Métal Hurlant retourne dans le passé, mais ce huitième numéro de la relance du mythique magazine est le dernier numéro historique sorti le 23 août avant de se consacrer à des récits inédits.
Une fin pour un renouveau
Ce numéro huit de Métal Hurlant marque le dernier numéro historique. Rassurez-vous, la revue continue et va même davantage vers l’avant puisque tous les prochains numéro seront consacrés à la création. Seul un cahier central sera réservé à des pages historiques de la revue. Pour ce final, les coordonnateurs Claude Ecken et Christophe Quillien n’ont pas fait les fonds de tiroirs.
Un monument de la BD mondiale ouvre ce volume : Arzach de Moebius. On le comprend par ce premier chapitre mais également par le texte avant la BD qui, comme pour chaque récit, explique le contexte, l’origine et la biographie du ou des artistes. Moebius est une influence directe dans ce numéro de Métal Hurlant à travers le très proche Teonanacatl de Cortman. Les récits suivants sont tout aussi mythiques : Polonius écrit et dessiné par Jacques Tardi puis Guerre de Philippe Druillet.
Le feux d’artifice créatif est une démonstration de techniques de dessin : La débandade des frères Schuiten réalisée à l’acrylique est un mirage de couleurs tandis qu’Hydrogénèse de Caza est un rêve à l’encre de Chine et à la gouache blanche. Les expérimentations sont aussi narratives. Plusieurs récits n’ont aucun texte et laissent au lecteur le soin de construire le récit. Metal Hurlant ne s’est pas limité à la science-fiction : Arno décrit les dernières heures avant la chute de la capitale nazie dans Berlin 1945. Il y a également une réflexion sur les inspirations de ces œuvres.
Dans son interview, Bilal souligne l’importance du lieu de naissance. Hélas, sa diatribe sur le wokisme puis la complainte sur la BD actuelle font mal. Vouloir écrire sur le futur tout en comprenant si mal le monde contemporain est triste. Cette détestation du réalisme est contredite par la force du récit suivant Hard Porn. Au contraire, le rédacteur Manœuvre ravit en se souvenant du passé sans amertume.
Une plongée dans l’édition
Par ces numéros historiques, le lecteur rentre dans l’histoire de la BD. Un article entre deux récits explique pourquoi toute revue de bd devait inclure 10% de texte. Chacun s’y met à Métal Hurlant mais Jean-Pierre Dionnet assure l’essentiel. Submergé par la masse de travail, l’éditeur en chef recrute des spécialistes du cinéma ou de la littérature bis. Cette ouverture touche également les artistes prouvant la vitalité de la création au mitan des années 70 et 80. Ces différentes arrivées diversifient des styles avec des adeptes d’une nouvelle ligne claire comme Serge Clerc et des stylistes d’un imaginaire crade comme Bilal.
Des thèmes pleinement dans l’époque nous parlent encore : la révolution sexuelle par la représentation de corps nus, l’antimilitarisme chez Marc Caro, la robotisation offrant une vaine civilisation de loisir par Dominique Hé, la musique… Pourtant, l’engagement politique est rare dans la rédaction de Métal Hurlant. Chantal Montellier fait figure d’exception. Dans le dernier tiers de Métal Hurlant sur la BD rock, Serge Clerc se démarque par la modernité de son trait.
Pour le dernier regard en arrière vers son passé, le magazine Métal Hurlant propose une explosion artistique. Des grands noms démontrent leur talent et des interviews d’acteurs majeurs de la revue éclairent ce passé. Cependant, pour notre plus grand plaisir, l’éditeur Les Humanoïdes Associés a l’intelligence de mettre en avant des auteurs ayant moins marqués l’histoire de la revue.
Retrouvez sur le site les chroniques des précédentes sur le numéro cinq et le numéro six.