Initialement publiée quotidiennement sur Instagram avec Arte, que devient cette diffusion originale sur papier ?
L’histoire est scénarisée par Thomas Cadène (Sextape, Les Profondeurs d’Omnihilo), Joseph Safieddine (Yallah Bye) et Camille Duvelleroy et dessinée par Erwann Surcouf (Chant du Pluvier). L’ensemble des 76 pages a été publié par Delcourt le 20 septembre.
Un début original pour Eté
Abel et Olivia sont heureux mais, avant de se marier, ils décident de se séparer pendant l’été pour tout essayer. Leur amour résistera-t-il à ces expériences estivales ?
En plus de ce pitch original, la publication est surprenante car chaque page est le résultat d’une publication quotidienne pendant l’été sur Instagram. Ce rythme donne un récit forcément inégal mais l’ensemble garde un sens rassemblé en album. On se demande en tournant la page ce que vont tenter Abel ou Olivia. En effet, ils oublient très vite leur liste d’envies pour vivre une dérive estivale. Il s’en passe énormément durant cet été. Pour le lecteur, le sentiment change d’une page à l’autre et cela marche même si c’est d’une seconde à l’autre au lieu du lendemain sur Instagram.
L’histoire illustre un hédonisme qui sied parfaitement à la saison. Chacun des deux héros veut vivre des expériences qu’il n’a jamais pu faire et découvre ainsi d’autres vies et d’autres possibilités. On ressent une nostalgie de l’inachevé. L’homme ou la femme expérimente sans jugement : hétéro ou gay, seul ou à plusieurs… On lit un jeu moderne sur le genre. Au début, on reste dans les stéréotypes car il y a beaucoup de sexe pour l’homme et des expériences intérieures pour la femme mais cela varie au cours de l’été. On propose à Olivia plutôt qu’elle choisit mais elle est de plus en plus aventureuse. Les histoires tournent souvent autour du sexe. Est-ce la dernière zone d’expérience ? Les histoires ne concernent pas seulement la sexualité mais aussi la fête, les voyages, la drogue… Ce n’est clairement pas un récit pour enfants.
Un dessin expressif et aventureux
Le dessin m’a emballé. Le trait est certes simple mais il est très expressif. Il crée un contrepoint bienvenu avec les différentes expériences. Cela reste joyeux ou énervé mais jamais glauque. Erwann Surcouf expérimente aussi beaucoup dans les dessins en jouant sur l’encrage – avec ou sans, sur la – des tons très variés, sur le flou ou le très précis. Le texte relativement court permet de faire dire beaucoup par l’image.
Un manque de cohésion
Si certaines pages sont très amusantes, le scénario global n’est pas le plus réussi de l’album. Le récit reste en surface. Les pages sur le passé d’Abel et l’avortement d’Olivia sont justes mais cela aurait mérité plus de temps. Ce sont deux personnes qui testent pour un été une sexualité débridée mais cela reste deux vies banales. Le partage du scénario a peut-être bridé les envies des scénaristes. La fin arrive abruptement mais elle est assez bien vue. Le pied de nez en palindrome permet de finir en beauté.
On ferme le volume avec un avis mitigé. Été ne va pas au bout des possibilités du format et les personnages sont un peu trop désincarnés. On se demande si l’histoire ne sera pas vite oubliée. Par contre, cette lecture m’a permis de découvrir Erwann Surcouf et j’ai hâte de le lire dans un autre cadre.