Glénat lance depuis la fin août une nouvelle saga historique avec Les Aventuriers du Transvaal.
Un western africain
L’or de Kruggerest est le premier tome d’une nouvelle histoire pensée par Jean-Claude Bartoll (Mortelle Riviera, 9/11) et dessinée par le Slovène Bernard Kollé (Diamants, Antarctica). Ancien grand reporter, le scénariste choisit ici de se lancer dans un récit plus historique. Dès la couverture, le lecteur s’attend à un western. C’est bien le cas au niveau temporel. On se situe à la fin du XIXesiècle mais géographiquement, on est très loin des États-Unis – l’action se situant en Afrique du Sud. Ce cadre différent crée un exotisme : alors que les personnages en stetson parcourent la nature à cheval, on croise des éléphants et des suricates.
Stetsons et revolvers
Comme tout bon western, l’action démarre tout de suite par l’attaque d’un ranch dans le Transvaal, une région du nord de l’Afrique du sud. Des mercenaires capturent les propriétaires, les femmes Van Arpeels. Le lecteur retrouve les lieux communs du western : un monde de violence et d’honneur dans une nature sauvage. L’histoire est centrée sur Pit, un américain et Ortzi, un anarchiste espagnol. Recrutés à Paris par le chef de la résistance des Boers, ils sont venus à la recherche d’un trésor de 300 tonnes de pièces d’or. Au cours du récit, ils rencontrent la fille Van Arpeels et l’amazone Boer qui dirige la résistance Boer dans cette région. L’intrigue se construit progressivement et reprend les codes du western classique.
Un pays dans une guerre coloniale
Historiquement, on découvre également un pan méconnu du passé de cette ancienne colonie anglaise. L’action se passe pendant la guerre des Boers, les émigrants hollandais se révoltent, en particulier au Transvaal, contre la tutelle britannique. La haine entre ces Afrikaans et les Anglais est très bien montrée. Cependant, le Royaume-Uni est le plus vaste empire colonial et on trouve donc aussi dans ce conflit une troupe d’ex-prisonniers australiens qui ont rejoint les rangs de l’armée coloniale pour être libérés plus tôt.
L’auteur profite de ce cadre pour introduire des personnages historiques réels tels que sir Cécil Rhodes, un ancien gouverneur arriviste mais surtout Winston Churchill, futur chef de la résistance anglaise à Hitler, n’est encore qu’un jeune correspondant pour un journal londonien qui veut se lancer en politique. Il est présenté comme une tête brûlée, un aristocrate en soif d’aventure mais inconscient des conséquences de ses actes.
L’auteur se place clairement du côté du Transvaal qui aurait aboli l’esclavage. Cependant, ce sont aussi les Afrikaners qui mettront en place l’apartheid. Bartoll dénonce la violence incontrôlée de la guerre. On voit les premiers camps de concentration créés par l’armée britannique pour couper les résistants Boers de leur soutien dans la population civile. Ce cadre historique complexe n’est jamais présenté au détriment de l’action qui ne cesse pas : la présentation de Churchill est faite lors d’une bagarre puis on se retrouve dans une attaque de train alors qu’on n’est qu’à la page quatorze.
Action et histoire
On a donc deux niveaux de lecture : un récit d’action et la découverte d’un moment-clé de l’histoire de l’Afrique du Sud. On peut cependant regretter que, pour l’instant, la population noire soit peu présente dans le récit mis à part un ouvrier agricole. Ce récit est mis en image par Kollé pour qui Blueberry et donc Moebius ont une influence importante. Certaines pages sont superbes comme l’attaque du ranch au début mais on peut regretter que le dessin soit encore un peu inégal selon la page : l’attaque du train est visuellement bâclée et le visage de la mère Van Arpeels est très masculin.
Les Aventuriers du Transvaal est la première pierre d’un récit d’un western au cadre et au contexte originaux. Ce premier tome ne révolutionne pas le genre mais la suite pourrait être visuellement et scénaristiquement plus perturbante.