Après Joe Golem, nous continuons l’exploration des arts mystiques par l’intégrale Shadowman de Bliss comics.
Une histoire de famille
A La Nouvelle-Orléans, un jeune homme, orphelin, découvre le passé sombre de ses parents et, se débarrassant de l’amulette maternelle, il est alors investi par l’esprit d’un dieu vaudou – le loa – du Shadowman. En fermant la barrière entre le monde des morts et celui des vivants, Josiah Boniface, le Shadowman, s’est sacrifié pour sa famille et le monde. Le héros est un métis ce qui est très rare dans les comics mainstream. Jack est un naïf plongé dans un monde aux nombreux mystères parfois bienveillants et d’autres fois dangereux. Jack n’est pas seul mais il est aidé par une société secrète – les Acolytes – représentée par un nain chercheur en occultisme – Dox – et son élève – Alicia. Être super-héros n’est pas une fatalité familiale mais le père de Jack lui permet de choisir avant de disparaître. Comme souvent avec Valiant, tout n’est pas donné en un épisode. Shadowman peut aller dans le monde des morts, antichambre de plusieurs mondes. Au fil des épisodes, Jack s’émancipe et veut tracer sa voie sans écouter les Acolytes.
Au pays du vaudou
Face à eux se dressent des démons du monde des morts aidés par une élite bourgeoise, la Confrérie. Justin Jordan utilise des références au vaudou – Baron Samedi, maître du monde des morts. Son pouvoir est assez flippant car Samedi dirige des zombies et lors de son attaque chaque mort rejoint de suite son armée.
L’action se déroule à La Nouvelle-Orléans. Patrick Zircher réalise de très beaux dessins réalistes avec des couleurs sombres. Ce style correspond très bien à l’histoire surtout qu’il n’hésite pas à faire du gore – une mise en scène de corps déchiquetés dont les lambeaux de chair ensanglantée s’agglomèrent pour faire apparaître un démon, mister Twist. On découvre très vite que Twist n’est en fait qu’un agent de Maître Darque. Pessimiste radical, il veut mettre fin à la souffrance par l’annihilation de toute vie.
Cette histoire me permet de découvrir un artiste, Roberto de la Torre, qui dessine au début uniquement le monde des morts. Les couleurs et l’encrage très charbonneux à la Jae Lee conviennent parfaitement à l’ambiance sombre de cet univers. Le noir est omniprésent et on ne trouve aucune zone de couleur lisse. C’est à la fois superbe et suffocant. Au fil des épisodes, le scénariste semble perdre peu à peu son énergie. Les sentiments où la psychologie des personnages sont peu développés.
Un redémarrage au milieu du volume
A partir de l’épisode 13X, Peter Milligan reprend les rênes et change totalement de direction. Il insère un nouveau personnage : Mambo Punk est une magicienne punk vivant isolée dans les marais. Jack gagne en profondeur avec des accès de violence en raison de son passé traumatisant d’enfant placé. Milligan fait de Jack un possible psychopathe, un autre stéréotype des films d’horreur. On découvre aussi qu’aller dans le monde des morts réduit la vie du Shadowman sur terre ce qui rend son pouvoir plus stressant. Cette série se termine de manière surprenante mais achève le cycle psychologique de la relation entre Jack et son père.
Bliss comics nous gratifie comme toujours de bonus conséquents– toutes les couvertures alternatives, l’ensemble des croquis de l’épisode 1 avant la colorisation et des épisodes de de la Torre.
Pour conclure, les dessins sont bons et même dans la partie écrite par Justin Jordan les rebondissements sont nombreux. Le récit s’améliore avec la venue de Milligan et de de la Tore. La fin de l’intégrale est surprenante et relance le récit qui s’est peu noyé dans le bayou au milieu du volume.