Depuis la rentrée il y a deux mois, les prix littéraires font battre l’actualité culturelle. Aujourd’hui, Mardi 3 novembre 2015, c’est le prix Goncourt que l’on remet.
Parmi les quatre auteurs sélectionnés le Mardi 27 octobre 2015, c’est finalement Mathias Enard qui s’est vu remettre le prix Goncourt ainsi que son chèque de 10 euros symbolique cette année pour son livre intitulé Boussole publié chez Actes Sud.
Mathias Enard nous parle de son livre *
“Interroger la frontière. Essayer de la comprendre, dans ses flux, ses reflux, sa mobilité. La suivre du doigt. Plonger la main dans le courant de la rivière ou la saignée du détroit. La parcourir avec ceux qui l’ont explorée, voyageurs, poètes, musiciens, scientifiques. En relever les traces, les cicatrices anciennes ou les interactions nouvelles. Entrevoir tour à tour sa violence et sa beauté. Exhumer des passions oubliées et des échanges enfouis, reprendre des dialogues parfois interrompus. Tenter humblement de recenser les marques de cette passion, de ce qui se joue entre soi et l’autre, entre Les Mille et Une Nuits et À la Recherche du temps perdu, entre L’Origine du monde et un pasha ottoman, entre le chant du muezzin et des lieder de Szymanowski.
J’ai été ce qu’on appelait autrefois un orientaliste. J’ai étudié l’arabe et le persan à l’Institut des langues orientales. Comme mes personnages, j’ai parcouru l’Égypte, la Syrie ou l’Iran. J’ai essayé de reconstruire cette longue histoire, celle de l’amour de l’Orient, de la passion de l’Orient, et des couples d’amoureux qui la représentent le mieux : Majnoun et Leyla, Vis et Ramin, Tristan et Iseult. Sans oublier ce qu’il peut y avoir de violent et de tragique dans ces récits, de rapports de force, d’intrigues politiques et d’échecs désespérés.
Ce long voyage commence à Vienne et nous amène jusqu’aux rivages de la mer de Chine ; à travers les rêveries de Franz et les errances de Sarah, j’ai souhaité rendre hommage à tous ceux qui, vers le levant ou le ponant, ont été à tel point épris de la différence qu’ils se sont immergés dans les langues, les cultures ou les musiques qu’ils découvraient, parfois jusqu’à s’y perdre corps et âme.’’
Le prix Goncourt
Le prix Goncourt est animé depuis 1903 par dix membres du jury, communément appelés « les Dix ». Cette élite bénévole se réunie régulièrement autour des problématiques culturelles, littéraires et éditoriales en France.
Voici la liste actuelle des Dix : Paule Constant, Pierre Assouline, Régis Debray, Françoise Chandernagor, Bernard Pivot (président), Didier Decoin, Edmonde Charles-Roux, Philippe Claudel, Patrick Rambaud, Tahar Ben Jelloun.
Si vous vouliez faire parti du jury, sachez qu’il est impossible de postuler et que le remplacement d’un membre ne se fait que par cooptation lorsque l’un d’eux décide de se retirer ou décède. Seuls les auteurs francophones sont éligibles pour faire partie de l’Académie Goncourt. La nationalité française n’est pas requise ! Le nouveau membre se voit attribuer le fameux couvert de son prédécesseur chez Drouant (rue Gaillon dans le deuxième arrondissement de Paris).
Mais si vous n’êtes pas dans les petits papiers de ces messieurs, inutile donc de vous fatiguer et d’espérer vous asseoir à cette table… La fréquence des rencontres de ce petit groupe nécessitant une entente parfaite entre eux.
Les quatre romans finalistes du Mardi 27 octobre :
Nathalie Azoulai Titus n’aimait pas Bérénice chez P.O.L.
Mathias Enard Boussole chez Actes Sud
Hédi Kaddour Les Prépondérants chez Gallimard
Tobie Nathan Ce pays qui te ressemble chez Stock
Le prix Goncourt 2014 : Lydie Salvayre pour Pas pleurer aux éditions du Seuil. Son livre s’est vendu à 282 000 exemplaires.
*texte écrit par l’auteur du livre, Mathias Enard, et tiré du site Internet de la maison d’édition Actes Sud.
Crédits photo : nouvel obs.