Les œuvres sur l’effondrement de la civilisation s’amoncellent autant que les records de chaleur. La tonalité est le plus souvent sinistre mais Mission in the Apocalypse fait preuve d’exception en décrivant une fin du monde nostalgique.
Le monde ravagé de Mission in the Apocalypse
Le scénariste et dessinateur Haruo Iwamune ne perdent pas leur temps. Dans la première page, une jeune fille se réveille dans une métropole en ruine et dépourvue du moindre être humain. Sur la page suivante, le lecteur devine une créature gigantesque effondrée sur un gratte-ciel. En effet, Mission in the Apocalypse se déroule dans un monde d’après la catastrophe.
Pourtant le mystère est dense. D’une part, il faudra attendre le dernier chapitre pour connaître le nom de l’héroïne. D’autre part, le monde est difficile à situer dans le temps. L’effondrement du monde semble très ancien car l’héroïne découvre le concept de cinéma. Étrangement, la nature n’a pas tout envahi. Si on voit des robots futuristes, il y a également des armes et des véhicules contemporains d’une part et une montre et une horloge numérique évoquant les années 80 d’autre part.
Étant seule, la jeune fille parle peu. On connaît même pas son nom. Le lecteur ne sait donc pas ce qui est arrivé à la ville et ses habitants. Le premier chapitre l’explique par un récitatif artificiel. La plus grande partie de l’humanité est morte quand d’autres formes de vie sont apparues sur terre, les condamnés.
Comme pour la conquête de l’Amérique, cette invasion s’est certes faite dans la violence mais surtout par un virus. Ces créatures portaient des miasmes qui ont diffusés de nouvelles maladies. La biologie de l’humanité n’étant pas préparée à cette agression, les morts se sont multipliés. Le dessinateur Haruo Iwamune fait le choix original d’une maladie étrange : le symptôme de ce « mal cristallin » est la multiplication de cubes sur le corps.
Le rôle de la jeune fille est révélé dans le premier chapitre. Elle est chargée de décontaminer des zones et chercher des survivants humains. Cependant, elle n’a effectué 0,002% de sa mission. Achever cette entreprise paraît impossible mais un indice laisse supposer que cette fille trop parfaite pourrait être un robot. Ailleurs, elle reçoit la dénomination d’« enfant éternel ».
Blame dans le coton
Les images de Mission in the Apocalypse évoquent Blame de Tsutomu Nihei : des architectures immenses mais le plus souvent abandonnées. L’héroïne se prépare au combat. Avant de sortir, elle choisit avec assurance et donc avec expérience, une arme et une veste de combat. Si le danger des condamnés est présent, ces créatures ne dominent pas le monde. La plupart sont tout aussi mortes que les humains.
Les designs très divers des robots et des monstres sont une réussite de ce tome. Les différentes missions permettent de voir différents lieux après la destruction : une métropole moderne ou une cité médiévale. Le propos sur l’humanité est pessimiste. Elle n’a pas su dépasser la menace ou les divisions.
Cependant, Mission in the Apocalypse se concentre sur le quotidien par une suite de chapitres. Le lecteur assiste successivement à une incinération, à une séance de cinéma et un déménagement. « L’enfant éternel » va dans un repaire secret chercher à manger, choisir un plat épicé et cuisiner. Elle s’habille pour préparer et assister à l’incinération des cadavres qu’elle trouve. Pour l’instant, on ne voit pas en revanche de récit continu.
Malgré la tonalité guerrière, l’ambiance dominante est celle d’une grande douceur. Une héroïne mignonne et calme échange avec une créature blanche et immaculée ressemblant à un lapin. Lors des missions, il n’y a pas de tension ou d’attaques surprises. Mission in the Apocalypse propose une promenade nostalgique dans un monde détruit.
Cette opposition entre monde violent et ambiance douce se retrouve dans le dessin. On voit que plusieurs dessinateurs interviennent. Les décors hyperréalistes sont réhaussés de très nombreux détails notamment pour les armes et les véhicules de guerre. Les tons gris ou noirs dominent largement. Au contraire, la jeune fille toute en courbes, reste stylisée et donc laisse la place au blanc. Il y a même un troisième style pour un film avec plus de traits et un jeu sur les textures.
Édité par Delcourt, Mission in the Apocalypse propose un lancement réussi avec un univers déroutant mêlant la gravité d’un contexte post-apocalyptique et la douceur d’une héroïne. Ce quotidien est brisé quand elle sort. Le dernier épisode propose par ailleurs un retournement réussi donnant envie de plonger plus en avant dans ce monde étrange.
Partez dans le futur avec d’autres mangas : Atom the Beginning et Kaiju Defense Force.