Raúl Arévalo signe un premier film qui se révèle être excellent. Sec, vitaminé et esthétiquement très réussi, La Colère d’un homme patient est un long-métrage efficace mettant en scène une vengeance qui prend son temps…
L’histoire d’un braquage tombé dans l’oubli
A l’origine de l’histoire, nous trouvons un casse de bijouterie qui tourne mal. Deux victimes : une jeune femme qui meurt sous les coups et un homme qui se retrouve dans le coma. Le crime ne reste cependant pas dans les mémoires. Sur les quatre braqueurs, seul Curro, le chauffeur, est arrêté. S‘ensuit pour lui huit années de prison. A sa sortie, il est attendu par José, un homme qui a attendu patiemment et fomenté sa vengeance durant cette période…
Ce récit de vengeance nous entraîne dans les lieux de la péninsule espagnole où la violence est bien ancrée, dans des lieux frappés de plein fouet par la crise. Nous virevoltons entre des zones excentrées et abandonnées ou encore divers villages. D’autres endroits sont emblématiques dans le film, tels que les petits bars qui ne payent pas de mine, ou les salles de boxe de seconde zone (où la violence ne se dissocie pas du sport).
La Colère d’un homme patient: un thriller haletant
Histoire d’une revanche implacable, La Colère d’un homme patient surprend et interpelle par l’alternance des rythmes qui le composent. Les sons du film participent à cette atmosphère réaliste et crue. La caméra use souvent de gros plans ; c’est d’ailleurs dans les moments au paroxysme de la violence qu’elle choisit de se rapprocher des personnages. Tout au long de l’œuvre, elle n’a de cesse de les suivre et se mouvoir, accompagnant le mouvement des corps et de leurs chutes.
Le film opère dans la première demi-heure un retournement de situation audacieux, où les victimes deviennent les monstres et les criminels les victimes. La totalité des personnages sont à l’exact opposé du manichéisme et de la caricature.
Le film illustre les failles, les doutes, la faiblesse, mais aussi la cruauté de chacun, qui peuvent se révéler lors d’une tragédie personnelle. Ne tombant ni dans la violence gratuite, ni dans la pitié et le pardon, le personnage de José (le justicier) illustre avec brio, subtilité et justesse la condition de l’homme brisé. Son personnage, interprété par Antonio de la Torre, est un subtil mélange de froideur implacable et de détermination inébranlable, couplé à un humanisme qui reste en arrière-plan.
Comment un homme réagit-il à un drame personnel ? Qui deviendrions-nous si la cruauté faisait irruption dans notre vie, si notre vie était brisée par la violence ? C’est à ces questions que le film entend se heurter. Et le heurt est réussi. Il n’y a pas plus efficace illustration pour le fameux adage : la violence crée la violence. Sur cette thématique, La Colère d’un homme patient, tire largement son épingle du jeu et plus encore.
Avec ce thriller espagnol, Raúl Arévalo s’essaye avec brio à la réalisation. Ce premier long-métrage surprend par son rythme, oscillant entre la force tranquille et des épisodes d’une violence crue. C’est une œuvre esthétique, filmée en 16 mm, où la caméra s’attache à suivre les personnages dans leurs mouvements de lutte, violence et vie. Le film nous présente la réponse d’un homme face à la monstruosité qui l’a brisé. Après avoir raflé quatre prix lors de la cérémonie des Goya (Meilleur film, meilleur nouveau réalisateur, meilleur scénario original et meilleur acteur dans un second rôle), La Colère d’un homme patient sera visible dès le mercredi 26 avril dans les salles françaises.
La bande-annonce :