Les comics existe depuis maintenant près de 80 ans, comme nous avons déjà pu le voir via de précédent articles, il existe un lien étroit entre comics et histoire. Revenons ensemble aujourd’hui sur la première fonction du super-héros, celle d’une arme de propagande et d’intimidation !
Un média né de la guerre
La guerre a toujours eu une place prédominante dans l’Histoire humaine, elle forge et détruit des civilisations entières, et c’est aussi en période de guerre que l’homme révèle sa vraie nature, tantôt bonne, tantôt mauvaise. Apparus durant la seconde guerre mondiale, les super-héros incarnaient l’espoir et la volonté des alliés de combattre le mal où qu’il soit. Ainsi, la guerre a toujours constitué un terreau fertile pour les auteurs de chez Marvel comics et DC comics.
Des héros qui se font désirer
Après 1945, les Américains sont devenus les héros du monde libre, comme en témoigne la cérémonie qui se déroule chaque année sur les plages de Normandie. Pourtant, à l’aube de la guerre, rien ne laissait présager l’engagement des Américains dans le conflit.
En 1939, la politique américaine se voulait isolationniste, un choix politique qui trouve ses origines en 1823. En effet, lors d’un discours, le président Monroe déclara que le continent américain ne serait désormais plus ouvert à la colonisation et les interventions européennes sur le continent seraient perçues comme des agressions. En contrepartie, les États-Unis s’engageaient à ne plus intervenir dans les affaires du vieux continent.
C’est seulement avec le New Deal de Roosevelt que la situation évoluera, c’est dans ce climat d’espoir que naquirent les super-héros !
Le président fit tout pour aider les alliés dès les prémices de la guerre, mais face à l’opposition du congrès, il fallut attendre 1942 et l’attaque de Pearl Harbor pour que les Etats-Unis s’engagent dans le conflit !
Un symbole d’espoir
Lorsque le premier super-héros apparut, en 1938, il incarnait la confiance en l’avenir qu’a fait naître le New Deal dans le cœur de nombreux américain. C’est pourquoi, Superman, le premier héros du genre, vient d’une planète à la technologie supérieure. Le fait qu’il s’agisse d’un extraterrestre n’est pas non plus anodin : pour Jerry Siegel et Joe Shuster, deux auteurs issus de l’immigration, Superman se devait d’être un étranger cherchant à s’intégrer.
Le dernier fils de Krypton a donc immédiatement incarné, pour de nombreux Américains, l’idée selon laquelle leur pays était en avance sur son temps, sur les plans politique, technologique et social.
Ce héros aux pouvoirs hors du commun a très tôt incarné un futur sans guerre: En 1940, il contraint Hitler et Staline a signé la paix dans le magazine look et ce, en à peine deux pages ! Cette publication attira l’attention des nazis qui dénigrèrent le personnage ainsi que ses créateurs.
Affublé d’une telle publicité, le super-héros à la cape est rapidement devenu le porte-parole du peuple américain face aux fascismes européens et dans une certaine mesure un acteur de la guerre : il soutient le moral des troupes ainsi que celui des familles restées à l’arrière.
Un effort national
Superman n’est pas le seul à participer à la guerre, son apparition ayant entrainé la création d’une multitude de héros, chez DC comics comme chez Timely comics (futur Marvel) !
Ainsi, Wonder Woman décide de combattre aux côtés des Alliés après avoir secouru un pilote américain. L’héroïne au lasso d’or incarnera tout au long du conflit la figure de la femme forte et engagée. Elle contribue ainsi à la victoire en inspirant de nombreuses femmes qui travaillent durement dans le but d’aider les hommes partis au front.
De son côté, l’Atlante Namor, l’équivalent d’Aquaman chez Timely comics, représente davantage la peur de l’engagement ressentie par toute une partie de la population américaine. En effet, le héros ne s’engage pas de prime à bord dans le conflit européen, préférant préserver son peuple de la guerre. Mais quand la cité d’Atlantis est attaquée par un Atlante partisan du régime nazi, celui-ci décide de soutenir les forces alliées.
Nous pourrions citer bien d’autres héros tels que le rapide Whizzer, l’iconique Oncle Sam, qui tient ses pouvoirs du patriotisme américain, ou le combattant britannique Union Jack. L’industrie des comics tout entière a participé à la victoire des États-Unis durant la Seconde Guerre mondiale en devenant une sorte d’organe de propagande, destiné à convaincre et motiver l’ensemble des citoyens américains.
Captain America, un héros patriote
Nombreux sont les héros qui ont marqué la seconde guerre mondiale, Charles De Gaulle, Dwight Eisenhower, Jean Moulin et Captain America ! La bannière étoilé est un héros de fiction et pourtant…
Un soldat, un américain, un patriote
Issu d’un milieu modeste, le jeune Steve Rogers, l’alter ego de Captain America, est né à Brooklyn. Il perd très tôt ses parents et cherche, comme de nombreux jeunes hommes de l’époque, à donner un sens à sa vie. Il souhaite servir son pays et s’engager dans l’armée, mais c’est, hélas, un jeune homme chétif. La suite vous la connaissez, un sérum expérimental militaire fera de lui un super soldat !
Cette histoire témoigne de l’élan patriotique qui traverse alors les États-Unis dans les années 1940. Steve Rogers est un Américain moyen, qui n’hésite pas à donner de sa personne pour protéger son pays et ses habitants. Il devient le symbole de l’Amérique dont il arbore les couleurs. Il incarne la force et la morale dans un monde en quête de repères, et constitue, de fait, une source d’inspiration majeure pour la jeunesse.
Durant la Seconde Guerre mondiale, pas moins de soixante-dix millions d’Américains lisaient des comics et près de 25% des magazines envoyés au front étaient des comics. Ces chiffres témoignent de l’importance du marché du comic book durant les années 1940.
Du comic à la réalité: l’histoire de Vito Bertoldo
Quand on parle de Captain America, il convient d’évoquer l’histoire de Vito Bertoldo, un soldat décoré de la légion d’honneur en janvier 1945.
Patriote et volontaire, Bertoldo passe les tests d’entrée, mais est exempté en raison d’une mauvaise vue, à l’image d’un certain Steve Rogers jugé trop chétif. Toutefois, comme son homologue au costume bariolé, il n’abandonne pas et réussit à entrer dans la 42e division d’infanterie en tant que cuisinier militaire, mais il finira par devoir aller au front lui aussi.
Envoyé à Hatten, dans le Nord-Est de la France, il dut défendre la ville contre les allemands. Tandis que les troupes alliées se repliaient, il décida de rester et de défendre la position pour protéger ses camarades. A lui seul, il vint à bout d’une quarantaine de soldats ennemis armés et accompagnés de chars !
Vito Bertoldo n’a jamais évoqué le rôle déterminant de Captain America dans son engagement, mais, au vu du succès et de la diffusion des comics au sein de la société, il n’est pas improbable qu’il ait été porté par son exemple.
Plus qu’un soldat, un symbole
En 1940, lorsqu’il fit sa première apparition, dans les pages du Captain America n°1, le héros étoilé incarne un besoin de justice. En créant un personnage aux couleurs de l’Amérique, Timely comics prend les devants et fait fictivement entrer les États-Unis dans la guerre, à une époque où les dirigeants du pays demeurent silencieux face au conflit européen.
Malgré tout, la couverture du premier numéro de ses aventures constitue une véritable déclaration de guerre ! Après tout, Steve Rogers donne un coup de poing à Hitler… Suite à ça, le héros connait immédiatement un grand succès. Deux ans après sa création, ses aventures se vendent déjà à plus d’un million d’exemplaires !
Contrairement à d’autres héros Marvel, le Captain ne changea guère au fil des numéros : aujourd’hui encore, il arbore son costume rouge, blanc et bleu, inspiré du drapeau américain.
Néanmoins, Steve Rogers ne fut pas le seul à porter ce costume. D’autres personnages de cet univers ont eu cette chance, comme Bucky Barnes ou Sam Wilson. Captain America est un symbole, une idée et par conséquent, il se doit d’être immortel !
De nos jours, les super-héros sont omniprésents, dans les comics, au cinéma, sur nos télévisions et même dans nos jeux vidéo ! Comme en 1940, ils représentent l’espoir et transmettent des messages, certains, plus clairs que d’autres. Alors la prochaine fois que vous lirez un comic, demandez vous quelle histoire se cache derrière ses héros hauts en couleur, vous pourriez être surpris…