Si vous voulez retrouver un être cher ou si un fantôme hante votre maison, il est inutile d’appeler des chasseurs de fantômes vus au cinéma, mais il est nécessaire de contacter le Doctor Mirage comme le montre ce touchant récit en un tome chez Bliss éditions.
Un seul être vous manque…
Doctor Mirage débute par une pleine page constellée du monologue d’un réalisateur de télévision. Cette technique narrative est un habile moyen de présenter le personnage. Shan Fong dit Doctor Mirage déprime, car cette magicienne capable de communiquer avec les défunts a perdu son pouvoir et les morts sont dorénavant silencieux, en particulier, celui qui est le plus important pour elle, Hwen, son mari décédé. Par un flashback, on comprend l’origine de cette amputation. Ces fantômes étaient ses caméras qui, comme dans une émission de télé-réalité, la suivaient en permanence.
Doctor Mirage se sent abandonnée lorsqu’une jeune femme débarque à l’improviste chez elle. Grace Lugo lui explique que si elle ne voit plus les morts c’est parce qu’elle en est une et, comme elle, ils vivent en enfer. Elle veut lui prouver ses dires mais pour cela, elle doit se droguer. On le voit par ses yeux jaunes. Le dessinateur Nick Robles rend d’ailleurs très bien cette expérience par une mise en page et une colorisation rappelant le psychédélisme. Il instille ainsi le doute… Cette jeune rousse est-elle une véritable magicienne ou une simple droguée ?
Une magicienne amoureuse
Se concentrant sur ces deux héroïnes, Doctor Mirage est un récit féminin écrit par une scénariste, Magdalene Visaggio. Doctor Mirage est un personnage passionnant et rare car elle possède certes, de puissants talents lui permettant d’aller dans le monde des morts, mais elle est aussi une femme sensible et amoureuse de son mari décédé. Cette docteure est souvent déprimée car elle serait une misanthrope préférant les morts aux vivants. Dans ce volume, elle se retrouve dans la situation inverse après la perte de son pouvoir. Elle doit faire confiance aux visions d’une femme étrange. En effet, Grace est la plus ambiguë. Par son vocabulaire, elle semble en savoir plus que la spécialiste Shan par des termes ésotériques empruntés à l’antiquité mais aussi proche de l’argot des toxicos.
Contrairement au Doctor Mirage, Grace a une vision du monde des morts bien plus colorée. Cependant, au fil de l’avancée du récit, ce monde devient de plus en plus sombre. On peut saluer le très beau travail de Nick Robles sur la colorisation pour mettre en image tout cela. Grace entend aussi des voix puisque Hwen lui demande d’aller voir Shan. Bien entendu, aucun médecin ne la croit, et même Doctor Mirage est sceptique, ce qui provoque des tensions entre elles.
Le livre accélère l’action dans la deuxième partie quand Shan et Grace affrontent des monstres anciens. La magie remonte alors très loin dans le passé dans l’époque pharaonique avec l’apparition d’Anubis et d’un prêtre récitant des formules en hiéroglyphes. Huit mois plus tôt, Shan était en quête d’une solution pour que son mari revienne des vivants et ainsi qu’ils puissent fonder une famille. Ce passé et le présent se rassemblent dans le dernier épisode dans une construction qui, si elle est devenue classique, reste très efficace. Le dénouement est d’ailleurs surprenant par sa tristesse.
Fidèle au personnage de Valiant, Doctor Mirage propose un touchant récit sur la magie et le deuil. Cette nouvelle équipe créative emporte Shan ailleurs dans des mondes plus anciens et plus colorés l’obligeant à une douloureuse prise de conscience. Bliss propose ici une nouvelle perle à son très beau catalogue effectuant comme toujours un excellent travail d’édition, proposant en fin de tome, l’ensemble des couvertures alternatives et deux très belles doubles pages de Nick Robles avant le lettrage et la colorisation.
Si vous voulez avoir un voyage différent dans le monde des morts, vous pouvez consulter des liens vers l’intégrale Shadowman et vers Rapture.