Et si la nature était le meilleur moyen de résoudre la crise climatique ? La série Carthago montre en effet que les fonds marin recèlent des secrets pouvant éliminer la surpopulation et ce n’est pas le tome 14 qui démentira cette affirmation…
Carthago ou le monde du futur antérieur
Ce volume de Carthago édité par Les Humanoïdes Associés marque la fin du diptyque du Bagarreur, autour d’un requin géant. Le scénariste Christophe Bec, le dessinateur Ennio Bufi et la coloriste Andrea Meloni prolongent le tome treize et élargissent leur description d’une Terre plongée dans une monde post-apocalyptique.
Lou Melville vient de sauver un moine qui se jetait à l’eau. Pris dans une folie mystique, il allait s’offrir en sacrifice à un requin géant. Elle ne comprend pas ce qui se passe. Victime d’un accident de plongée, la jeune femme a été sauvée par un groupe de moines catholiques qui l’a installée dans leur refuge sur une ancienne station marine. Cependant, Lou n’est pas la plus mal en point et, au contraire, elle semble être la dernière à garder la raison. Plusieurs moines psalmodient le nom d’un requin préhistorique, le mégalodon Abzu. Dans un univers dystopique de Carthago, la nature a écrasé l’humanité. Des lambeaux de civilisation perdurent mais, à l’image de cette communauté de moines, ces survivants reviennent progressivement à la sauvagerie. La nature redevient une religion car les moines retournent au paganisme avec un animal totem, ici c’est un requin géant. Le lecteur sent une forte influence médiévale dans la description de la communauté religieuse. La série passe alors du réel à la dystopie de science-fiction inspirée de l’héroic fantasy.
Carthago est également un hymne écologique. Le tome précédent a montré la destruction provoquée les êtres humains. Ici, le lecteur comprend que les humains ne dominent pas la faune. La violence des animaux de Carthago est le reflet de celle des hommes. Cela se revoit dans les dessins d’Ennio Bufi. Son style réaliste, dans la lignée de son travail sur le XIII de Vance, impressionne par sa précision. Certaines scènes sous-marines rappellent les scènes des Dents de la mer. Bufi marque le lecteur par sa représentation de la taille gigantesque du requin. Cet aspect blockbuster se retrouve dans une série de plusieurs double pages, dignes du plus beau film catastrophe. La mise en page est également bien plus moderne. Aucune page ne choisit le gaufrier mais des cases rectangulaires de différentes tailles. Pour autant, la lecture reste toujours aisée
Un huis clos en pleine mer
Depuis deux tomes, Carthago décrit un groupe enfermée sur une station en pleine mer. Ils s’y sont réfugiés pour fuir les terres contaminés. Ce monastère nous montre un double enfermement : un huis clos géographique car on ne peut quitter la station mais également religieux car les moins vivent en rupture du monde extérieur. Ce rejet provoque un sentiment d’oppression et contamine les pensées des occupants de la station. En effet, il existe un complot au sein des moines dominicains. Même parmi ces croyants, le christianisme est dépassé par le nouveau contexte. Un mouvement néo-paganiste existe en secret et, devenant de plus en plus nombreux, il veut prendre le pouvoir.
Dans ce nouveau volume de Carthago, le conflit devient ouvert et le sang coule quand les dirigeants de la communauté cherchent le lieu secret du culte d’Abzu. Le prieur est dépassé quand la division au sein de sa communauté aboutit à une bataille rangée. Les moines pacifiques sont devenus de sauvages païens. La tension monte avec l’arrivée d’un troisième groupe, des pirates venues du continent. Ces brutes cherchent un trésor caché dans la station.
Ces conflits sont l’occasion pour le scénariste Christophe Bec de se lancer dans une réflexion sur le christianisme. Lou est athée. Pour elle, l’au-delà est à l’image d’un océan profond : un néant. Les différents thèmes sont transmis en peu de mot dans ce tome car l’essentiel passe par le dessin
Ce premier tome du nouveau cycle de Carthago propose une histoire intime construite autour de la découverte d’un îlot de survivants menacés de l’intérieur. Cette suite élargit l’horizon en basculant dans un blockbuster impressionnant et même totalement réjouissant par les dessins. Un nouveau cycle se fait jour dans la dernière partie : Lou peut parler au requin par la pensée.
Retrouver sur notre site, la chronique du tome précédent ainsi que la suite la mythique série des Méta-barons chez le même éditeur