Artemisia est une bande dessinée écrite par Nathalie Ferlut et dessinée par Tamia Baudouin, publiée aux éditions Delcourt en août 2017.
La biographie d’une femme peintre
L’histoire d’Artemisia est loin d’être fictive. Artemisia Lomi Gentileschi est une artiste peintre italienne qui a vécu au début du 17ème siècle. Née d’un père peintre, Orazio, qui figure parmi les meilleurs représentants de l’école du Caravage, Artemisia a très vite montré un grand talent pour la peinture. Afin de soutenir sa fille et de développer son talent, Orazio a engagé le peintre Agostino Tassi en tant que précepteur privé. Après avoir violé Artemisia ainsi que la promesse de mariage qui s’ensuivit, ce dernier fut traduit par Orazio devant le tribunal. Soumise à la question, Artemisia maintint ses accusations malgré la torture et obtint un semblant de condamnation à l’égard du peintre. Bien des critiques attribuèrent la violence de ses œuvres à cet épisode de sa vie, ce que les auteures s’attachent à déconstruire.
Un bel hommage
Symbole de persévérance, la vie d’Artemisia a fait l’objet de nombreuses adaptations, tant littéraires qu’audiovisuelles. Nathalie Ferlut et Tamia Baudouin ont choisi un angle original, qui rend hommage à la peintre. Vue à travers les yeux d’une de ses deux filles, la vie d’Artemisia est joliment mise en valeur par les auteures. Mettant l’accent sur son indépendance et sa force de caractère, la bande dessinée conte le talent de la peintre à travers son don naturel et son esprit vif plutôt qu’à travers les hommes qui ont marqué sa vie. Son père, qui a développé son talent, son précepteur qui a contribué à sa renommée, son mari qui lui a servi de prête-nom et lavé son honneur ne sont plus mis en avant comme étant le moteur de son oeuvre. La première femme admise à l’académie du dessin regagne ici le mérite qu’on lui ôte parfois. Les auteures signent et persistent : c’est Artemisia qui s’est construite elle-même et non ces hommes qui l’ont modelée.
Un pari réussi
Il est difficile d’illustrer la vie d’une femme peintre aussi talentueuse et aux tableaux d’un réalisme aussi percutant. Pourtant les auteures offrent un ouvrage au style prononcé, au dessin sûr, réaliste et chaleureux. La bande dessinée est construite de façon telle que l’époque dans laquelle se déroule l’histoire est facilement distinguable des souvenirs racontés à la jeune fille d’Artemisia, ce qui donne un aspect plus vivant que s’il s’était agi d’une simple biographie. Le choix de présenter la vie d’Artemisia comme racontée à son enfant permet aux auteures de justifier le ton didactique de l’ouvrage, de transmettre plus aisément les messages qu’elles souhaitent faire passer. Avec une longueur bien dosée, elles parviennent à couvrir une grande partie de la vie de l’artiste, ne laissant de côté aucune étape importante et variant le rythme du récit, suscitant davantage à chaque planche l’intérêt du lecteur.
Bien dessinée et intelligemment construite, la bande dessinée Artemisia est l’ouvrage idéal pour découvrir cette artiste qui a marqué l’histoire tant par ses pinceaux que par sa force de volonté.