Just Focus poursuit sa découverte des grands noms de la littérature. Ce mois-ci, nous mettons en avant Fred Vargas. Auteure de romans policiers depuis plus de 30 ans, son dernier roman, Quand sort la recluse a été un grand succès de l’été 2017.
Un cerveau bien rempli
Fred Vargas, de son vrai nom Frédérique Audoin-Rouzeau, est née le 7 juin 1957. Elle est très vite plongée dans le monde des arts et de la culture. Son père est l’écrivain Philippe Audoin, proche du poète surréaliste André Breton. Sa mère est ingénieure chimiste. Fred Vargas complète ses études d’archéologie et obtient un doctorat en Histoire sur la peste au Moyen-Âge. Elle travaillera un temps comme chercheuse au CNRS où elle recevra la médaille de bronze pour ses travaux en archéozoologie. Fred Vargas participe à plusieurs chantiers de fouilles. C’est entre deux chantiers qu’elle écrira son premier roman : « je les écrivais pendant les vacances. C’était l’école buissonnière. »
Un succès immédiat
Son premier roman s’intitule Les Jeux de l’amour et de la mort. Il met en scène Tom, un jeune peintre en mal de reconnaissance. Lors d’une soirée mondaine, Tom va entrer sans autorisation dans le bureau du riche mécène Gaylor. Il y découvre un cadavre. Le peintre va devoir se démener entre ses rêves de célébrités et les accusations de meurtre assénées par la police. Sorti en 1986, ce roman policier remporte le prix du festival de Cognac la même année. Suite à ce succès, l’écrivaine choisi le pseudo Fred Vargas, faisant écho au nom d’artiste-peintre de sa sœur jumelle, Jo Vargas.
Après deux romans moins bien accueillis par le public, Fred Vargas invente le personnage qui fera sa renommée. C’est dans L’homme aux cercles bleus que le commissaire Jean-Baptiste Adamsberg apparaît pour la première fois. Ce personnage rêveur, flegmatique et très intuitif séduit les lecteurs. Les ventes restent modestes mais l’auteure est repérée par les maisons d’édition. Debout les morts (1995) et Sans feu ni lieu (1997) se vendent respectivement à 1 000 et 8 000 exemplaires. Une première surprise est créée en 1999 avec L’homme à l’envers. Fred Vargas passe de 8 000 à 50 000 livres vendus. Puis en 2001, c’est l’explosion. 330 000 ventes pour Pars vite et reviens tard ! Le succès ne quittera plus l’écrivaine.
De 1991 à 2017, Fred Vargas écrira neuf romans retraçant les aventures du commissaire Adamsberg. Quatre d’entre eux obtiendront des prix littéraires. Le personnage du commissaire tient également le rôle principal dans une série de nouvelles (Coule la Seine). Fred Vargas est l’auteure de cinq autres romans, trois recueils de nouvelles, deux bandes dessinées et quatre documents et essais. Les récompenses s’accumulent et les ventes décollent : Fred Vargas a vendu plus de 5 millions d’exemplaires traduits dans 40 pays.
Une œuvre multimédia
Le succès des romans de Fred Vargas fait envie aux réalisateurs. C’est Régis Wargnier qui transposera le premier l’une des histoires de Jean-Baptiste Adamsberg sur grand écran. L’adaptation cinématographique de Pars vite et revient tard sort en 2007. Le rôle principal est campé par José Garcia. Le film engrangera 843 531 entrées au box-office français. Josée Dayan réalisera quatre autres films centrés autour du commissaire pour la télévision française. Ses adaptations (Sous les vents de Neptune, L’homme aux cercles bleus, L’homme à l’envers, Un lieu incertain) mettent en scène Jean-Hugues Anglade dans le rôle principal.
À la radio, deux des romans de Fred Vargas sont adaptés sous forme de feuilleton radiophoniques. En 2013, France Culture diffuse l’histoire de Pars vite et reviens tard en 10 épisodes à (ré)écouter en suivant ce lien. En 2017, France Culture adapte le premier roman de la série des Évangélistes, Debout les morts. Les 10 épisodes sont également disponibles sur ce lien.
Les clés de la réussite
La popularité des romans de Fred Vargas n’est plus à démontrer. Son succès est dû aux différents atouts de l’auteure. Le passé et la formation de Fred Vargas sont perceptibles dans son œuvre. Dès la première histoire d’Adamsberg, l’écrivaine a su mettre à profit son doctorat sur la peste au Moyen-Âge. Ses compétences en archézoologie transparaissent dans les scènes de crimes, dans cette rigueur scientifique qu’elle prête à ses enquêteurs. Mais surtout, ses romans sont « traversés par les animaux », comme elle le dit elle-même. Le cerf, le pigeon, le loup, l’araignée… L’auteure avoue les utiliser pour faire passer les émotions sans tomber dans la mièvrerie ou le sentimental. Et les émotions sont bien au rendez-vous. L’horreur, la compassion, la frustration, la colère, la mélancolie… Les romans de Fred Vargas font passer les lecteurs par une palette complète de sentiments forts.
Ces sentiments sont bien entendus portés par des personnages tout aussi forts. Il y aurait beaucoup à dire sur son héros Jean-Baptiste Adamsberg. Un policier sans méthode, qui se laisse porter par ses idées vaporeuses et ses intuitions. Le commissaire est attachant et c’est ce qui a valu à l’écrivaine son succès. Mais la vraie force de ces romans policiers, ce sont les personnages secondaires. Des personnages intéressants, avec leurs histoires, leurs personnalités propres. Ils gravitent autour du commissaire mais ils ont leur propre vie. Ils sont extravagants, introvertis, détestables, captivants. Ils ont leurs faiblesses, ils ont des buts et des rêves. C’est tout un petit monde qui se créé au fil des pages. Le capitaine Adrien Danglard, policier alcoolique, père célibataire de cinq enfants. Son intelligence et sa méthode en font un allié indispensable du commissaire. Mathilde Forestier, scientifique fantasque au franc parlé, mère du grand amour de Jean-Baptiste Adamsberg. Fred Vargas joue avec toutes ces petites vies de fiction et invente pour nous un monde plus vrai que nature.
Cette illusion de réalité est à double tranchant. Fred Vargas est auteure de roman policier. Elle raconte des meurtres, elle fouille dans les recoins les plus sombres de l’âme humaine et en ressort les actes les plus vils. Son dernier roman, Quand sort la recluse est typiquement de ceux qui vous dégoûtent de l’être humain. Pourtant, l’auteure assure qu’elle évite l’horreur dès que possible. « Je détesterais qu’un livre fasse mal à un seul de mes lecteurs. […] Je suis obligée de manipuler des meurtres, mais vous remarquerez que les gens assassinés n’ont pas de famille. Je ne veux pas avoir à décrire le chagrin des endeuillés. » Cette « quête du réel » ne vous rendra pas cynique pour autant. Pour chaque être malveillant, Fred Vargas présente un personnage drôle, un ami dévoué, un inconnu généreux.
Les romans de Fred Vargas sont à découvrir absolument. Ses romans sont disponibles dans n’importe quelle librairie ou site de vente en ligne.