Les Cercueils sur mesure de Truman Capote, livrés chez vous.

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Truman Capote est un véritable maître de l’intrigue, et si vous êtes à moitié schizophrène dans vos choix de lectures, que vous aimez la grande littérature, la vraie et que pourtant parfois, votre inconscient vous amène directement dans les rayons où logent de médiocres polars, Cercueils sur mesure va changer ces mauvaises habitudes. Parfois bof et d’autres fois un peu décevant, un paquet de polars ont tous les matériaux d’une belle intrigue et malheureusement une exploitation assez pauvre de la langue, le tout rapporté à un champ lexical d’environ 100 mots pour 562 pages. De la matière et puis plus rien. L’intrigue se termine et vous avez le sentiment d’avoir encore loupé le policier qui tue.

Cher lecteur, si ce n’est pas déjà fait, tu peux dès à présent te rendre en librairie et trouver ton bonheur pour la modique somme de deux euros, oui Monsieur. C’est la collection Folio 2€ qui te donne l’accès à un super livre de Truman Capote, et à un corps de rêve puisque ce sont deux croissants que tu ne mangeras pas cette semaine.

L’intrigue maîtrisée de Truman Capote

Cercueils sur mesure est une nouvelle qui se déroule dans un petit village des États-Unis. Une série de crimes frappe la ville : toutes les victimes reçoivent un petit cercueil avec une photo à leur effigie, puis après une attente interminable, elles meurent un beau jour, dans des circonstances brutales. À chaque meurtre, la victime disparait alors qu’elle s’y attend le moins, qu’elle vit sa journée et fait ce qui la rend heureuse : tout est soigneusement calculé.

Dans cette affaire, Jake Pepper enquête sur cette série de meurtres des années durant. Un mystérieux « TC » (que l’on suppose être les initiales de l’auteur) le rejoint pour l’aider dans ses investigations. Alors que le premier est usé par cette enquête qui menace sa nouvelle amie, « TC »  en devient littéralement accro et en fait une affaire personnelle. Toutes les victimes ont un seul point commun : la rivière bleue. Si plusieurs personnes sont liées par cette rivière, une seule semble tirer les ficelles du jeu macabre. Sans jamais laisser un indice derrière lui, le meurtrier ne sera peut-être jamais enfermé, malgré les certitudes des deux enquêteurs sur son identité. Vous vous plongerez dans une intrigue courte, mais intense, que vous lirez d’une traite (prévoyez donc deux petites heures de solitude pour traiter rapidement le cas du suspect principal, Bob Quinn). Truman Capote réussi un coup de maître, alternant des passages dont on ne peut détourner les yeux tellement ils sont captivants, avec de calmes promenades en forêt, le tout saupoudré de moments où le cœur s’emballe, les idées sur le meurtre fusent puis s’apaisent face au plat de l’eau de la rivière meurtrière.

« De toutes les créatures existantes, l’homme est la plus détestable. De tous les êtres vivants, il est le seul, l’unique, le solitaire, doué de méchanceté. C’est là le plus bas de tous les instincts, de tous les vices, de toutes les passions – le plus haïssable. Il est le seul qui inflige la douleur par jeu, en toute connaissance de cause. Et il est également le seul de toute la liste à posséder un esprit mauvais. »

Une écriture riche

Truman Capote choisit une narration peu commune pour cet ouvrage. Mettant « TC » en place de narrateur, cette enquête a parfois des allures de pièce de théâtre, mettant des échanges vifs entre les personnages, rendant le récit haletant et digne d’un intérêt qui ne vous quittera pas avant la dernière page.

Aussi, le rythme de la nouvelle court à contre-courant de la définition de « nouvelle » que l’on apprend à l’école. Tout ne va pas en s’accélérant, au contraire : on entre très rapidement dans le vif du sujet et l’on prend vite note de tous les éléments qu’ont en main les enquêteurs. Mais l’enquête s’enlise et le rythme également puisque Bob Quinn, le suspect principal, est intouchable. Toutefois, ce n’est pas pour autant que le livre de Truman Capote en devient moins intriguant. Jusqu’à la fin, le doute sur l’implication de Bob Quinn plane, puis il s’efface derrière un petit rayon de soleil, au bord de la rivière bleue.

crédit photo: couverture de l’ouvrage, chez Folio 2€