Les Humanoïdes associés relancent leur revue par une réédition des récits des années 1970 et 1980. Mais Métal Hurlant s’interroge aussi sur le monde actuel dans des bd inédites. Ce numéro cinq est consacré aux univers virtuels. Le virtuel pourra-t-il vous apporter des émotions réelles de lecture ?
Découvrez dans Métal Hurlant une page de l’histoire
On envisage souvent la BD par des albums achetés en librairie ou en supermarché mais ce format n’est qu’un moment de son histoire. Le retour de la revue Métal Hurlant, sous un nouveau format, en est un exemple. En effet, l’histoire de la BD franco-belge a été marquée par des revues dès ses origines. Les plus anciens ont connu Pilote. Si Spirou poursuit sa route, il manquait une revue plus adulte et radicale. C’est ce manque qu’est venu combler Métal Hurlant fondée par Jean-Pierre Dionnet, Philippe Druillet et Moebius.
Aujourd’hui, elle reparaît dans un format bien plus épais reprenant la mode des mooks. La nouvelle formule alterne un numéro paire d’archives compilant des moments marquants ou ignorés de la première revue et un numéro d’inédits autour d’un thème commun. C’est le cas de ce numéro cinq qui nous plonge dans le métavers.
Découvrez une vision neuve de la bd
Ce nouveau numéro de Métal Hurlant ne rassemble pas que des auteurs français mais le lecteur peut profiter d’artistes reconnus et de jeunes pousses du monde entier. La première impression est celle d’un foisonnement créatif. Les propositions graphiques sont très différentes On passe du style réaliste très franco-belge de Ponzio à une forme épuré en noir et blanc de Quievreux. Le lecteur s’amuse des dialogues dans une nouvelle histoire puis se plonge dans une œuvre totalement muette. On peut ressentir la frustration de quitter un univers trop vite disparu. La plupart des artistes proposent des mondes totalement différent de leurs œuvres habituelles. Cependant, on peut profiter de retrouvailles avec le Lapinot de Trondheim.
Ce numéro de Métal Hurlant rassemble en grande partie des bds mais pas seulement. Au fil des pages, le lecteur trouve des illustrations numériques d’Otto Maddox et même l’artiste multimédia Jean-Michel Ponzio, ayant travaillé aussi au cinéma. On peut alors saluer le travail éditorial. Les courtes présentations des auteurs au début de chaque nouvelle permettent d’approfondir les recherches.
Découvrez une vision neuve du Métavers
Les multiples regards permettent cependant d’avoir une vision commune. Le futur présenté dans Métal Hurlant est souvent sombre. Matthew Sheean, scénariste et dessinateur, dénonce les trolls qui jouissent de la violence qu’ils déversent sur le réseau. Dans l’éditorial de Métal Hurlant, le rédacteur en chef Jerry Frissen adopte un ton désabusé. Le virtuel ne fait plus rêver car il singe le réel et oublie l’onirisme. Pourtant, le métavers permet de parler d’identité. Est-on différent en allant dans un autre monde ? Pour Mark Waid, changer de corps dans le virtuel, c’est changer d’esprit. Au contraire, ceux qui conservent leur corps font preuve de narcissisme. Plusieurs articles apportent une vision plus scientifique comme le développement des IA. Un texte inverse la logique en se basant sur la physique. Et si le réel était un mensonge numérique ?
Métal Hurlant apporte des précisions la géopolitique du futur. Plusieurs bd associent l’exploration du métavers et celle de l’univers. Il faut dire que la Terre est difficile supportable en raison de la pollution. Les mafias dominent des Etats et partent à la conquête de territoires inhospitaliers. Plus intime, cet univers devient un lieu d’expérimentation amoureuse mais sans espoir… Une nouvelle parle de l’esclavage des créatures virtuelles. Si on a un petit creux, on peut savourer la nourriture dans le futur mais cela ne donne pas envie : le poisson a disparu mais il reste le clonage pour les riches. Le futur est en effet très inégalitaire.
Ce métavers est une terre de contrastes. Si certaines pages offrent des moments oniriques, d’autres passages sont plus politiques. Des astronautes attaquent des monolithes Apple. Cette diversité est aussi visuelle. Une nouvelle est en peinture avec des couleurs très sombres alors que la suivante est lumineuse.
Les Humanos proposent également de poursuivre des sagas mythiques avec le Méta-barons et l’Incal dans Kill Tête-de-Chien.