Que se passe-t-il quand une multinationale confie à un auteur indépendant le soin d’écrire le passé d’une série majeure ? C’est ce qui arrive dans la collection Grand Design. Où après Ed Piskor sur les X-Men, Tom Scioli s’empare des Fantastic Four.
Une taille et un propos originaux
Fantastic Four : Grand Design publié par Panini comics est est une collection aussi originale par son format que par son propos. Proche d’un journal, ces grandes pages empêchent de regarder l’ensemble d’un regard, mais offrent des ressources décuplées pour la mise en page. Pour le propos, Marvel confie à un artiste underground les clés d’une série ancienne, à charge pour lui de résumer seul l’histoire d’une série vieille de plusieurs dizaines d’années.
Un passé recomposé
Tout débute par l’accident d’une navette spatiale. Les rayons cosmiques ravagent les corps de trois hommes et une femme. Cependant, ce ne sont pas les FF mais Galactus sauvé ensuite par le Gardien. L’auteur fait le choix de commencer par les interventions des FF sur le passé, avant de raconter les origines des super-héros. En quelques cases, on passe ensuite à l’Égypte antique pour voir comment les FF sont intervenus contre Ram-Tut dans l’Angleterre médiévale avec Merlin.
Le fan est comblé mais le néophyte est volontairement perdu pour aborder l’univers foisonnant créé par Jack Kirby et Stan Lee. Tom Scioli fait le tri dans cette série mythique et le lecteur pénètre dans son monde en découvrant ses cases ou ses pages préférées. Il n’hésite pas à utiliser une seule case pour une aventure mineure puis plusieurs pages pour une autre. Le fan reconnaît des planches mais tout est bouleversé par une mise en page différente. Par tous ces choix, l’auteur propose un rythme différent de lecture. L’auteur bénéficie d’une liberté car le récit devient parfois ironique dans les dialogues. Il laisse aussi des éléments terriblement kitsch. Un choix audacieux de garder Alicia, la compagne de La Chose afro-américaine comme dans le film.
Un dessin proche de Kirby
Tom Scioli adopte un dessin classique à la Jack Kirby mais il ajoute un flou ou un inachèvement délibéré. L’encrage est aussi à peine visible. La troisième partie du livre est très différente car il s’agit d’un épisode mythique de Lee et Kirby – Fantastic Four 51 – mais coloriés par Piskor. Cela modernise le récit et le rapproche du pop art.
Ce grand livre peut perturber par le format et le dessin mais aussi par le contenu. Cependant, c’est aussi passionnant de voir ce qu’un auteur fait du passé : que garde-t-il et que met-il en avant ? Que met-il de côté et de quoi se moque-t-il ?