Critique « Minuit dans l’univers » sur Netflix : rendez-vous manqué avec les étoiles

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La dernière grosse production Netflix de cette année 2020 s’annonçait grandiose : George Clooney marchant dans les traces poudreuses de Gravity pour nous offrir en cadeau de Noël un film tendre et prenant sur une catastrophe terrestre et le retour impossible d’astronautes en mission. Mais le rendez-vous avec les pépites qui ont marqué le catalogue Netflix cette année est raté, et l’on embarque avec Minuit dans l’univers pour un voyage qui, non sans qualité, paraît pourtant bien insipide.

Février 2049, 3 semaines après un évènement inconnu qui a rendu notre bonne vieille planète parfaitement inhabitable, sauf sous quelques abris souterrains. Un homme, incarné par George Clooney, à la barbe longue et grisonnante, décide de rester dans le pôle Arctique, afin d’alerter les vaisseaux en destination de la Terre de faire demi-tour pour ne pas se retrouver piégés dans cette atmosphère irrespirable. Un scénario post-apocalyptique comme il en sort une bonne dizaine chaque année se dresse devant nous, où la fragilité de l’homme se place en élément central derrière un prétexte extra-terrestre. Rien de neuf sous le Soleil, puisque Clooney se place dans les héritages d’Interstellar, Ad Astra et Gravity, qui avaient chacun leurs particularités leur permettant d’atteindre les sommets du genre.

« Un seul être vous manque, et tout est dépeuplé »

Loin des urgences catastrophiques, les premiers instants de Minuit dans l’univers posent une temporalité longue et lente, telle une sorte de douce agonie de l’humanité contrainte de quitter sa Terre natale pour se réfugier dans les sous-terrains. Les foules migrantes posent les premiers enjeux, puis nous abandonnent : la suite ne se fera qu’en compagnie de Clooney et d’Iris, une petite fille abandonnée avec l’homme un peu misanthrope sur les bords, tous deux perdus dans l’infini de la banquise, et l’équipage d’un vaisseau qui rentre sur Terre après sa mission.

Kyle Chandler face à une terre hostile / Minuit dans l'univers ©Netflix
Kyle Chandler face à une terre hostile / Minuit dans l’univers ©Netflix

Cette double unité de lieu jouera le rôle de contraste et d’opposition entre un vaisseau plein d’espoir pour l’humanité, et une Terre abandonnée et détruite, symbole d’un passé qui n’est plus. Alors que sur notre planète les familles sont déconstruites, les personnages sont renfermés et ne savent pas communiquer de la même manière, privilégiant des sens différents qui ne se répondent pas, dans l’espace le vaisseau et son équipage paraissent plein d’espoir, chaleureux, tourné vers un futur positif et rassurant, vers une nouvelle construction familiale qui a peut-être une chance de réussir. L’immensité de glace s’oppose paradoxalement aux espaces clos et rassurants de la navette spatiale, dans une structure narrative qui nous met face à l’inévitable.

Comme ses prédécesseurs, Minuit dans l’univers ne manque pas le rendez-vous du voyage introspectif, moment de remise en cause existentielle alors que tout s’effondre autour. Accompagné par la petite fille touche à tout, le personnage de George Clooney traverse les tempêtes glaciales et intérieures, rongé par la solitude, et aussi par le manque de subtilité : les symboles s’enchaînent jusqu’au climax déroutant qui sans casser la prétendue tendresse lente et soporifique enfonce les personnages dans une incrédibilité dont ils ne pourront se défaire.

Une seule motivation vous manque, et tout est assez fade

Au-delà d’une structure d’opposition qui fonctionne assez bien, Minuit dans l’univers se trouve très vite assez lisse et fade : le huitième film de Clooney en tant que réalisateur échoue à un instaurer un vrai suspens et des enjeux assez riches pour nous tenir en haleine et nous installer dans ce sentiment d’urgence inévitable à tout bon film post-apocalyptique. Comme une prise de conscience tardive, l’univers du film se rend compte lui-même de cette platitude léthargique en tentant d’apporter des catastrophes sans fondement, qui n’apportent rien à la construction de ses personnages. Le scénario glisse sur ces protagonistes coupés du monde, sans les bousculer et leur apporter de progression ; tout reste irrémédiablement statique, pour s’écraser comme un gros plat dans une révélation finale sans saveur, comme un message d’espoir ou de répétition assez grossier.

Clooney face à ses démons / Minuit dans l'univers ©Netflix
Clooney face à ses démons / Minuit dans l’univers ©Netflix

Ces échecs auraient pu être sauvés par une esthétique primordial pour ce genre, mais il n’en est rien : la photographie plus que lisse n’apporte que des images revues de l’espace, manquant cruellement d’originalité. Sans atteindre la beauté visuelle d’un Gravity, Minuit dans l’univers se suffit à quelques scènes marquantes qui ne suffisent pas à relever le niveau de CGI et d’incrustations plus que limite, qui souffrent d’effets de lumières peu flatteurs pour l’oeil. Alors, peut-être que la musique du grand Alexandre Desplat pourra sauver le tout ? Malheureusement, c’est encore un échec lorsque l’on se retrouve face à des effets musicaux terriblement vieux jeu, malgré quelques moments qui encore une fois tentent de rattraper le tout à bout de bras. Ce jeu d’équilibriste entre le bon et le moins bon ne suffira pas à faire pencher suffisamment la balance pour nous éviter un film facilement oubliable.

Avec des personnages sans consistance, trop de déjà-vu dans sa construction et des effets visuels et sonores parfois assez limites, Minuit dans l’univers manque son rendez-vous avec les étoiles du genre, pour très certainement et malheureusement s’écraser dans le gouffre du catalogue Netflix. Un film qui ne vaut pas le détour, mais qui aura au moins eu le mérite d’essayer.