La vie éditoriale de Batman ne connaît pas de pause. Après avoir été rythmée par les runs de Frank Miller, de Grant Morrison, de Scott Snyder ou récemment de James Tynion IV, elle va dorénavant suivre l’inspiration de Chip Zdarsky. Pour inaugurer sa nouvelle ère, ce dernier nous offre le récit Batman the Knight qui lèvre le voile sur une période encore peu abordée dans les comics, celle de la formation de Bruce Wayne
Vengeance ou Justice ?
Pour le docteur Hugo Strange, le jeune Bruce Wayne est un patient passionnant. Face à l’assassinant traumatique de ces parents, le jeune héritier a hérissé un mécanisme de défense psychologique difficile à percer. Mais que cache l’enfant chéri de Gotham ? Ce sont ces réponses que cherchent ce praticien, mais aussi son patient. Car tout est chez lui chaotique. Malgré l’amour d’Alfred, le jeune homme veut plus.
Mais est-ce la Vengeance ou la Justice ? Dans sa quête de réponses, Bruce Wayne forge son corps comme une armée pour traquer les criminels. Mais il découvre vite que pour exceller dans sa future mission, il va devoir franchir la ligne rouge et apprendre auprès des plus grands criminels leurs savoirs secrets. Au risque de perdre son âme peut être ?
Batman the Knight : entre figures classiques et nouveautés
Ce one-shot, superbement mis en image par Carmine di Giandomenico, propose aux lecteurs une synthèse entre des figures habituelles et nouvelles de l’univers de Batman et de celui des comics. En effet, nous retrouvons avec délice la figure inquiétante du docteur Hugo Strange. Créé dès 1940, il est un des rares ennemis à avoir percé le mystère de l’identité de Batman. Dans ce volume apparaissent aussi Ra’s al Ghul et sa fille Talia, ennemis récurrents depuis les années 2000.
A côté de ces figures obligées, Chip Zdarsky introduit toute une galerie de nouveaux venus. En s’inspirant autant de futurs adversaires/alliés du chevalier noir (Catwoman, Deathstroke) que de personnages de chez Marvel (Docteur Strange, Hawkeye), il nous présente une voleuse française, une experte du déguisement russe, un redoutable assassin, un maître de la magie. Chacun nous aide à comprendre comment Batman est parvenu à maîtriser autant de savoirs différents.
Les tribulations d’un jeune milliardaire
Batman the Knight est un formidable voyage autour du monde, de Paris à la Corée du Nord en passant par le désert des Emirats. Comme dans le film Batman Begins, Bruce Wayne s’éloigne de Gotham pour guérir son âme. Ce récit devient initiatique, il confronte le jeune homme à ses peurs, à son impuissance et à ses doutes. Pour devenir l’homme qu’il souhaite, il doit apprendre à penser comme les hommes qu’il veut combattre. Comment vole-ton, pourquoi tue-on, comment devient-on un homme mauvais.
Dans cette quête, Chip Zdarsky introduit un nouvel élément dans la biographie de Batman : Anton. Ce jeune homme, devient l’ami, l’alter ego, « l’amoureux transi », la Némésis de Bruce Wayne. Animé de la même volonté mais peut-être pas de la même morale, il va sans cesse pousser l’enfant de Gotham à se dépasser, à se questionner, à douter. Le comics maintient intelligemment le flou sur les origines d’Anton tout en multipliant les références à des personnages connus comme Silence. De quoi nourrir de nombreuses théories et d’imaginer son retour dans les futures séries Batman.
Batman the Knight : Raccorder les fils de la mythologie
Il est toujours difficile d’arriver à apporter du renouveau à une figure aussi majeure des comics. Pourtant, Chip Zarsky réussit un joli coup de maître en se penchant sur cette période peu traitée : la formation de Bruce Wayne. Ici pas de costume. Bruce Wayne agit à visage découvert comme le jeune homme perdu qu’il est. L’arme qu’il deviendra est encore brute. La lame qu’il brandira au nom de la justice reste peu affutée. L’âme du chevalier ne s’est pas encore libérée des liens de la colère.
Ce Batman the Knight se présente dès lors comme le récit qui comble les derniers vides de la mythologie Batman. Entre son départ de Gotham et son passage parmi la ligue des assassins, il demeure de nombreuses zones d’ombre que ce volume vient dissiper. Pendant son voyage, le jeune Bruce tisse de nouvelles alliances, socle possible pour légitimer l’extension de l’univers Batman (Batman International, Batman Incorporated).
Avec ce titre, Chip Zarsky inaugure idéalement ses débuts sur Batman. S’adressant autant aux connaisseurs qu’aux néophytes, Batman the Knight a tous les atouts d’un récit fondateur d’une mythologie en constante mutation