Portrait : Philippine, pas de langue de bois sous le soleil

Interview de Philippine à l'occasion de la sortie de son single Hypocrite

0
3250
Photo by Emma Birski / Instagram : @emmabirski

C’est sur le tournage du clip de son single Hypocrite que nous avons rencontré Philippine. Solaire et pleine d’humour, on sent tout de suite une sincérité frappante qui se dégage d’elle. C’est ce qu’elle veut faire comprendre dans son single, dans son EP à venir prochainement, qu’elle a mûri et qu’il est temps pour elle de s’exprimer comme elle l’entend. Elle nous a raconté son parcours qui l’a mené de sa plus tendre enfance à la jeune femme assurée qu’elle est aujourd’hui.

FE29 Portrait : Philippine, pas de langue de bois sous le soleil
Photo by Nestie / Instagram : @nestie.portfolio

« Je m’appelle Philippine, j’ai 25 ans, je fais de la musique depuis que j’ai 4 ans, c’est un peu une évidence pour moi et là j’ai trop hâte parce que je reviens avec un projet qui me ressemble beaucoup plus qu’avant ; avec une mentalité plus affirmée. Pour le coup je suis vraiment une jeune femme maintenant et je viens avec quelque chose de plus affirmé. J’aime le surf, j’aime la vie… (rire) J’aime le sport, la bouffe, j’aime l’humour, j’aime rire. »

Une enfance multiculturelle

J’ai commencé le piano quand j’avais 4 ans quand je vivais au Canada, parce que j’ai vécu 5 ans au Canada. Je le mentionne, c’est assez important parce que les mentalités françaises et canadiennes sont différentes et je crois que j’ai gardé un peu cette mentalité anglo-saxonne. Je suis assez contente d’avoir cette ouverture d’esprit que j’adorais au Canada et je m’en souviens très bien, je la chéris un peu parce que je trouve ça important. Je suis aussi contente de l’avoir gardée dans le milieu de la musique parce que c’est pas toujours facile, et ça on va en parler parce que c’est vraiment mon projet, surtout par rapport à mon single Hypocrite. Je suis assez heureuse d’avoir été bien élevée et d’avoir une famille qui m’entoure. Mes parents, mon frère, ma sœur et moi on est proches et on est très dans cette mentalité là de « y’a de la place pour tout le monde », on est tous dans la joie et dans la bonne humeur.

Découverte de la chanson

Quand je suis rentrée du Canada à mes 8 ans, j’ai commencé à faire des cours de solfège et puis c’est à partir de là que j’ai découvert ma passion pour le chant. Ensuite j’ai intégré la Maîtrise de la Loire. C’était un programme où le matin j’avais des cours normaux et l’après-midi j’allais à la Maîtrise où je chantais beaucoup de classiques, du baroque, j’allais à des opéras de Saint-Etienne ; et je chantais sur scène genre Carmen, j’avais une culture musicale très très classique. Je faisais du clavecin aussi c’était assez cool. Et en fait à un moment je voulais vraiment être au devant de la scène. Je chantais très classique et j’aimais beaucoup, pour moi la musique classique et la pop c’est une éducation vraiment différente, et quand j’ai découvert que je pouvais écrire des chansons, que je pouvais faire du jazz, que je pouvais faire ce que je voulais… Le classique c’est tellement rigoureux et je croyais que la musique c’était ça. Je me suis dit « wow, je peux faire ce que je veux, je peux toucher cette note-là et chanter par-dessus. » A 12 ans j’ai fait ma première compo et depuis j’ai jamais arrêté. Depuis j’ai un peu lâché le classique, je suis restée dans la pop.

FE22 Portrait : Philippine, pas de langue de bois sous le soleil
Photo by Nestie / Instagram : @nestie.portfolio

Rêves de star

J’ai passé mon bac un peu comme une roue de secours, je savais que je voulais faire de la musique mon métier. Je suis partie à Nancy à la MAI (Music Academy International) et j’ai adoré. En fait c’était la pire et la meilleure année de ma vie. Moi j’avais vraiment ce truc de « ouais je vais monter sur scène, je vais devenir une star » bla-bla-bla… Mais attention j’aime pas trop ce mot star, j’ai l’impression que pour les gens c’est la personne qui est dans sa limousine et qui gagne beaucoup sa vie alors que… Star dans le sens où je voulais être sur scène et partager ma passion aux autres, et des textes, et quelque chose de poignant. J’avais des choses à dire et ça revient beaucoup à mon projet de maintenant. La MAI c’était super mais ils nous prévenaient. Ils nous disaient qu’on allait pas finir sous les projecteurs du jour au lendemain, qu’il faut passer par plusieurs processus… Ils commençaient à nous parler d’être prof de chant et moi je paniquais mais c’est vrai qu’il faut gagner sa vie dans la musique… J’ai eu mon premier groupe à ce moment-là, les profs étaient vachement encouragés, motivés par rapport à mon projet vu que je composais depuis longtemps.

J’ai fait The Voice en 2018, ils ne se sont pas retournés. En fait, qu’ils se soient pas retournés là aussi pire et meilleure expérience de ma vie. Les chanteurs ont tellement l’impression que The Voice c’est la voie de tout, le chemin, qu’il faut faire ça pour réussir… C’est une visibilité indéniable. J’ai été sous les projecteurs, j’étais aux anges et en fait quand ils se sont pas retournés j’ai eu une retombée de malade et je me suis dit « ok, bah en fait je fais quoi ? » On m’a tellement rabâché que c’était le truc qu’il fallait faire que quand ils se sont pas retournés je me suis dit « ah d’accord, vu que c’était le truc à faire là je fais quoi ? »

Début de carrière

J’ai failli arrêter la musique mais je suis allée à Paris pour être proche de la musique quand même tout en reprenant mes études. Et là je gagne un concours NRJ Talent, qui m’a ouvert des portes parce que Slimane c’était le parrain et y’avait Michaël Miro aussi qui est son manager. A partir de là il m’a écrit une chanson, j’ai fait un duo avec Gavin James, Slimane a écrit une chanson sur ma maman. J’ai fait Destination Eurovison avec une de mes compos, et ça j’étais assez fière. J’ai adoré parce qu’on était en plein Covid, y’avait pas beaucoup de visibilité pour les artistes et quand on m’a proposé de faire ça j’étais heureuse. J’étais en pleine peine de cœur et j’étais vraiment vener quand j’ai écrit cette chanson, j’étais en mode « yes, je suis énervée et en plus y’a tout le monde qui va l’écouter. » J’étais trop trop contente.

FE25 Portrait : Philippine, pas de langue de bois sous le soleil
Photo by Nestie / Instagram : @nestie.portfolio

Questionnements

J’avais pas de manager à l’époque et maintenant j’en ai. C’est cool parce que y’a eu un renouvellement dans mes équipes et c’est bien par rapport à ce nouveau projet. Je suis pas inconnue mais je suis pas connue non plus et là je reviens avec un projet où je m’assume à 100% parce qu’avant je m’assumais pas forcément. On m’envoyait des titres, des textes, j’étais la petite qui avait cartonné avec son duo du coup on m’envoyait plein de morceaux. Et je savais écrire, je suis une auteure, c’est juste que c’est difficile dans le milieu de s’imposer, j’ai envie de dire quand t’es une femme aussi. J’avais 19 ans, et du coup quand t’es une fille qui arrive à 19 ans – et j’ai un caractère un peu de fonceuse, enfin quand j’ai des choses à dire j’ai envie de le dire – et c’est compliqué de t’imposer et ça l’a été a été jusqu’à maintenant. J’ai des gens qui sont avec moi depuis des années et je les adore mais je pense qu’il fallait un renouveau parce que y’a eu du renouveau chez moi.

Nouvelles envies

Suite à mon single Hypocrite, un EP va sortir. Je me suis mise à la MAO (musique assistée par ordinateur) alors qu’avant je travaillais seulement avec des producteurs. Je me suis dit que j’étais capable de le faire. Quand j’étais en studio j’entendais tout, j’avais l’impression d’être folle et j’avais du mal à exprimer ce que je voulais avec les termes. J’ai passé des semaines à écouter plein de sons, je voulais trouver ce qui me faisait vibrer. Oui avant on me faisait écouter des sons qui me faisaient vibrer mais je savais pas qui j’étais. J’ai vécu des choses dont je parle dans l’EP. Pas dans les détails mais on comprend que je suis énervée, que j’ai eu de la peine. Je me suis dit que oui dans la musique y’avait les paroles qui transmettaient des émotions mais l’instrumental aussi. Avant c’était au piano et à un moment donné fallait aussi que je transmette un message à travers la MAO, avec une batterie que t’écoutes en te disant « ouais, ok, là je me sens fraîche » ou « ouais je suis énervée et là ça va me faire du bien de danser sur ça. » Et c’est pour ça qu’après le Covid j’avais vraiment envie de faire des trucs un peu dansants parce que j’avais besoin de ça et que beaucoup de gens avaient besoin de ça aussi. J’étais énervée et c’était très sain mais… Là, j’ai 25 ans. Est-ce que j’ai envie de passer ma vie à pleurer ou est-ce que j’ai envie de faire comme j’ai toujours voulu faire quand j’étais petite, être une star et monter devant 40, 50 mille personnes, faire le Stade de France et avoir des vrais thèmes, assumer qui je suis. Je parle beaucoup de moi mais quand j’écris c’est aussi pour les autres. En grandissant j’ai tellement rencontré de personnes qui ont vécu les mêmes choses que moi, et en fait c’est ça le pouvoir d’être chanteuse. J’ai envie de faire vibrer les gens. J’ai envie qu’ils se disent « ma relation est toxique, je vais partir. »

FE19 Portrait : Philippine, pas de langue de bois sous le soleil
Photo by Nestie / Instagram : @nestie.portfolio

Hypocrites

Cet EP est lié aux mauvaises relations que j’ai eues, aux relations toxiques. C’est important d’en parler. Je suis contente parce que dans Hypocrite y’a un côté pop-rock/électro qui me ressemble depuis longtemps et j’ai envie qu’on se défoule dessus. J’ai envie qu’on soit énervés mais aussi heureux de se défouler. Je suis contente de le sortir en premier single. Hypocrite c’est le tout premier titre que j’ai écrit en MAO. J’avais déjà des bases mais c’est le premier que j’ai fini jusqu’au bout. Je l’ai commencé le 24 décembre 2021. C’était fin décembre 2021 et je me demandais ce que je voulais dégager au niveau de la musique, qui je voulais être. J’ai commencé à bosser littéralement 10 jours dessus, je n’ai pas arrêté. Je l’ai fait écouter, les gens ont kiffé, on l’a bossé en studio et je suis tellement fière que ce soit mon premier single. Je voulais que les paroles soient poignantes sans être trop dark parce que c’est pas qui je suis. Malgré tout je suis très sensible, je peux avoir un côté sombre dans mes paroles et c’est ce qui me fait vibrer. Et en fait, dans la chanson, vu qu’elle est assez dynamique, j’aimerais trop qu’elle passe en boîte.

Hypocrite c’est par rapport à mon passé, à ce que j’ai vécu, à des personnes que j’ai connues… On m’a toujours dit que le silence était le meilleur des mépris. C’est vrai et c’est ce que j’ai toujours fait parce que ça sert à rien d’être sanguine, je me suis toujours remise en question. A un moment donné je me suis dit que j’étais une bad bitch, j’en avais marre qu’on me dise quoi faire, qu’on me foute des complexes. J’ai jamais vraiment eu de haters mais c’était des amis, enfin pas vraiment des amis au final. Le silence est le meilleur des mépris c’est super mais j’ai envie de pointer du doigt les menteurs, les hypocrites… J’ai envie qu’ils sachent, et même pas qu’ils sachent, juste que je fasse ma thérapie à travers la musique. J’ai envie de pointer du doigt les menteurs qui m’ont fait vivre un enfer, et je sais que y’en a plein qui sont dans mon cas. A un moment il faut en parler et il faut pas toujours raconter des textes dans laquelle la vie est super belle. Ce genre d’expériences fait que le vie est belle.

J’ai peur que les gens pensent que je parle d’un homme, alors que pas du tout. Je parle des hommes et des femmes, je parle de ma vie amicale, sentimentale, professionnelle. Au début je parle vraiment des réseaux sociaux, le côté faux, le côté lèche-bottes que j’ai connu avec le peu de notoriété que j’ai ça m’insupporte. Ce qui m’a déçue dans mon passé c’est ce côté « tu réussis, on a pas envie que tu réussisses. » Ce que je dis maintenant c’est que tant que je n’ai pas rencontré quelqu’un je ne juge pas. Je trouve que les aprioris ne servent à rien. Parfois tout le monde te félicite mais derrière y’en a plein qui sont jaloux et qui t’en foutent plein la figure, dans n’importe quelle situation professionnelle comme personnelle.

La reine qui prend le fou

A la toute fin je fais référence aux échecs, et je trouve que c’est un jeu qui représente bien la vie. La vie c’est un jeu d’échecs, y’a des moments où ça va, d’autres pas mais on finit toujours pas se relever. A la fin je dis « Je suis la reine qui prend le fou. » Dans mes notes j’ai écrit « Je suis venu, j’ai vu, j’ai vécu. » En gros c’est moi la queen en fait, j’ai vécu un enfer, y’a eu de tout, des hypocrites, des jaloux, des réflexions, j’ai eu des complexes, j’ai perdu des kilos… Voilà, on sait ce que c’est les relations toxiques, on en a tous eu je pense. A la fin on est des queens. Dans mes paroles quand je suis un peu dark comme ça, j’aime beaucoup rajouter quelque chose de positif à la fin ou dans le pont. Pour qu’on sache que je suis pas trop sombre. Je suis vraiment contente qu’Hypocrite soit le premier single parce que je mets mon poing sur la table. Vous m’avez connue comme la petite toute mignonne mais j’ai grandi et j’ai ouvert les yeux. Maintenant que je suis épanouie et heureuse je peux me permettre d’être un peu plus cash dans mes paroles. J’ai vécu des trucs, j’ai pas peur de le dire et j’ai pas envie d’être moi-même hypocrite.

Hypocrite est disponible sur toutes les plateformes de streaming et le clip vient tout juste de sortir, il est disponible juste ici. 

Suivre Philippine sur les réseaux sociaux :

https://twitter.com/philippine_off?s=20

https://www.instagram.com/philippine_off/