Ce week-end se tient la troisième édition du comic-con français, au parc de la Villette. Réunion de fans de supers-héros, cosplayers, journalistes, tout le monde évolue joyeusement à travers les différents stands. Retour sur la première journée Evènement.
Une exploitation parfois douteuse
Qu’on se le dise directement, les stands ne sont pas l’intérêt premier de l’événement. Dans une masse de monde dans laquelle il est difficile de déambuler, rares sont les stands vraiment intéressants. Panini comics trône à sa place, vendant ses comics à des prix insolents, appuyant un peu plus sa suprématie sur ses adversaires. Netflix a frappé fort également, avec un stand complet dédié à Stranger Things, récréant le salon de Will, alors que les deux premiers épisodes de la deuxième saison ont été projetés. Star Wars était également de la partie avec une séance de shooting à disposition et des entraînements au sabre laser. Warner Bros étale son Justice League qui ne va pas tarder sur nos écrans et offre la possibilité de jouer à Injustice. Reste également un petit stand dissimulé dans un recoin de la grande salle. Geek par excellence, ce stand propose la possibilité de jouer gratuitement à des jeux rétros sur des télévisions rétros. Se côtoient ainsi Playstation 1, Super Ness, Super Nitendo, etc… Un stand recouvert de cartouches de jeux rétros, que ce soit de Game Boy ou de Super Nitendo.
Outre quelques autres stands sympathiques proposant de vieux comics américains en très bon état, la plupart des stands sont des attrape-touristes pour leur faire dépenser le maximum d’argent, à tel point que les spectateurs sont obligés de se soumettre à une sortie définitive, impossible d’aller prendre l’air et obligation de consommer les produits du comic-con donc. Heureusement les conférences proposées par l’organisation demeurent passionnantes.
Phil Tippet : Mad Dreams and Monsters
Les journalistes Gilles Penso et Alexandre Poncet sont venus présenter leur nouveau film consacré à Phil Tippet, un des plus grands costumiers de l’histoire du cinéma. Ayant travaillé sur des films emblématiques comme Star Wars ou Robocop, ce passionné raconte sa vie, son métier et sa désillusion aux deux journalistes. Son métier est en effet voué à disparaître depuis l’apparition des effets spéciaux. Les deux réalisateurs cherchent à transmettre une passion et une profession foisonnante de création qui tombe dans l’oubli. Les anecdotes sont croustillantes, notamment sur Gorges Lucas et son immense collection d’archives sur Star Wars. Ce film raconte comment les effets spéciaux ont évolué depuis les animatroniques et le stop motion aux effets spéciaux et à la motion capture à travers les yeux.
Conférence avec Joe Johnston
Le réalisateur de Captain America – First Avengers est venu faire un petit coucou au comic-con parisien et est revenu sur sa carrière. De ses meilleurs souvenirs à ses pires expériences, le cinéaste s’est attardé sur ses films. Alors que c’est George Lucas qui l’envoie sur le tournage de Willow de Ron Howard et qui le pousse à intégrer une école de cinéma, Joe Johnston réalise son premier film : Chérie j’ai rétréci les gosses (1989). Il ne s’attendait pas à une telle proposition, arrivée tardivement. Il n’a que cinq semaines pour se préparer au tournage, assimiler le script, le casting, etc… Avec un budget de 18 millions de dollars, cette comédie populaire parvient à séduire le public mais catalogue Joe Johnston dans le genre. Les propositions suivantes ne seront que des films pour la jeunesse. Il continue sur cette lancée avec Rocketeer en 1991 et participe ensuite à la série Young Indiana Jones produite par Lucas.
C’est en 1995 qu’il se révèle pleinement avec Jumanji. Joe Johnston est revenu sur les effets visuels de l’époque, qui s’avèrent être finalement la ligne conductrice de cette journée au comic-con. Le budget était limité, les effets spéciaux demeuraient très primitifs selon ses propres termes. C’était une époque difficile où Hollywood tentait d’imposer les effets spéciaux. Il estime ne pas forcément avoir pris les bonnes décisions sur la manière de gérer les effets visuels. Les animatroniques étaient encore utilisés pour les plans proches mais, dès qu’il fallait incorporer des mouvements, les effets spécieux étaient privilégiés. Joe Johnston est également revenu sur le regretté Robin Williams, star du film.
« A ma grande surprise, Robin Williams n’était pas le fou que l’on décrivait. C’était un acteur très professionnel. Il connaissait parfaitement les dialogues de chaque personnage. C’était l’acteur le mieux préparé avec qui j’ai travaillé et il a fait le succès du film. Je l’ai revu, après, au 70ème anniversaire de George Lucas, il a été très affectueux avec moi, comme si on s’était vus la veille. »
Après s’être très brièvement arrêté sur Ciel d’Octobre, le film préféré de sa carrière, Joe Johnston nous a parlé de Jurassic Park 3. Il voulait réaliser le deuxième épisode avant que Spielberg ne se décide. Mais ce dernier, impressionné par son travail, a appelé Joe Johnston pour qu’il réalise le troisième épisode. Joe Johnston a accepté mais la pré-production était chaotique. Il n’y avait q’un début de scénario, que cinq semaines avant le début du tournage. Heureusement David Koepp, le légendaire scénariste de Spielberg (Indiana Jones, Jurassic Park…) est venu à la rescousse avec un scénario presque terminé et de meilleures idées. Le tournage fut également compliqué, avec des scènes qui arrivaient le jour même, une dead line stricte, mais Joe Johnston en garde un bon souvenir, notamment en terme technique, où il a pu mélanger animatroniques et effets spéciaux, parfois au sein d’un même plan.
Joe Johnston a ensuite parlé de Hidalgo, affirmant que Viggo Mortensen, l’acteur du film, s’immisçait complètement dans son personnage. Acteur fou à l’image de Heath Ledger ou Shia LaBeouf, Viggo Mortensen vivait comme son personnage, en cowboy. Il dormait même sur le toit de sa caravane exclu du reste de l’équipe. Hidalgo, qui raconte l’Océan de Feu, une course de survie de 5 000 km à travers le désert arabe en 1880, a été tourné au même endroit que Lawrence d’Arabie. Omar Sharif, qui joue dans les deux films, a gratifié Joe Johnston d’anecdotes croustillantes sur le chef-d’œuvre de David Lean. Quant à Wolfman, Joe Johnston s’est attardé brièvement sur le conflit entre Universal et Rick Baker, immense maquilleur, pour choisir entre costumes et CGI.
Puis arriva le moment tant attendu. Joe Johnston est évidemment revenu sur Captain America. Notamment sur la transformation de Chris Evans. L’acteur, qui a pris une énorme masse musculaire, ne pouvait jouer le frêle Steve Rogers avant sa transformation. Une incrustation en effets spéciaux longue et fastidieuse. Pour chaque prise, Joe Johnston devait tourner cinq plans différents : un avec Chris Evans, un sans le comédien, un sur fond vert, un avec les autres personnages de la scène et un dernier avec la doublure maigre de Chris Evans. L’ordinateur mixait les cinq plans en une seule image.
Joe Johnston a conclu cette conférence avec ses futurs projets. Aucun Star Wars en prévision. Walt Disney n’a pas abordé le cinéaste, mais ce dernier travaille actuellement sur le quatrième opus de la saga Le Monde de Narnia. Intitulé Le Fauteuil d’Argent, le tournage débutera à l’hiver 2018-2019.
Conférence avec Finn Jones et Brian Michael Bendis, Marvel reprend les rênes
Finn Jones est l’interprète de Iron Fist dans les séries Marvel/Netflix. Il est revenu sur sa série et le récent crossover The Defenders. Brian Michael Bendis est quant à lui un grand dessinateur et scénariste de comics. Bendis a contribué à créer le label pour adultes MAX (Max (comics) chez Marvel grâce à sa série Alias. Dans Alias, il crée le personnage de Jessica Jones (également dans The Defenders) qu’il gardera dans sa suite The Pulse et qu’il intégrera dans nombre de ses travaux tels New Avengers, Secret War ou encore Daredevil. Le passage de Bendis sur ce dernier personnage est d’ailleurs devenu une référence, au niveau de celui de Frank Miller. Il est également le créateur de l’univers Ultimate chez Marvel.
« Je n’ai pas de préférence entre Marvel et DC comics », commence ce grand dessinateur qu’est Brian Michael Bendis, « ce qui compte, ce sont les histoires racontées », avant d’expliquer la grande vogue actuelle des supers héros. Il explique qu’il y a vingt ans les supers-héros étaient une niche, mais que Sam Raimi les a popularisés avec sa saga Spider-Man, relançant en 2000 la firme Marvel, alors à l’agonie. Brian Michael Bendis est un grand nom du monde Marvel, ce qui lui vaut des accréditations dans le comité créatif de Marvel Studio. Il est revenu sur une anecdote très drôle où Kenneth Branagh a présenté sa version de Thor (qu’il réalisera), en énumérant chaque dialogue avec un accent Shakespearien. Mais il affirme qu’il ne reste que consultant. En gros ce sont Kevin Feige et Netflix qui décident.
Finn Jones est quant à lui revenu sur sa série Iron Fist dont il est le protagoniste. Il affirme qu’il ne connaissait pas le personnage avant de tourner dans la série. Il a été appelé au moment où il quittait la série Game of Thrones. Il a apprécié le personnage et le script, mais a dû se préparer physiquement en un mois et demi puisque le tournage s’est déroulé très rapidement.
Projection Cold Skin de Xavier Gens
La journée s’est achevée avec la projection de Cold Skin, dernier film de Xavier Gens, en présence du cinéaste. Sorti directement en VOD en France, le film est adapté d’un roman d’Albert Sánchez Piñol. Cold Skin raconte comment, dans les années vingt, un officier météorologique de l’armée est envoyé sur une île en Antarctique pour étudier les climats. Celui-ci y fait la rencontre d’un vieux gardien de phare russe. Lors de la première nuit, l’officier se fait attaquer par d’étranges créatures…
Ce nouveau Xavier Gens est mieux réussi que ses précédents films. Il n’empêche que ce huis clos tourne en rond, accumule les clichés et les invraisemblances, pour des personnages vides. Le cinéaste ne parvient pas à faire correctement évoluer ses personnages. L’histoire patauge, n’avance pas, et l’histoire tourne sur elle-même. Les ressorts émotionnels tombent à plat, se concentrant naïvement sur une amitié inter-espèces envers et contre tout. Les mises en situation sont classiques malgré une esthétique agréable qui méritait plus d’attention. Les jeux de lumières auraient pu être un puissant atout, mais sont trop peu utilisés. Restent des jumpscares efficaces et un dénouement calme, presque intimiste, qui contredit les conclusions habituelles du genre.
Le Comic-con se termine ce dimanche 29 octobre, on vous laisse avec les photos de Alexandre Chadha :