Le succès éditorial du manga My Hero Academia de Kohei Horikoshi ne se dément pas volume après volume. C’est très naturellement que son éditeur japonais a décidé d’adapter l’œuvre pour la télévision en engageant le studio Bones (Space Dandy, Fullmetal alchimist…). Nouvelle réussite qui conduit l’éditeur à viser cette fois-ci le grand écran en confiant toujours au studio Bones la réalisation d’un long métrage. Malgré les contraintes de l’exercice, le film se révèle un spectacle de grande qualité, enrichi de références savamment distillées, qui plaira aux fans de la série mais saura aussi séduire les néophytes.
My Hero Academia : two heroes. Pas de vacances pour les héros
Dans le monde de My heHro Academia , 80 % des humains possèdent des alters qui leur confèrent des super pouvoirs. Un nouveau type de criminel se répand alors, les super vilains dotés de capacités hors normes. Pour les contrer, des super-héros arpentent les rues. Et des écoles se sont ouvertes afin de former les jeunes au métier de protecteurs. Izuku fait partie des 20 % d’humains sans capacités. Jusqu’au jour où All Might, son idole, reconnue comme le plus puissant des héros le choisit pour être son successeur. Il lui transmet le One for All, son alter. Izuku intègre ainsi la prestigieuse école de super-héros Yuei et se consacre tout entier à son rêve : être digne de son modèle.
Après leurs examens de fin d’année, les élèves de Yuei accompagnés d’All Might se rendent pour souffler sur I-Island. L’île paradisiaque abrite les labos de recherche plus avancés sur l’étude des pouvoirs héroïques et accueille chaque année une grande exposition sur les nouvelles technologies au service des héros. La bande de Yuei compte bien profiter du cadre pour goûter des vacances méritées et découvrir les prototypes les plus modernes. Mais une bande de criminels attaque et prend en otage des scientifiques. Parmi ceux-ci, David Shield, brillant cerveau et ami d’All Might. Les apprentis héros décident d’agir.
All Might Confidential
Le scénario de My Hero Academia : two heroes constitue une des premières surprises de ce fil. En effet, cette aventure se situe entre les saisons 2 et 3 de l’anime et a été spécialement écrit pour le film. La difficulté du projet consiste à trouver un juste équilibre entre plaire aux fans et être accessible à des non connaisseurs. Il le trouve par une astuce narrative : raconter deux histoires. La première s’intéresse à l’attaque de l’île et à l’interposition de All Might et des héros. Si ce qui est raconté est parfois prévisible, tout s’enchaîne avec fluidité et est compréhensible par les non spécialistes de la série. D’autant plus que le choix de centrer le début du film de l’histoire sur All Might clarifie les enjeux. Tout l’univers se découvre à partir de lui : sa relation avec Izuku, le fonctionnement des Alters. Le film peut se voir dès lors comme une histoire « hors série » indépendante de la série et est accessible pour un plus large public.
La seconde histoire, en direction des fans, se centre sur le passé d’All might et sur sa jeunesse hors du Japon. Une très belle séquence d’introduction présente sa relation avec David Shield. Lequel devient un autre fil conducteur de l’intrigue. Le film va dès lors répondre à des questions auxquelles l’œuvre papier n’a pas encore répondu. Pourquoi All Might ressemble-t-il à un héros pulp des comics, symbiose entre Superman et Captain America ? Pourquoi ce style très américain ? Comment a-t-il commencé sa carrière ? Cette seconde histoire s’imbrique idéalement à la première permettant de fédérer les deux publics visés.
My Hero Academia Two Heroes. Un modèle de Fan service
Adaptation oblige, ce long métrage ne peut pas faire l’économie de multiples références à la série/anime. Or, la gestion de ce fan service constitue une autre qualité de l’œuvre. En effet, s’il passe si bien, c’est grâce à la très bonne introduction des élèves de Yuei. En moins d’1 h 45, les scénaristes ont su rappeler leur caractère, leurs ambitions, leur fragilité sans ralentir la narration. On retrouve avec plaisir le sale caractère de Katsuki toujours aussi attachant ; la noblesse de Izuku.
Ce fan service s’appuie aussi sur un humour omniprésent et très bien dosé. Minoru (l’obsédé sexuel qui n’a rien à envie à Ryo Saeba) est à nouveau très drôle et chacune de ses scènes est à hurler de rire. Les punchlines, notamment celles de Katsuki font mouche à tous les coups. Chaque membre de l’équipe a droit à son moment d’humour y compris ceux qui sont laissés au second plan et qui ne captent pas grand-chose à l’affaire (la référence au « Uno »). Ceci contribue à la très bonne caractérisation des protagonistes.
Cette parfaite gestion des références se voit enfin dans la mise en scène des scènes de combat. My Hero Academia : two heroes n’est en effet pas avare en combats épiques que ce soit ceux du jeune All Might ou des jeunes recrues face aux preneurs d’otages. Les adversaires sont coriaces, leur pouvoir redoutable et visuellement impressionnant. Ce qui conduit chaque héros tout au long de leur périple à faire la démonstration de son pouvoir. Et si Izuku est le plus servi, ses compagnons ont tous leurs moments de gloire. Tous sont justifiés par le scénario qui insiste sur la complémentarité naissante entre les élèves.
Le studio Bones : un gage de qualité
La dernière qualité de My Hero Academia : two heroes vient du travail d’orfèvre réalisé par le studio Bones. Nous ne sommes plus surpris de l’excellence de ses productions (voir la critique de la série SK 8 the infinity). L’animation est superbe, le chara design magnifique (notamment celui de l’antagoniste finale). Dans la pure tradition du studio, l’image éclate de mille couleurs, les décors sont très riches. Les animateurs exploitent d’ailleurs à merveille tout l’imaginaire du manga. Le rythme demeure très bon, exploite parfaitement les 1 h 45 pour nous raconter beaucoup d’intrigues sans nous noyer sous les informations. Visuellement et narrativement, le film reste extrêmement maîtrisé.
Et cerise sur le gâteau, le studio offre dans cet exercice de style codifié des clins d’œil aux grandes œuvres S.F de l’animation japonaise. En effet, l’attaque de l’arche dans Patlabor I de Mamoru Oshii a clairement inspiré la mise en scène de l’infiltration de la tour. De même, le combat final évoque aussi la transformation de Tetsuo dans Akira de Katsuhiro Otomo De beaux hommages distillés avec beaucoup d’élégance qui rappellent le poids immense de M. Oshii et K. Otomo dans l’animation japonaise.
Le studio Bones réussit donc pleinement le passage au long métrage. L’excellent technique s’appuie sur une bonne histoire capable de fédérer les connaisseurs et les néophytes.