Zeal And Ardor est ce groupe original qui a complètement rendu fou le public des Eurockéennes 2018 le dimanche soir peu avant la clôture. On a eu la chance de discuter avec Manuel Gagneu, le chanteur.
On a découvert la musique de Manuel Gagneux un peu par hasard et ce mélange de musique Negro Spiritual et Black Métal nous a complètement laissé sans voix. Une vraie surprise et un gros coup de cœur. A titre personnel, j’écoute Zeal And Ardor depuis la sortie de Devil Is Fine et j’en suis vraiment fan ! C’est intense, c’est brute, c’est sombre mais en même temps il y a ce côté bluesy qu’on adore et ce chant entre mélancolie et espérance propre au Gospel. Une musique riche et prenante dont on ne se lasse pas !
Autant vous dire que c’était un privilège de pouvoir discuter quelques minutes avec Manuel, le chanteur et créateur de Zeal And Ardor, qui, bien que très fatigué, nous en a appris davantage sur sa musique.
Avant tout, on aimerait savoir, comment es-tu arrivés à la musique ?
Manuel Gagneux : Mes parents sont musiciens, donc il y avait des instruments et des claviers à la maison. Même enfant, j’ai pu jouer avec tout ça. Je ne me souviens plus exactement quand, mais j’ai décidé à un moment que je ne voulais faire que de la musique parce que c’est ce qui me rendait heureux quand j’avais… 17 ans peut être. C’est là que j’ai commencé sérieusement à faire du Métal.
Le projet Zeal And Ardor a commencé par une blague sur 4chan. Quelqu’un t’a mis au défi de mélanger du Negro Spiritual et de Black Métal et tu y as pris goût. Pourquoi as-tu choisi d’appeler ton groupe Zeal And Ardor ?
Il y a deux raisons : la première, c’est parce que c’est ma façon d’aborder la musique, c’est à dire sérieusement et avec beaucoup d’effort. Mais aussi parce que c’est mot ont une connotation biblique très forte. C’est assez marrant pour moi de me dire que quelqu’un qui lit la bible va rechercher Zeal dans Google et tomber sur ma musique de merde ! (rires)
Avec les deux styles que tu rapproches, tu passes d’une musique spirituelle à une musique plus occulte. Tu ne crois pas que ton projet est complètement hérétique ?
Oui, mais je pense que les deux, d’une façon étrange, parle d’adoration. Adoration de différentes choses bien entendu, mais il y a toujours un élément spirituel dans ces deux styles. C’est comme une sorte de terrain d’entente, même si ça semble marginal… Pour moi en tout cas je veux dire !
De quelle spiritualité tu te sens le plus proche ?
Aaaah, ça dépend des jours. J’aime énormément ces deux musiques donc c’est dur de choisir ma préférée.
Il y a quelque chose d’étrange dans la construction de tes albums : il y a toujours une intro et il y a des interludes tout du long. A quoi servent-ils ?
Pour moi, ils donnent du contraste. Il était très important qu’on puisse écouter l’intégralité de l’album d’une seule traite. Ce sont comme des amuse-gueules, des entremets pour créer ce contraste. Donc les sons lourd le sont plus encore grâce à ces interludes.
On dirait aussi que tu explore encore d’autres styles… Il y en a un qui ressemble beaucoup à de la Trap Music…
Oui, je m’ennuie rapidement (rires), c’est pour ça que j’aime bien faire plein de trucs différents.
Dans ton premier album tu les appelles Sacrilegium. Il y a une raison ?
Oui ce sont tous des sacrilèges à leur façon. L’un d’entre eux est Aram parce qu’il a une prière occulte à l’intérieur ; une autre est une mélodie qui a un triton. Au moyen age, utiliser cette intervalle musicale était interdit par l’église parce que c’était la musique du Diable. Et la dernière est juste un morceau au synthé sur un album de métal et ça c’est dans tous les cas un sacrilège !
Dans le dernier album, tu utilises des noms d’arcane de tarot. Est-ce qu’il y a un message derrière ?
Il y a deux paires : le fou et l’ermite qui sont deux cartes qui parlent d’aller quelque part, prendre un nouveau départ. C’est le … de l’album. Les deux autres sont Solve et Coagula et ce sont des éléments que l’on retrouve dans le tarot de Marseille : la lame du Diable représente Baphomet ; il a cette pose et il y a ces mots écrit sur ses bras.
A propos de la façon dont tu utilises la musique Negro Spiritual, est-ce que tu utilises des chants déjà existante comme base ou est-ce que tu inventes tes propres chansons ?
Avec le premier album, j’ai fait beaucoup de recherches, j’ai écouté de vieux enregistrements et j’imitais beaucoup. Mais avec le second j’ai arrêté cette méthode parce que ça sonnait trop identique, ça ressemblait trop à une copie ; c’était un peu trop. J’ai donc décidé de créer mes propres négro spiritual.
Cette année, tu as été au Hellfest, au Festival de Jazz de Montreux…
Et je reviens tout juste de Slovaquie. On a dormi que 2h c’est pour ça que je suis un peu défoncé (rires)
Comment s’est passé le Hellfest ? C’est une véritable institution pour les fan de Métal en France.
Oui ! Le Hellfest c’était énorme. On a fait un super concert mais surtout j’ai pu croiser mes idoles. C’était un sacré trip.
Lesquels par exemple ?
Oranssi Pazuzu… Dead Cross qui joue aussi aujourd’hui.
Et vous avez réussi à trouver votre public à Montreux ?
Oui définitivement ! C’était une soirée spécial parce qu’il y avait les Igorr qui jouaient avant nous et après nous il y avait Gojira. On a eu quelques soucis techniques et on a pu jouer que la moitié de notre set ; un truc est mort dans notre matériel et c’était vraiment dommage. Pas vraiment notre meilleur concert ! Mais on essaye de gérer malgré tout.
On espère que vous allez gérer ce soir parce qu’on vous attend avec impatience ! (rires)
Du coup, à propos de ce soir, à quoi peut-on s’attendre ?
C’est assez intense ! On est 6 sur scène, donc il y a beaucoup d’énergie. C’est aussi les derniers concerts de notre courte tournée des festivals. Aussi on va tenter de donner tout ce qu’on a et ça risque d’être complètement dingue.
Même si tu es fatigué…
Je vais boire beaucoup de café avant le concert
Comme tu le disais tout à l’heure, tu peux t’ennuyer facilement sur un projet, mais on en est déjà au deuxième album avec Zeal And Ardor. Est-ce qu’on peut espérer encore un troisième opus ou tu es déjà en train de penser à quelque chose d’autre ?
On verra. Si je peux trouver suffisamment de matériel sonore pour continuer, bien sûr. Mais si je dois me forcer, je pense que ça ne sera pas de la bonne musique alors ça n’en vaudra pas la peine. Le temps le dira !
J’ai vu que vous avez une date à Paris à la fin de l’année ?
Oui à la Cigale, c’est une très belle salle et ça va être vraiment chouette. On est déjà venu jouer à Paris en 2017 au… (hésitation) Je ne me souviens plus du nom de la salle… Le BLABLABLA et c’était génial ! (rires) (NDLR : il s’agit du Glazart). Je ne sais pas trop pourquoi mais on a vraiment plein de fan à Paris et ça serait dommage qu’on aille pas rejouer là-bas !
A la fin de l’interview, Manuel s’excuse de ne pas être à 100% pour répondre au mieux à nos questions, mais on salue déjà l’effort et la gentillesse, malgré la fatigue. On ira les écouter plus tard dans la soirée et on sera littéralement scotché par leur performance scénique puissante et leur capacité à embarquer un public qui ne les connait pas, les découvre et adhère complètement à leur style novateur.
RDV en décembre à Paris donc !
Retrouvez le concert de Zeal And Ardor aux Eurockéennes 2018