Au départ une série dérivée de Lanfeust, Trolls de Troy a su affirmer l’originalité de cette histoire d’une humaine vivant au milieu d’une tribu de trolls. Le succès étant au rendez-vous, les éditions Soleil proposent On ne badine pas avec les mouches, le 25e tome de la série.
Les jeux d’amour et du hasard
Rysta Fukatou magicien d’Eckmül – et par ailleurs le plus dangereux ennemis des trolls après l’eau et le savon – est victime d’un piège. Un mage rival a versé un filtre d’amour et, frappé d’un coup de foudre incontrôlable, il tombe amoureux de la troll dont les poils ont servi pour la potion. Cette étrange épouse est par ailleurs la mère adoptive de Waha, l’humaine vivant parmi les trolls. Fukatou décide d’emmener sa nouvelle conquête dans la capitale et étrangement c’est toute la bonne société qui se pique de sauvagerie et de « trollitude ». Cependant, le mari de Puitepée est prêt à tout pour retrouver sa légitime épouse.
Ce tome aurait pu sortir au moment de la Saint-Valentin tant l’amour des Trolls est au cœur du récit. Mais comme le disent les Rita Mitsouko les histoires d’amour finissent mal en général et il est bien connu que les romances difficiles font toujours rire les spectateurs. C’est en effet le cas ici quand le jeune (mais peu malin), Pröfy veut respecter la tradition en construisant le logement pour accueillir la femme qu’il aime Waha. Cette humaine adoptée par les trolls est ravie de son choix de prendre un arbre en banlieue du village. Mais elle devrait bien plus s’inquiéter des lacunes en architecture de son valentin.
Au contraire, ces manques arrangent bien son père Teträm qui ne souhaite pas laisser partir sa fille. Ce caractère hyper-protecteur énerve sa femme Puitepée qui part bouder dans la forêt. L’amour fleurit aussi à Eckmül. Le mage Fukatou provoque une avalanche de lettres d’amour car il a proposé d’arrêter le célibat des mages. Mais, il voulait surtout réduire les dépenses de ses confrères dans les maisons closes. Grâce au dessin de Jean-Louis Mourier, le visage niais de l’amoureux mage nous fait sourire alors que ses paroles inspirées d’un chanteur belge bien connu font monter un rire dans la gorge du lecteur.
Des trolls du XXIe siècle
Depuis le début, les créateurs sont fidèles au poste puisque Christophe Arleston, grand chef de l’univers de Troy est le scénariste et Jean-Louis Mourier est le puissant mage des dessins alors que la magicienne Claude Guth prépare les potions de couleurs. La recette est aussi la même. Les trolls sont toujours aussi brutaux mais tellement amusants. Ce sont eux les stars de la série car les humains suent d’arrogance. On retrouve avec joie les jeux de mots sur les prénoms ainsi que les blagues visuelles – cette fois-ci on croise un troll aux mains d’argent, allusion à Tim Burton.
Mais à chaque tome les ingrédients changent. Après une amusante promenade dans une station de ski pour critiquer ces ghettos de luxe, les auteurs s’emparent des couples multiculturels. En effet, le couple formé par le mage Fukatou et la troll Puitepée dérange les deux communautés. Les trolls sont surpris qu’elle ne le mange pas et les mages veulent très vite domestiquer la troll par des sorts. Alors qu’Asterix a souvent tendance à aseptiser ses récits au point de sentir la naphtaline, cette série qui est clairement l’héritière de la tribu gauloise, réussit à s’emparer de l’actualité pour en rire tout en nous faisant réfléchir. Dans ce volume, le couple mixte dérange avant de lancer une mode. Cette vision optimiste de problèmes très contemporains fait un bien fou alors que les confinements se succèdent.
On ne badine pas avec les mouches est à nouveau une réussite pour la tribu de Waha. Le lecteur s’amuse des maladresses et du manque de diplomatie des trolls puis il sourit de l’arrogance des magiciens. Et si les trolls faisaient une meilleure série que les Gaulois ? Si la BD d’humour vous intéresse, vous pouvez retrouver notre chronique sur Hawkeye et sur le tome 10 de Rick & Morty.