Découvrez l’auteur Franquin derrière Spirou et Gaston

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André Franquin a marqué la bd franco-belge par ses séries mais aussi des œuvres personnelles. Cependant, ses influences et sa vie sont encore mal connues. En effet, l’ouvrage majeur de Numa Sadoul sur le maître de l’humour était introuvable. Le voici de retour et c’est un évènement.

Franquin, un géant de la bd européenne

Un exemple du talent Franquin

La sortie d’Et Franquin créa la gaffe marque le mise en lumière d’un journaliste et d’un auteur. Ce livre était devenu un mythe inaccessible depuis trente ans alors qu’il est la bible de tous les fans de bd. En effet, André Franquin est connu comme scénariste et dessinateur pour ses albums de référence dans la série Spirou et Fantasio. Il y a fait des ajouts devenus des éléments indiscutables (et très souvent repris) comme le Marsupilami ou Zorglub. Il a aussi créé les albums de Modeste et Pompon puis Gaston Lagaffe. Dans Idées noires, il a eu le génie de mettre de l’humour sur sa dépression.

Et Franquin créa la gaffe rassemble l’ensemble des entretiens réalisés en 1985 entre Franquin et le spécialiste de la bd Numa Sadoul qui rédige également la préface. Après un livre d’entretiens avec Hergé, Sadoul voulait réaliser le même ouvrage sur Franquin mais l’artiste a refusé par timidité pendant dix ans. On le sent très vite et à de multiples reprises quand Franquin refuse d’évoquer certaines de ses œuvres alors qu’il encense ses collègues du journal de Spirou. Le lecteur est amusé en lisant comment le premier entretien s’est effectué par l’entremise de l’épouse de Franquin, Liliane. Au fil des neuf séances, Sadoul a collecté trente-quatre heures de dialogue dont le livre reprend l’ordre chronologique. On sent que les deux hommes ont une réalisation amicale : ils se tutoient, rigolent ensemble et Sadoul n’hésite à donner son avis.

Comme le note sa fille Isabelle dans la préface, ils sont réalisés à un moment particulier de l’artiste : il vient de perdre plusieurs amis, sa santé physique et mentale est fragile, les éditions Dupuis sont vendues mais il va devenir grand-père.

Une carrière aussi diverse que le bureau de Gaston

Le livre est organisé en différents chapitres au départ chronologiques puis sur les séries de Franquin. On débute par une partie biographique de sa naissance à la date des entretiens sur plus du quart de l’ouvrage. Le deuxième chapitre décrypte sur plus de 150 pages l’ensemble des albums que Franquin a réalisé pour la série Spirou et Fantasio. Cette partie très détaillée est si riche que Sadoul conseille d’avoir les livres à portée de main pour bien comprendre les réponses de Franquin. Le dessinateur donne d’ailleurs son avis sur les auteurs qui lui ont succédé.

 Pour autant, Sadoul ne néglige pas les autres pans de sa carrière : le troisième chapitre s’intéresse à la courte série humoristique Modeste et Pompom avant de s’intéresser à l’autre série marquante du maître, Gaston. Ces chapitres sont d’autant plus importants que Franquin avoue avoir toujours eu du mal avec la personnalité du groom et donc se sentait plus libre ailleurs. Le volume se conclut par les œuvres à l’époque méconnues de Franquin comme les pages collective du Trombone illustrée à l’intérieur de la revue Spirou et surtout Idées noires. Sadoul aide Franquin à revenir sur ses travaux et on rentre dans l’intimité du créateur. Le lecteur découvre comment créer un personnage avec l’exemple de Gaston. Pour Franquin, l’uniforme est important et donc les espadrilles et le pull de Gaston. Le lecteur découvre ses références de jeunesse, son évolution stylistique mais aussi les nombreuses contraintes dans la revue Spirou et chez Dupuis. Il le réalise lors de la tentative de moderniser le journal dans les pages du Trombone. En même temps, on comprend comment Franquin a récupéré les droits du Marsupilami.

Une vie privée aussi discrète que celle de Spirou

Et Franquin créa la gaffe n’est cependant pas un ouvrage d’analyse universitaire d’une œuvre mais le regard que porte Franquin sur son travail. Le lecteur perd peut-être en objectivité mais il gagne énormément en richesse humaine. On retrouve à chaque page la modestie de Franquin et on rentre dans l’intimité d’un homme. Sa vie privée est bien entendu présente dans son œuvre. Cependant, la précise première partie donne un éclairage totalement nouveau sur la vie de l’auteur. Sadoul sait parfois insister pour en apprendre plus et nuancer les premières affirmations de Franquin. Le livre montre aussi les incohérence de l’auteur. Enfant, il n’a jamais fait de bande dessinée ou de dessin mais sait très tôt qu’il veut devenir dessinateur. Il ne lisait pas de poésie mais son œuvre l’est.

Un exemple des recherches de Franquin

Pour mettre en avant ces riches échanges, l’éditeur Glénat propose un magnifique écrin. L’ouvrage est très complet et solide permettant d’y revenir régulièrement. En fin de volume, on trouve un index très pratique pour faire des recherches et la bibliographie de Numa Sadoul. Malgré cette richesse, la lecture d’Et Franquin créa la gaffe est très aisée grâce à une iconographie très riche et en grande partie inédite.

Par la réédition d’Et Franquin créa la gaffe, Glénat offre aux nouveaux lecteurs la chance de découvrir un ouvrage riche et très complet sur Franquin. Cette lecture apporte un éclairage neuf sur toute son œuvre et forcément donne envie d’ouvrir à nouveau un Gaston ou un Spirou.

Franquin est bien présent sur le site par ses créations, retrouvez les articles sur Le Marsupilami, Spirou & Fantasio.