Critique « Nocturnal Animals » de Tom Ford : envoûtant, froid et brutal

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Grand prix du jury de la Mostra de Venise, Nocturnal Animals a par ailleurs été sélectionné dans de nombreux festivals. Et pour cause. Le second film de Tom Ford, thriller inspiré du livre d’Austin Wright mettant en scène une femme (Amy Adams) bouleversée par le roman écrit par son ex-mari (Jake Gyllenhaal), est une vraie réussite.

Un film parfait dans la forme

Tom Ford mériterait un Oscar pour sa réalisation d’une intelligence rare. Une mise en scène extrêmement riche porte ce film à la beauté froide et percutante. Chaque image a un sens, illustrant et enrichissant systématiquement le propos du film. Elles dialoguent les unes avec les autres, se répondent, se font écho et soulignent l’état d’esprit des personnages. Rien n’est laissé au hasard, du maquillage des acteurs à leur placement millimétré sur chaque plan. Un vrai travail d’orfèvre. Le chef opérateur Seamus McGarvey nous offre une photographie sublime et maîtrisée de bout en bout. Images et sons se superposent dans une harmonie parfaite, laissant le soin au spectateur d’interpréter les non-dits à travers tout ce qu’il peut percevoir. La musique d’Abel Korzeniowski s’accorde à merveille avec le récit et les sons sont manipulés avec la même précision que les plans. 

nocturnal animals 

Un contenu pertinent mais qui manque de matière

Nocturnal Animals fait partie de ces films qui demandent un certain temps de digestion. Tom Ford réussit à installer tout au long de son histoire, une atmosphère pesante, oppressante, voire malsaine. Dès la surprenante et géniale scène d’ouverture, à laquelle on ne sait pas comment réagir, jusqu’au dénouement final, nos émotions sont sans cesse sollicitées. Pourtant, il manque quelque chose au scénario. Un petit on ne sait quoi de plus percutant qui aurait fait de ce film un chef d’œuvre. Si l’histoire du roman d’Edward est bouleversante, la « véritable » histoire de Susan l’est moins. Le lien entre les deux est certes intelligent, mais la « réalité » semble plutôt fade à côté de la fiction. De plus, on déplore que certains personnages soient trop stéréotypés : le gentil flic, le mari volage et absent…

Néanmoins, le jeu d’acteur est un sans faute, sauf peut-être pour Amy Adams qui aurait sans doute pu apporter davantage de teintes à son personnage. Mais on peut considérer que cela correspond à la personnalité de Susan, à vous d’en juger. Jake Gyllenhaal est bluffant et nous offre une magnifique performance, portée par un jeu tout en nuances. Mention spéciale également à Aaron Taylor-Johnson, d’une crédibilité très impressionnante dans un type de rôle qu’il n’a pas l’habitude d’incarner.

Les diverses thématiques du film sont par ailleurs bien traitées et nous amènent à réfléchir sur la solitude, les remords, le courage… Autant de valeurs et d’émotions dont chacun a sa propre définition, que chacun vit et ressent de façon différente, en ayant sa propre manière d’y faire face

Tom Ford nous propose une œuvre très travaillée sur les plans visuel et sonore, qui nous hante longtemps après être sortis de la salle. Superbes bande-son et photographie, jeu d’acteur incroyable, parallèles intelligents, Nocturnal Animals aurait cependant mérité un scénario plus fouillé et frappant (pour l’histoire ancrée dans le « réel »). Pour autant, malgré cette petite faiblesse, ce film doit être vu !