Le 4 décembre dernier, Elia Suleiman proposait son nouveau film : It Must be Heaven. Une comédie douce et décalée qui montre les disparités sociales et culturelles entre trois villes diamétralement différentes : de Nazareth qu’il fuit, pour aller à Paris et New York. À l’occasion de sa sortie en VOD et achat digital le 4 avril dernier, c’est le moment de revenir sur cette pépite qu’on conseille sans modération.
Une comédie burlesque
It Must be Heaven est un film très subtil, débordant d’intelligence et de malice. Elia Suleiman se place en digne héritier du cinéma de Jacques Tati en offrant une comédie de l’absurde, parfaitement maîtrisée. C’est l’histoire d’un voyageur silencieux, qui porte son regard synthétique sur un monde étrange, dans lequel il cherche sa place. Le protagoniste quitte sa contrée natale palestinienne pour tenter de voir comment se porte le monde.
Il décide alors de poser sa valise à Paris, pour dresser un portrait absurde et poétique des français. À travers une douceur bienveillante, Elia Suleiman dépeint le tableau d’un pays libre, où le quotidien est élégant, joueur et rafraîchissant. Toujours avec beaucoup d’humour, il démontre les disparités qui s’affichent évidemment entre la Palestine et la France et rappelle que la paix et la liberté dominent notre mode de vie. Le réalisateur démontre également que la nation française n’a pas les même problèmes que son pays natal. Les difficultés paraissent totalement anodines, voir absurdes, sans réelle raison d’être, loin de la barbarie et de la sauvagerie de la guerre.
Il utilise des visions universelles impactantes pour illustrer ses propos comiques et ses ressorts politiques. Difficile d’oublier l’image de ces policiers français sur leurs Gyroroues, sacrément hilarante. C’est avec ce genre d’idées qu’Elia Sulaiman apporte un humour décalé et toujours très pertinent. Puis, il prend l’avion pour débarquer à New York. La ville qui ne dort jamais, toujours en ébullition et en effervescence. Ainsi, il dresse les différentes facettes de notre mode de vie sans jamais tomber dans le cliché, préférant utiliser une gentille caricature, drôle et efficace.
Un film très politique
Elia Suleiman cherche ainsi à trouver sa place, il se questionne sur la manière dont tourne la société moderne, et comment les gens arrivent à s’en accommoder. En se plaçant comme personnage principal, qui ne parle jamais, il endosse le rôle de l’observateur. Celui qui regarde, qui retient et qui analyse, dans sa forme la plus pure. Par cette approche, il signe un film éminemment politique. C’est un regard étranger et satirique sur un monde moderne, excentrique et surtout très complexe.
Par le prisme du burlesque et par la poésie du silence, il dénonce évidemment le sort des palestiniens. Mais pas seulement, car It Must be Heaven prend des nouvelles du monde. Via une spiritualité débordante, le cinéaste parle d’identité, d’appartenance, mais également d’affranchissement. Celle d’un voyageur qui cherche sa place, toujours dans un silence total. Par une mise en scène minimaliste mais toujours très esthétique, par le pouvoir du muet qui n’a pas perdu de sa vergogne, Elia Suleiman propose une profonde méditation de l’état actuel de notre société.
It must be Heaven est donc une brillante vision de notre société moderne. Une aventure pleine de positivité, qui joue très habilement avec les clichés des différents pays. Une ode à la liberté, calme et sereine. Des petits instants de vie captés à la volée.