Vous avez adoré l’adrénaline dans Ocean 11 et ses suites mais vous en avez marre de la testostérone ? Suivez les femmes de la famille Banks pour découvrir une famille de braqueuses.
Une famille en (quête d’) or
A Chicago, les Banks sont une famille doublement particulière. Ils vivent du vol et ce sont les femmes qui sont les braqueuses depuis des années, mais leur plus gros coup est encore à venir et il est aussi le plus personnel. Comme le souligne l’introduction de ce livre, le braquage est un genre cinématographique très populaire et qui a su se moderniser en se féminisant. The Banks se glisse dans ce sillage en proposant de suivre sur six épisodes la préparation haletante d’un casse en famille. Le vol n’est pas présenté comme un péché mais comme un moyen, presque comme un autre, d’élever ses enfants. La petite-fille Célia propose à sa mère et à sa grand-mère de réaliser le coup du siècle. Elles sont d’abord réticentes car elles ont toujours échappé à la prison en évitant de prendre des risques inconsidérés. De plus, l’inspectrice Juanita Vasquez se rapproche dangereusement de la famille. Un mystérieux fait du passé renforce leur stress mais c’est aussi cet évènement qui va pousser les Banks à agir. C’est le début d’une triple course : pour le vol, la vengeance et pour éviter de se faire prendre.
Une famille en quête de justice
Cette nouvelle sortie de l’éditeur américain TKO Studios publié en France par Panini est aussi une saga familiale au long cours en suivant trois génération de femmes noires des années 60 à nos jours. Après avoir fui la violence du Sud, la grand-mère Clara n’arrive hélas pas à trouver du travail à Chicago et c’est en apprenant les techniques de vol avec son mari, Melvin Banks, qu’elle trouve une carrière. La fille Cora a reçu une double éducation. À l’école, les matières académiques, et à la maison, le vol. La petite-fille Célia travaille avec succès pour une banque d’investissement. Elle a renié le passé criminel des Banks et sort avec un blanc mais elle change d’avis en se heurtant à un plafond de verre. Chacune est indépendante des hommes.
La scénariste sort du récit chronologique pour sauter d’une époque à l’autre en quelques pages voire revenir dans le passé. C’est aussi un moyen de montrer que chaque femme de la famille Banks a dû subir le racisme et l’injustice. La scénariste Roxane Gay a un parcours original car elle a commencé comme autrice et éditorialiste au New-York Times avant de gagner un Eisner Award – les Oscar de la bd – pour la mini-série Marvel World of Wakanda (meilleure mini-série). On reconnaît son ancien métier par une description précise du contexte. Le déplacement de Clara correspond à un vaste mouvement de migration des Afro-américains du Sud pratiquant la Ségrégation vers le Nord-Est industriel en quête de main-d’œuvre. Elle présente une famille anti-conformiste de bien des manières et montre que si le racisme se présente moins à visage découvert, la discrimination n’a pas pour autant cessé.
La dessinatrice Ming Doyle sert le récit en permettant au lecteur de facilement repérer les différentes périodes. Elle sait montrer des corps différents et la beauté quel que soit l’âge mais son dessin est un peu figé pour un récit d’action. Au contraire, la coloriste Jordie Bellaire évite d’ailleurs les tons sépia ou le noir et blanc pour le passé tout en proposant des tonalités à la fois douces et vibrantes comme elle a su le faire sur Doctor Mirage.
Au départ perturbé par les dessins, The Banks emporte l’adhésion du lecteur par la qualité en or du scénario et par les portraits de femmes aussi fortes que le diamant. La qualité des dialogues, aussi vif qu’un pickpocket finira de vous convaincre que The Banks est une affaire à ne pas manquer pour découvrir une famille de braqueuses.
Vous pouvez trouver des chroniques de la même maison d’édition américaine, TKO sur l’incroyable Goodnight Paradise et le western 7 Deadly Sins.