En 2004, Brad Bird et Pixar frappaient très fort en sortant Les Indestructibles. Une équipe super-héroïque dans un univers animé. 14 ans plus tard une suite voit enfin le jour et c’est toujours aussi superbe. A l’occasion de la sortie de ce nouvel opus, retour sur le premier épisode.
Brad Bird joue avec les clichés des films de super-héros
Chaque Pixar est un nouvel événement. Mais cette fois-ci ça l’est particulièrement. Après 14 ans d’attente et de réclamations, Les Indestructibles 2 sort enfin dans les salles. Presque attendu comme Infinity War, cette suite en a fait rêver plus d’un. Pourquoi autant d’engouement ? Parce que le premier opus était ultra novateur. Brad Bird s’amuse avec les clichés des films de super-héros qu’il utilise comme ressorts comiques dans cette relecture du mythe. Il reprend tous les thèmes, tous les codes, pour les placer dans un univers qui ne leur correspond pas. On a bien sur Mr Indestructible, archétype de la représentation masculine forte et protectrice, avec un soupçon d’Homer Simpson. Il y a les adolescents compliqués et tourmentés, dont les sujets de préoccupations rappellent les problèmes de Peter Parker lorsqu’il était encore au lycée. Il y a le grand méchant, ancien fan déçu par le comportement de son idole, une manière de démontrer comment la jeunesse peut être influençable et contrôlée par les écrans et les mythes. Il y a même Edna, qui fait office de Q dans James Bond. Un personnage extravagant et hilarant qui vient caricaturer tous les Alfred ou Jarvis de l’univers super-héroïque.
Mais c’est également dans les choix artistiques que cette parodie intelligente se dessine. Des héros mis au placard (façon Watchmen ou Civil War comics), une organisation secrète, un train qui déraille, des décors sublimes pour une conclusion en pleine ville et une musique super héroïque de Michael Giacchino, qui n’a rien à envier aux thèmes musicaux paresseux des productions super-héroïques actuelles. Même Jack-Jack est un élément de tout ça, un électron libre, un personnage ultra puissant qui vient rappeler que ces figures cinématographiques sont parfois totalement déconnectées de la réalité. Brad Bird voulait également mettre en avant la notion de famille dans son oeuvre en voulant raconter :
« l’histoire d’une famille dont chaque membre apprend à équilibrer sa vie personnelle et l’amour qu’il porte aux autres. C’est aussi une comédie sur des super-héros qui découvrent leur côté humain plus ordinaire. Au fil de l’écriture, j’ai eu envie de créer un monde riche de culture populaire, avec des gadgets d’espions, des super-pouvoirs tirés tout droit d’une B.D., des méchants abominables qui utilisent des machines extraordinaires, mais en même temps, je voulais écrire une histoire qui parle vraiment de la famille. J’ai mis beaucoup de moi dans cette histoire. Le fait d’être un mari, un père, la peur de vieillir, l’importance de la famille… Tout cela y est présent. »
Pixar : ces génies de l’animation
Pixar domine le monde de l’animation avec des films toujours plus percutants et des idées de mise en scène lumineuses. Les Indestructibles est d’une fluidité inédite. Les équipes Pixar ont franchi un cap sur le plan technique, le film d’animation étant particulièrement complexe sur le plan logistique avec près d’une centaine de décors différents créés pour l’occasion. Le film soulignant l’humanité des personnages, Brad Bird a demandé à ce que les humains en images de synthèse soient les plus expressifs possibles, avec une peau, des cheveux et des vêtements dont on puisse retrouver la mobilité naturelle à l’écran. C’est également le premier film des studios Pixar à mettre en scène des êtres humains.
Comme bien souvent Pixar crée une double lecture passionnante. Toute cette danse super-héroïque à un but. Brad Bird veut montrer l’évolution de notre société. Ces super-héros représentent un peuple fatigué. Mr Indestructible est obligé de trimer dans une entreprise, dans un boulot répétitif. Elastigirl doit garder ses enfants. Bref, Les Indestructibles met en avant la vie du commun des mortels, un quotidien synonyme de morosité. Les pouvoirs représentent la joie, le risque, l’enfance, le rêve. Des sentiments détruits par une société oppressante. Mr Indestructible est obligé d’exercer son pouvoir dans l’ombre, avec une organisation inconnue, comme un voleur, comme si ses sentiments étaient prohibés. Les Indestructibles est finalement une lecture d’une société bien cadrée qui enferme ses soldats dans un quotidien terne et répétitif, plutôt que de les laisser libre de leurs joies et de leurs folies.
Les Indestructibles est instantanément devenu une oeuvre culte. Un film de super-héros pas comme les autres qui a permis aux studios Pixar d’élargir leur éventail.