inhabituel et le film ne s’en cache pas. On voit la banlieue sous un autre jour et le fantastique s’approche de son spectateur petit à petit jusqu’à s’exposer devant lui.
Image sensible et singulière de ces banlieues que l’on voit sur grand écran sous le prisme de la violence, Grand Paris est une bouffée d’air frais mignonne et agréable. On passe une heure et quart avec le sourire tout en étant touché par cette aventure. On saluera aussi les performances des quatre acteurs qui ont une synergie impressionnante : Mahamadou Sangaré (Leslie), Martin Jauvat (Renard, et aussi le réalisateur du film), William Lebghil (Amin) et Sébastien Chassagne (Momo).
Grand Paris, en salles le 29 mars