Propulsé sur le devant de la scène depuis la sortie de Mud (2012), le réalisateur Jeff Nichols aura finalement attendu 4 ans pour officier son retour, qui plus est dans un genre Science-Fiction labouré par son père spirituel : Steven Spielberg. Magnifiquement entouré par Michael Shannon, Kirsten Dunst, Adam Driver et Joel Edgerton, Nichols convoque avec Midnight Special aussi bien famille, armée, surnaturel et amour, à tel point qu’on se demande si nous n’avons pas affaire au Rencontres du 3ème type du 21ème siècle ?
Passée l’étrangeté de son histoire, qui convoque à la fois un degré d’intimité rare, renforcé par sa coexistence avec des enjeux d’envergure mondiale, Midnight Special s’impose, dès les premières minutes, comme une oeuvre très atypique. Le film nous fait suivre le parcours de d’Alton, un jeune garçon accompagné de son père et d’un ami de ce dernier. Ces trois protagonistes sont en cavales et pour cause : Alton possède des pouvoirs surnaturels, faisant de lui un objet de convoitise pour diverses institutions gouvernementales et sectaires. Si le synopsis est de prime abord très rudimentaire, le développement qui en est fait est tout bonnement fabuleux.
Porté par une mise en scène alimentant la paranoïa ambiante, quitte à apposer sur le récit une profonde atmosphère anxiogène, Midnight Special brille surtout par sa musique et son casting. Si la première, à l’instar de celle de John Williams sait user de la noirceur de son récit pour se muer en un véritable personnage du film, le second parvient, tel un phare dans la nuit, à nous faire comprendre les enjeux humains de l’intrigue. Michael Shannon et Joel Edgerton incarnent ainsi deux hommes traqués et à fleur de peau, devant, pour le bien d’Alton, garder leur sang-froid, quand tout est pourtant agencé pour mettre leurs nerfs à vifs. Quel bonheur de retrouver, auprès de ce duo, la trop rare Kirsten Dunst qui, en mère courage, continue de nous épater. Sans oublier le ténébreux Adam Driver (Star Wars VII : Le Réveil de la Force), qui, de par son rôle fantasque et attachant, représente la petite touche de légèreté dans cette intrigue résolument sombre.
A l’instar de Mud, ce casting brille également par sa jeunesse, car la véritable révélation s’avère être le jeune et talentueux Jaeden Lieberher, campant le rôle du petit Alton. Témoignant d’une puissance et d’une intensité de jeu assez rare pour son âge, le jeune Jaeden parvient à tenir la dragée haute au reste du casting, supposant déjà pour ce jeune homme une carrière qu’on espère prolifique.
Bien aidé par une réalisation, piochant aussi bien à Spielberg qu’au réputé John Carpenter pour son degré insolent, libre et humain, le film nous immerge dans une ambiance mystérieuse et remplie de zones d’ombres. Quitte à distiller un relent de doute jusque dans les dernières secondes de l’intrigue, le dénouement laisse d’ailleurs toute marge au spectateur pour s’imaginer une fin et une solution le satisfaisant. Une qualité rare dans la production actuelle, qui ne manquera pas de voir le jeune Jeff Nichols, s’imposer une fois encore comme l’une des figures à suivre de très près dans la profession.