Alors que quatre films sont annoncés sur les Beatles, une bande dessinée vous propose de remonter aux origines du phénomène quand le quatuor de Liverpool était encore peu connu à Paris.
Au début de la folie
Les scénaristes Vassilissa et Philippe Thirault cherchent d’abord à montrer l’importance des Beatles au Royaume-Uni par un concert de charité de la reine. Ce moment montre le paradoxe du groupe. Populaires et reconnus par les plus jeunes, les quatre musiciens restent un poil à gratter. Entre deux chansons, John Lennon utilise une blague pour se moquer de l’inégalité sociale. Les Beatles à Paris se situe aux débuts de la Beatlemania. Les fans deviennent plus nombreux et plus hystériques : les cris empêchent les musiciens de s’entendre pendant le concert et Ringo Starr ne peut plus prendre le train. Pourtant, un grand reporter les méprise.
Les Beatles à Paris montre que le groupe n’est pas seul mais, en décrivant plusieurs hommes de leur entourage, le lecteur comprend que leur succès ne vient pas seulement de leurs chansons. Le rôle de leur agent Brian Epstein est décisif. Dès le début, ce très bon businessman veut sortir de l’archipel britannique pour faire des Beatles des stars mondiales. Il manie très bien la communication navigant entre l’image officielle de bon garçons et les pratiques internes. Epstein contrôle totalement leur image : il leur interdit de boire de la bière devant les photographes. Cependant, il n’est pas là pour l’argent. Comme un grand frère, Epstein est très attaché à ces hommes très jeunes.
Les Beatles à Paris permet une double lecture. Un néophyte peut découvrir la folie créée par ces musiciens puis comprendre qui sont les personnages par les portraits en fin de volume. En parallèle, le fan repère les nombreuses allusions. Vassilissa et Philippe Thirault soulignent le surmenage d’Epstein qui provoquera sa disparition. On peut aussi comprendre qu’il voudrait être très proche de John…
Partir en voyage dans le temps et dans l’espace
Par le biais des Beatles, Vassilissa et Philippe Thirault montrent l’explosion de la pop. D’autres groupes sont cités comme la musique des Kinks ou une affiche sur Rolling Stones. Lors d’un concert de Ronettes, on découvre que George sortait avec l’un des chanteuses, Estelle. John drague Ronnie qui est le jouet de Phil Spector. Ce passage et la biographie en fin de volume sont encore trop aimables avec leur producteur génial mais pervers. Ce phénomène n’est pas réservé au Royaume-Uni. Des cases à Paris illustrent le succès phénoménal de Johnny alors que Sylvie Vartan peine.
Pour mettre en avant cette période, le dessinateur Christopher propose un dessin tout en rondeurs proche de la ligne claire. Il choisit des formes épurées mais les visages et décors précis plongent le lecteur dans l’ambiance de l’époque. Les couleurs de Degreff sont très pop.
Au départ, Les Beatles à Paris pourrait paraître un sujet pour spécialistes voire les nationalistes. Cependant, ce voyage est un excellent moyen de montrer la vie privée des Beatles. Ringo admire la salle de bain d’un palace tandis que John profite de l’éloignement de sa femme pour séduire d’autres femmes. Pour les musiciens, ce séjour en France est surtout vécu comme une aventure à l’étranger entre potes. Malgré le succès, ils demeurent des ados qui veulent s’amuser. A l’inverse, Paris est une contrainte pour leur agent. En effet, quarante concerts à l’Olympia ont été signés avant l’explosion de popularité. Cette opportunité de faire parler des Beatles est devenu une perte de temps. Epstein rentabilise le voyage par de nombreuses rencontres qu’il impose aux Beatles. Ce rythme de fou donnera la chanson Hard Day’s Night. Les Beatles reviennent sur terre car les stars locales comme Trini Lopez sont plus connues. Ils peuvent marcher dans la rue sans émeute.
Édité par Robinson, Les Beatles à Paris refuse la reconstitution historique pénible. Ce séjour est une suite d’anecdotes plus drôles les unes que les autres. Vassilissa et Philippe Thirault ne rédigent pas une hagiographie mais montrent des ados qui s’amusent de leur célébrité en liberté. John est en particulier très amusant par des réparties farfelues ou provocantes.
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