Dream Wife étaient aux Eurockéennes 2018 pour un concert rock puissant et délirant. On a eu la chance de papoter avec ces filles qui n’ont pas peur des mots !
Il faisait encore beau lorsque nous avons rejoins les Rakel, Alice et Bella de Dream Wife dans l’espace presse pour échanger sur la façon dont le groupe s’est créé et dont elles conçoivent leur musique. Pleines de peps, drôles et ultra détendues, c’est un super moment entre fille que nous avons partagé.
Rencontre avec Rakel, Alice et Bella de Dream Wife !
Vous vous êtes rencontrées en école d’art à Brighton. Vous avez décidé de faire une sorte de happening dans une galerie en créant une parodie de groupe à la Spinal Tap. Comment êtes vous passé de cette performance à la création d’un groupe Girl Power ?
Rakel : Le happening n’a eu lieu qu’une fois…
Alice : Mais il continue d’avoir lieu.
Rakel : D’ailleurs il va encore avoir lieu ici dans quelques heures…
(Rires)
Rakel : Non, il n’a eu lieu qu’une fois. C’était notre premier show dans une galerie de notre université. On avait seulement deux chansons dont une qui était vraiment finie. Et c’était tellement fun qu’on s’est dit : « Mince faut qu’on remette ça« . Alors on a fait plus de concerts… Des sortes de concert DIY avec deux, puis 4 titres, et on a finit par en écrire plus parce qu’on continuait de se produire et que ça marchait. Alors on s’est dit : « Pourquoi ne pas monter un groupe finalement ?« .
Quand vous avez commencé à écrire, aviez-vous dans l’idée de devenir un groupe Girl Power?
Rakel : On est des filles !
Bella : On est puissantes !
Rakel : Et on joue du rock… C’était inévitable !
Alice : C’est parce qu’on est 3 femmes qui font ce type de musique qu’on a été amené à nous développer dans ce sens. On peut pas vraiment analyser ce qui s’est passé à ce moment là. Je pense qu’on s’est juste comprises toutes les trois en faisant de la musique ensemble. Donc oui, ça semble plus évident avec nos chansons et maintenant que notre album est sorti. Mais pour être franche ça s’est fait tout seul ; tu vois ce que c’est peut-être, et tu le respect plus parce que tu le comprends.
Rakel : Je pense que pour tout style de musique, c’est capital ce qui se passe dans ta vie à l’instant où tu crées. Tout va dépendre du type de conversations que tu as avec tes amis, ou avec toi même… musicalement peut être plus que textuellement. C’est peut être juste ce que tu explores à ce moment… le groupe sur lequel tu es à fond, sans que tu le saches. Il y a un peu de tout ça qui entre dans l’écriture des textes. Nous on s’assit pas et on se dit : « Aujourd’hui on va écrire une chanson sur tel ou tel thème » ; ça arrive naturellement ! Et c’est la musique que j’aime, celle qui n’est pas trop planifiée. Mais, après coup, tu regardes ce que tu as fait et tu te dis : « Oh ! Wahou… OK ! » Tu comprends après ce que ça veut dire. Tu le réalises au moment du mixage.
Alice : En regardant en arrière, c’est au moment où tu écoutes ta musique, mais pas au moment où tu la joues. C’est au moment où tu l’analyses en studio et tu te concentres sur certains aspect. Non, mais sinon on reste dans le flow !
Vous commencez par la musique ou les paroles ?
Alice : ça va de paire ! Peut être que certaines choses peuvent être écrites, comme on s’y attend, en dehors de la partition, à part. Mais en temps normal ça arrive ensemble. C’est plutôt une question de combinaison qui passe par les instruments qu’on joue. Tu peux pas séparer les forces qui vont ensemble pour créer toutes ces choses et je pense que c’est ça qui rend spéciale la musique qu’on fait toutes les 3.
Rakel : Les instruments vont avec la personnalité de chacunes. (rires) Mais ça, c’est le son d’un bon groupe. C’est pour ça qu’on est un super groupe !
Alice : Oui, il y a une alchimie entre nous !
Rakel : Il y a des groupes qui sont comme dégoûtés, parce qu’ils n’ont pas choisis le bon instrument… Ils pensent : « Oh j’aurais du être le lead guitare » ou « J’aurais du être le chanteur« … J’ai été dans un groupe comme ça où j’aurais du être la chanteuse. Donc quand tu es dans un rôle qui est juste fait pour toi, et que tout le monde est content de sa place, alors tu fais de ton mieux !
Bella : Tout est une question de faire confiance aux autres aussi.
Rakel : Se faire des retours, plutôt que d’en avoir peur ! Et plus que de se faire des retours, être ouvert à l’opinion des autres.
Alice : C’est ça la confiance. C’est ça être 3 amies qui font de la musique ensemble. Tu n’as pas à penser trop parce qu’il y a cette alchimie.
Rakel : Ou tu n’as pas à être trop timide. Par exemple si tu es un chanteur qui travaille avec un gros producteur, et que tu sens que tu n’as pas ton mot à dire… Il faut sentir l’équilibre dans lequel tu pourras agir en toute sécurité et ce, peu importe à quoi tu contribues ; tout ce que tu sors sera toujours entendu. Il est important que chacun soit heureux plutôt que dans une lutte de pouvoir.
Vous êtes considéré comme un groupe féministe..
Rakel : Nous le sommes !!
Comment définiriez vous le féminisme aujourd’hui ?
Rakel : On est un groupe féministe parce que nous sommes des femmes.
Alice : C’est compliqué parce que c’est comme séparer le fait qu’on est 3 nanas qui jouent dans un groupe et le fait qu’on soit un groupe.
Bella : Féminisme, c’est le fait que les femmes méritent les mêmes droits que les hommes, et si un groupe n’est pas féministe … alors on l’emmerde ! Nous, on doit le crier plus fort parce qu’on est des femmes et on se doit de soutenir toutes les autres femmes. C’est pas rendre les femmes meilleures, les mettre au-dessus et leur donner plus de droit.
Rakel : C’est juste une question d’égalité ! Si un groupe n’est pas féministe, il y a quelque chose qui ne va pas chez eux… Ils sont même flippant ! J’aimerai pas être dans la même salle qu’eux !
Vous avez des retours de vos fans masculins ?
Rakel : Les hommes nous soutiennent autant que notre public féminin. On a des fans magnifiques, gentils et très présents.
Alice : Oui je vois où tu veux en venir. Je crois que si les gens soutiennent autant ton message, c’est super, parce que ça veut dire que les hommes se sentent aussi concerné par nos paroles. On embarque tout le monde avec nous !
Bella : On est contre le fait de séparer les genres et ce qu’on fait, ce n’est pas que pour les femmes. Avoir des hommes à notre concert, c’est super excitant ! Il arrive pendant nos concerts que les filles viennent devant et les mecs de mettent un peu en retrait pour leur faire de la place et c’est un super moment. On est là pour s’éclater et ensemble c’est mieux !
Rakel : Je pense que c’est aussi un super truc de pouvoir parler de certains problèmes comme les agressions sexuelles… et faire en sorte que tout le monde y réfléchisse. Comme ça, la prochaine fois qu’ils iront à un concert, ils y penseront aussi. Les hommes et les femmes, ça devrait être une discussion ouverte. Les gens se sentent plus en sécurité après… Même les hommes ! Les gens se comportent plus comme des enfants, c’est bien !
Alice : Si les gens pouvaient juste se tenir côte à côte et se respecter, tous les shows seraient fun. Tout le monde s’entend et tout le monde est sur la même longueur d’onde avec ce message et c’est génial ; ça ne devrait pas être un truc de ségrégation. C’est une question d’égalité au final !
Rakel : C’est juste bon de le reconnaître ! On est tous là ensemble et tu es venu à un concert pour t’éclater et on va passer un super moment et on va tous se respecter et c’est comme ça que chacun rentre chez soi heureux !
Est-ce que vous avez des femmes qui vous inspirent ?
Bella : Oh oui plein !
Rakel : Sophie Calle, l’artiste française
Belle : Tellement plein
Alice : C’est dur de répondre, parce qu’on va parler des femmes avec lesquelles on a grandit et il y a beaucoup de femmes auxquelles on a fait attention parce qu’elles étaient dans une musique plus agressive : le rock, le punk… C’est toujours une question de respect à une période différente et grandir avec ces modèles de guerre féminins… A l’époque il n’y en avait pas tellement et dès qu’on en découvrait une on s’y attachait… Kate and Anna, Debbie Harry, Pathy Smith, Madonna. Trop peu finalement sur différentes époques. Aujourd’hui, c’est plus normalisé de voir de femmes faire du rock et faire de la musique sans qu’on ait l’impression que c’est jouer la provocation. C’est dur de jouer de la musique à toutes les époques sans être l’otage d’un préjugé.
Rakel : Comme : « Oh mon dieu il y a une femme guitariste… oh mon dieu il y a une femme batteuse« .
Alice : … ça ne devrait pas être fétichisée, ça devrait être normal !
Rakel : Nous on a un peu grandit avec ça : les femmes était fétichisées, elle ne jouaient pas dans un groupe, elles ne jouaient pas d’un instrument, elles ne chantaient pas. C’est intéressant de vivre à une époque où nous somme à l’étape suivante et d’avoir grandit dans une décennie où on a pas vue une femme jouer de la guitare ou si peu, comparé aux hommes.
Vous pensez qu’aux Eurockéennes les femmes sont suffisamment représentées ?
Rakel : J’ai pas regardé toute la programmation mais je pense que c’est pas mal…
Bella : J’ai vu qu’il y a Texas…
Alice : Il y a nos potes de Our Girl qui jouent demain ; ils viennent de Brighton comme nous. On a pas eu le temps de regarder le programme à fond et on ne reste pas longtemps. Mais va voir Our Girl si tu peux, ils sont cools !
Retrouver le récit des Dream Wife aux Eurockéennes
Elle s’en souviendront de leur passage sur la Loggia. C’est sous une pluie torrentielle que les filles de Dream Wife ont joué le jeudi aux Eurockéennes. Mais rien ne les aurait empêchée de s’éclater sur scène et diffuser leur message. Et le public était présent et les a suivi jusqu’au bout, reprenant en chœur : I’m not my body, I’m somebody ! C’était un excellent moment de ferveur et de communion dont on se souviendra nous aussi !
Photo : Robert Gil