You saison 4, cage dorée et plafond de verre

Critique de la saison 4 de la série Netflix

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Poster de la saison 4 | Netflix

Créée en 2018 par Greg Berlanti et Sera Gamble et rachetée l’année d’après par Netflix, la série You a connu un grand succès dès son arrivée sur la plateforme, au point où son personnage principal est devenu un véritable objet de pop-culture. L’histoire du stalker Joe Goldberg, qui ne recule devant rien pour séduire et chérir les femmes sur qui il jette son dévolu, a certes atteint les sommets de sa popularité il fut un temps mais on ne peut pas s’empêcher de se demander si la qualité de la série est toujours au rendez-vous. Alors que la saison 4 vient de s’achever avec sa seconde partie sortie le 9 mars, il est l’heure de décortiquer les nouvelles aventures de notre cher Joe.

Nouvelle identité, nouveau pays, nouveau départ ?

C’est à Londres que l’on retrouve Joe sous le nom de Jonathan Moore en professeur de littérature à la fac. Le schéma habituel change légèrement et cette fois, on retrouve un Joe qui lutte contre ses démons dans l’espoir de devenir meilleur. Il est, sans grande surprise, entouré d’un groupe de personnages riches et influents qui l’intègrent sans souci. On nous présente donc tout un nouveau casting pour prendre la relève des précédents, et celui-ci est loin d’être décevant. Entre la mignonne et attachante Lady Phoebe campée par Tilly Keeper ; la nouvelle conquête de Joe, la froide mais vulnérable Kate jouée par Charlotte Ritchie (que l’on a découvert il y a des années dans l’irrésistible comédie britannique Fresh Meat) ; ou encore l’élève trop curieuse pour son propre bien Nadia campée par Amy-Leigh Hickman : le casting est d’une grande qualité, diversifié dans ses archétypes et convaincant dès le départ. C’est clairement la force de cette saison 4. Les dynamiques inter personnages sont quant à elles quitte ou double, et on a parfois l’impression que le scénario veut nous emmener quelque part, peu importe la faiblesse de sa justification.

Une saison en dents de scie, capable d’apporter des scènes très fortes et marquantes autant dans leur mise en scène que dans leur écriture, mais d’autres tellement tirées par les cheveux qu’on se retrouve à soupirer. Le drame est intense, constant, et c’est ce qui nous fait continuer sans relâche, parce que malgré ses faiblesses indéniables, You sait tenir son spectateur en haleine et l’intéresser en lui promettant rebondissement sur rebondissement, peu importe si la logique en pâtit.

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Le charme s’est essoufflé

Quand on a découvert Joe il y a quelques années dans sa petite librairie de New York alors qu’il tombait fou amoureux de Guinevire Beck, il nous racontait une histoire efficace teintée de rebondissements dignes d’un soap opéra. La recette fonctionnait parfaitement et la suite a démontré tout autant de qualités, avec quelques faiblesses en saison 3. On a vu la série s’essouffler malgré elle année après année avec le même schéma : Joe devient obsédé par une femme, dépasse toutes les bornes « pour son bien », tue un paquet de gens, puis finit soit par la tuer, soit par faire un massacre et repart à zéro dans un nouvel endroit. C’est là que nous a laissé la saison 3, alors qu’il a tué Love Quinn, abandonné leur enfant et s’est lui-même fait passer pour mort. Dans l’espoir de retrouver Marienne, son obsession du moment, il se rend jusqu’à Londres et finit par s’y installer.

On ne peut pas nier que cette saison 4 tente de nouvelles choses. D’abord, en tentant de bousculer son fameux schéma avec ce Joe en conflit avec lui-même. Il tombe petit à petit amoureux de Kate mais s’interdit de suivre ses moindres faits et gestes, il refuse d’avoir recours à la violence… Le tueur de cette saison n’est même pas sensé être lui pour une fois, mais un inconnu qui élimine un par un les membres du nouveau groupe, le « eat the rich killer. » Ce nouveau tueur s’avère être Rhys Montrose, un homme politique parti de rien qui suit étrangement Joe partout où il va. Sauf que, bien évidemment, le vrai Montrose n’a aucune idée de qui est Jonathan et que le principal intéressé est parti dans une phase de dissociation. Il a kidnappé Marienne, l’a enfermée dans une cage en verre dans un sous-sol délabré de la ville, et a tué toutes ces personnes. Cette vision n’était que la pire partie de lui qu’il essayait de réprimer, il n’a pas changé en un claquement de doigt et le schéma est le même. Le dilemme est là : la régression constante d’un personnage pour son propre développement nuit-elle à l’expérience du spectateur ? Est-ce que l’histoire de Joe ne se répète pas trop ?

La boucle est bouclée (ou presque)

Ce que Joe Goldberg devient dans cette saison de You, on aurait pu le voir venir. Il y a un véritable essai de divertir autrement avec toute cette partie dans laquelle on fait planer le doute sur l’identité du « eat the rich killer », un essai de jouer avec le mystère. La révélation n’est pas tant surprenante mais fonctionne très bien pour le développement de personnage qui n’a cessé d’être constant pour lui. La rédemption n’existe pas pour Joe et n’existera jamais, il ne peut qu’empirer sa situation et son état. La seule solution narrative, celle qui satisferait les spectateurs fidèles qui l’ont suivi dans sa régression, serait d’enfin le faire payer pour tout le mal qu’il a causé. Ce n’est pas la direction que prend la fin de cette saison, c’est même tout le contraire. Jonathan peut redevenir Joe Goldberg en toute impunité, se faisant passer pour un survivant miraculé et la victime de Love Quinn ; tout cela aux côtés de sa petite amie riche et puissante. Il est sur le toit du monde et paraît inatteignable et, ironie du sort, se retrouve de retour à New York.

C’est comme si la série nous préparait à sa future chute alors qu’il a atteint les sommets de son horreur. Une chute que les spectateurs comme Penn Badgley, l’interprète du personnage, veulent brutale et réclament depuis longtemps. On nous a montré à maintes et maintes reprises qu’il n’y a pas de rédemption possible et cette saison est le point d’orgue qui le prouve, une fois de plus ou une fois de trop ? Ni l’un ni l’autre mais on l’espère, la dernière fois. Les quelques autres changements de schéma narratif peuvent aussi le suggérer, on peut prendre l’exemple du personnage secondaire plus jeune que lui qu’il prend toujours sous son aile, qui dans cette saison est incarné par Nadia qu’il finit par envoyer en prison pour son propre meurtre. Il ne cherche même plus à protéger qui que ce soit d’autre que lui-même et toutes les excuses qu’il se donne constamment disparaissent à la fin de la saison. Il est devenu l’antagoniste pour de bon. 

Cette saison 4 de You a de gros défauts d’écritures et a recours à de nombreux raccourcis mais elle n’en reste pas moins divertissante, les rebondissements étant nombreux et presque incessants. Le développement de Joe lui est impeccable comme toujours et on dénote une vraie évolution qui, on l’espère, mènera à une saison 5 où il tombe d’aussi haut qu’il s’est hissé. 

You est disponible en intégralité sur Netflix