En lisant le titre, William 31 ans Scénariste, vous pensiez peut-être découvrir un reportage sur une star montante de la bd ? Que nenni ! Ce livre édité par Delcourt est une hilarante plongée dans l’égo d’un auteur que nous vous proposons de découvrir.
Un documentaire souriant
William 31 ans Scénariste débute par le personnage principal nous accueillant au pas de sa porte. Il fait rentrer une équipe journaliste dans son intérieur montrant à la fois son logement et les coulisses de son travail. Cependant, tout dérape et il doit refaire son entrée. Quel début pathétique ! En effet, ce recueil de blagues est un mockumentaire, un faux documentaire, suivant un scénariste de bd. William, personnage principal sans aucun nom de famille, veut impressionner les invités en multipliant les aphorismes. Cependant, des chutes du documentaire prouvent que William est un personnage arrogant persuadé d’être un génie. Il adopte la posture physique de l’auteur en recherche d’inspiration et justifie son alcoolisme par le besoin de se mêler au peuple. Pourtant, le scénariste est méprisé par son éditeur. William a abandonné les œuvres alimentaires pour se consacrer à l’ART et ne cesse d’affirmer avoir évolué mais continue à utiliser les recettes faciles (faire intervenir des nazis) et vit des genres dominants. Voulant dépasser les clichés sexistes, il supprime les femmes de ses récits. Il vit en pleine dialectique entre art et entertainment. Étant également un amateur des éditions originales, James se moque des collectionneurs voulant l’objet plus que la lecture.
La plus grande partie des récits suit William mais on croise également son éditeur Antonin. Ne pensant qu’à l’argent, ce dernier ment afin de cacher l’échec d’une série et en devient méprisant. Une hilarante page montre la complexité du métier d’une libraire et une autre la prétention des critiques de bd. Votre serviteur a donc ri de lui-même.
Au fil des blagues, le lecteur découvre par un cartoon la jeunesse de William. La mère du scénariste méprise son loisir. On est impressionné par la diversité des registres selon les récits : on trouve certes la plupart du temps des blagues sur une page mais également des pages d’illustrations, des cartoons sur une ligne dans un style enfantin, des fausses publicités ringardes de journaux, des extraits de scénarios (bien loin du chef-d’œuvre). Malgré cette mosaïque, William 31 ans Scénariste est l’œuvre d’un seul homme, le scénariste, dessinateur et coloriste James.
Une plongée dans l’édition
Si William 31 ans Scénariste est un livre d’humour, c’est également une découverte d’un métier méprisé par les médias. On découvre la solitude du scénariste pendant un festival. Le scénariste hiérarchise les genres en bande dessinée. Il refuse certains comme la fantasy pour préférer le polar, le thriller et l’adaptation littéraire. Son caractère lui vaut des relations conflictuelles avec son dessinateur. Ils ont certes une complémentarité corporelle en lien avec la différence physique de leur métier mais William exploite l’artiste dans une relation asymétrique. Le dessinateur est fidèle par contrainte de temps et l’autre polygame par besoin d’argent. Pour se venger, un dessinateur use de l’ellipse évitant les cases complexes. Cette situation prouve qu’il existe une différence de masse de travail et de salaire entre les deux fonctions.
Même si James est surtout scénariste, on pourrait se dire que William 31 ans Scénariste est la revanche d’un dessinateur démontrant l’étendue de son talent. Le dessin est dans l’ensemble réaliste mais l’encrage original est différencié selon les personnages (le scénariste a un encrage rouge). Ce sont surtout des strips sur trois cases dans les pages en noir et blanc. James multiplie les styles de dessin du réalisme au cartoon proche des Peanuts. Les chutes du documentaire adoptent un camaïeu bleu et le grain de vidéos anciennes.
William 31 ans Scénariste permet de passer un amusant moment de lecture par des touches d’humour très réussies et une grande variété des styles de dessin. Plus que les blagues c’est la plongée dans les sentiments d’un scénariste de bd qui nous touche.
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