Critique « Big Johnson Bone et autres contes oubliés » – Jeff Smith et Tom Sniegoski

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Au départ, perçue comme une série pour enfants, Bone de Jeff Smith est devenu un titre de référence du comics sur plusieurs tomes. La sortie du récit complet Big Johnson Bone et autres contes oubliés pourrait vous propulser dans cet univers enchanteur.

Une soirée entre scouts

Big Johnson Bone et autres contes oubliés est une suite de nouvelles des tailles variables. Cependant, elles sont toutes écrites par Tom Sniegoski et Jeff Smith se chargeant du dessin et se déroulent dans un cadre commun : lors d’un camp Scout, Smiley puis Fone Bone racontent à leurs élèves des histoires au coin du feu. Le point de départ de ces récits oraux est souvent anecdotique – Fone Bone et Phoney Bone partent faire la lessive en forêt – mais la suite se rapproche des contes : une suite de péripéties aboutit à une morale. Le cadre ou le genre des récits appartient aux légendes : une chasse au trésor, une cabane plongée dans la neige, une aventure en forêt… Des éléments sortent de l’ordinaire : un enfant est volé par l’hiver, des animaux parlent (et souvent avec plus d’intelligence qu’un Bone)…

Des éléments propres à la série Bone sont présents : les plus terribles prédateurs sont les rats-garous et l’aliment le plus populaire est le navet. Derrière l’aspect lisse et enfantin, Tom Sniegoski et Jeff Smith délivrent plusieurs message. La vie simple en forêt est bien plus enviable que la recherche du profit. Le travail est une vertu. Le courage est gagnant même s’il stresse votre compagnon chimpanzé. Faire un récit apporte de la force ou galvanise des victimes et donc permet la victoire.

Comme souvent, ces récits naviguent entre témoignage et invention. On peut se questionner sur la véracité de certaines prouesses de Smiley mais le talent de dessinateur de Jeff Smith est indéniable. Son style permet de plonger dans cette série. Les lignes rondes et les décors simplifiés placent ce livre dans la tradition du cartoon tout comme les onomatopées très visibles. Les expressions du rat-garou au milieu d’une dense fourrure sont très habilement exécutées. La mise en page est le plus souvent traditionnelle avec des cases en gaufrier autour d’une gouttière blanche. Par leur tonalité vive, les couleurs sont aussi proches de ce style mais avec une diversité et une réflexion plus poussées pour mettre en avant les éléments important de chaque case. Des pages ont une teinte dominante.

Big Johnson Bone se présente devant les scouts
Big Johnson Bone se présente devant les scouts

Bone ou la réinvention du cartoon

Le lecteur replonge également en enfance par un scénario proche de l’univers de Walt Disney. Comme dans la famille Duck, un adulte maladroit (Smiley) encadre trois enfants débrouillards, les Bone-scout Ringo, Bongo et Todd. L’humour est certes simple mais fonctionne : les scouts sont terrifiés par des sandwichs préparés par Smiley. Des détails saugrenus vous font sourire comme la passion des Bone pour le navet. Une partie sombre est désamorcée par une blague dans un coin de la case : de animaux risquent d’être mangés mais mettent en avant le talent de roter en récitant l’alphabet. Les caractères simples des personnages rappellent aussi les cartoons. Fone Bone est le bon alors que son cousin Phoney Bone est colérique, fainéant et râleur ce qui en fait évidemment le personnage plus drôle. Par appétit financier, Phoney est prêt à l’aventure alors que le doux Fone se plaît dans une vie simple. Certains ont un problème original : un dragon n’arrivant pas à cracher du feu, va perdre son poste de protecteur du peuple de la forêt.

On plonge également dans le passé des Bones, au far-west. Big Johnson Bone, copie de Davy Crockett, est intrépide, fort et excessivement bavard y compris pendant le combat. En racontant ses aventures, ce conteur si doué inquiète ses adversaires. Les personnages de Bone sont souvent des menteurs ou des enjoliveurs de la réalité : Smiley et Big Johnson adorent les longs récits mais l’un des deux endort son auditoire en abusant des détails. Avant de raconter les histoires, Smiley fait référence à des péripéties que je n’ai pas lues mais c’est aussi un moyen de montrer que les pages suivantes seront des récits inédits se déroulant entre les épisodes précédents.

Publié par Delcourt, Big Johnson Bone et autres contes oubliés est un excellent livre proposant des courts récits touchants. De plus le talent du narrateur, les péripéties amusantes et les blagues incitent à lire le reste de la série.

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