Peu à peu, les films présentés à Cannes sortent dans nos salles et nous découvrons à notre tour les oeuvres qui ont marqué le festival. Cette semaine, c’est le film de David Robert Mitchell Under the Silver Lake que nous pouvons découvrir sur grand écran. Un film à l’aspect de puzzle désorganisé mais qui mérite toute notre attention.
Il est parfois difficile de comprendre les films de la Croisette. Des films d’auteurs qui ne touchent pas toujours le public, qui ne sont pas assez distribués ou qui simplement ne plaisent pas. Il est vrai que le festival de Cannes est un festival qui laisse peu de place au cinéma dit « grand-public », aux grands blockbusters (Solo : A Star Wars Story faisant exception cette année). Or, bien que nous soyons en été et que ce genre de films soit omniprésent, nous avons aujourd’hui décidé de nous tourner vers un film qui a marqué Cannes bien qu’il en soit reparti bredouille (et ce malgré ces 6 nominations).
Under The Silver Lake est un film de David Robert Mitchell, auparavant remarqué pour It Follows. Le film raconte l’histoire de Sam, interprété par Andrew Garfield, un trentenaire sans réel travail (mais avec de sérieux problèmes de loyer) ni ambition, qui passe la plupart de ses journées à ne rien faire dans son appartement de Los Angeles. Mis à part fumer cigarette sur cigarette, il aime aussi espionner ses voisines dont la jeune Sarah, jouée par Kiley Keough, dont il semble fou amoureux. Mais, subitement, Sarah disparaît et Sam va arpenter tout Los Angeles pour la retrouver. Bien que sur le fond, ce film semble classique, il s’agit d’un film les plus ambitieux qui soient sur la forme, avec une narration léchée qui surprendra le spectateur au risque peut-être de le perdre par moment.
Le voyage au cœur du mystère
Il est évident que nous avons devant nous un film d’une rare qualité avec une ambition certaine de la part de son réalisateur. Mais il est important de mettre le doigt sur un point : Under The Silver Lake est un film complexe qui va vous balader. A l’image de Sam, on arpente les rues et les soirées de Los Angeles en découvrant à chaque scène un nouvel aspect de la ville. Car oui, la quête de Sam pour retrouver Sarah est un véritable voyage dans la ville. Une ville que l’on a peut-être déjà trop vu mais que l’on découvre cette fois-ci avec passion, tant les univers décrits sont nouveaux et originaux.
Sam, pour retrouver la fille qu’il aime, suit sa trace de soirée en soirée en rencontrant des personnages toujours plus loufoques. Entre Jésus et son groupe de rock quelque peu étrange, le roi des SDF ou encore une ancienne star du cinéma devenue escort-girl, le film nous fait aussi voyager par ses personnages et ses ambiances insolites. On les découvre peu à peu tout comme la ville de Los Angeles qui est sublimée par les lumières utilisées pour le film. Cette lumière utilisée intelligemment met parfaitement en valeur les émotions des personnages tout comme les différents décors. Beaucoup de couleurs qui permettent de donner une nouvelle vision de la ville, un peu comme avait pu le faire La La Land .
Une quête au bout de l’imaginaire
On découvre dans Under The Silver Lake une quête incroyable qui nous fait voyager, qui nous effraie par moment mais qui surtout nous fait rêver. Avec des décors fous qui s’enchaînent les uns à la suite des autres mais aussi avec une quête qui ne semble jamais finir. A la manière d’Alice au pays des Merveilles, Sam est plongé dans un univers qui semble lui échapper mais qui, dans sa démence, finit par prendre un sens. La recherche de Sarah se transforme peu à peu dans une recherche de vérité sur plusieurs aspects. Une vérité sur le sens de la mort, de l’amour et même de la pop-culture qui nous entoure avec l’apparition d’un vieux compositeur qui remet tout en question. Under The Silver Lake, bien que très complexe, est une véritable mine d’informations et de messages qu’il faut voir mais surtout revoir.
Il est possible que vous soyez perdus dans ce puzzle qu’est Under the Silver Lake mais ce qui est certain, c’est que ce film vous laissera quelque chose d’unique. De par son scénario évidemment mais aussi par sa réalisation et ses acteurs. Andrew Garfield porte le film et resplendit dans ce rôle qui ne fait que confirmer son talent d’acteur. Les seconds rôles sont certes moins visibles mais tout aussi bons. On découvre des personnages hauts en couleurs auxquels on croit, malgré cet univers si étrange. Mention toute particulière au vieux compositeur, certainement l’un des personnages les plus complexes mais aussi l’un des plus intéressants ! Quant à la réalisation de David Robert Mitchell, elle est tout simplement réussie. Il met en scène des plans intelligents, certes parfois un peu académiques, mais terriblement efficaces. On notera la parfaite utilisation de travellings qui permettent non seulement de se balader dans l’univers fantaisiste propre au film mais aussi de mettre en valeur la ville de Los Angeles.
Il est impossible de parler de tous les aspects du film tant il est complet et vaste. Le risque de vous spoiler est présent et Under The Silver Lake est avant tout un film qui se découvre, qui se vit pleinement. Il faut être parfaitement investi dedans au risque de passer à côté de l’intrigue. C’est un film qui vous fait sortir de votre zone de confort, de votre compréhension du monde mais ce sont parfois ces films si étranges qui nous font ensuite redécouvrir le monde. Alors courez voir Under The Silver Lake, c’est une expérience qui vous bousculera mais que vous n’oublierez pas de si tôt.