Critique « Casting JonBenet » (Netflix) : sonder la fascination d’un drame universel

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Noël 1996, Colorado : la petite JonBenet Ramsay, mini-miss âgée de 6 ans, est retrouvée morte dans la cave de sa maison. Encore aujourd’hui, le meurtre reste irrésolu, et les théories s’enchaînent, telles que les comédiens de ce faux documentaire Netflix, Casting JonBenet. Faux documentaire dans sa réalisation, mais très sincère dans sa manière de capter les paroles et les pensées, comme autant de versions du meurtre de JonBenet. Une vision fascinée, qui sonde avec brio les répercussions d’un tel drame.

Les comédiens et comédiennes s’enchaînent pour décrocher les rôles et ainsi pouvoir reconstituer la famille Ramsey : il nous faut une mère froide et distante, un père absent et dévasté, un frère perturbé, et enfin une petite fille dont la vie va être sauvagement arrachée. Mais comment recréer des faits dont on ne connaît même pas la véritable version ? Kitty Green choisit de traiter le fait divers non pas comme une fiction ni un documentaire, qui seraient dans les deux cas des approximations fausses et peu intéressantes, mais en sondant sous prétexte d’un casting les réactions et sentiments de ceux qui ont vécu ce drame de près.

jonbonet Critique "Casting JonBenet" (Netflix) : sonder la fascination d'un drame universel

S’enchaînent ainsi les Patsy et les John Benet, dans une alternance entre les plans de casting et les plans tournés, avec donc deux formats d’images différents pour faciliter le passage de l’un à l’autre ; puis ces deux formats finissent par se chevaucher et se mélanger. Car la fiction rejoint toujours la réalité et inversement, le documentaire se doit de montrer l’envers du décor tout en gardant à l’esprit que ce drame n’a toujours pas de réponse, et que le passé n’est finalement que celui que l’on raconte

Tous ces Patsy et ces John ont leur vision et leur avis sur ce drame, qu’ils se sont forgés avec un recul, mais surtout une expérience personnelle : la caméra de Casting JonBenet prend avec un recul nécessaire ces témoignages si précieux sur les jugements et les fascinations que ces drames engendrent, dans une sorte d’universalité assez étonnante. Tout le monde a son avis sur ce meurtre, et surtout tout le monde semble le rapporter à quelque chose de beaucoup plus personnel, comme si l’unique devenait tout à coup universel. Beaucoup viennent se livrer sur leur vie privée et ses drames, dans une mise en abyme inédite. Au final, aucune sélection n’est faite, tous les acteurs sont gardés, et le casting n’aura eu pour seul but que de sonder les lendemains d’un crime sans résolution, et de recréer une magnifique dernière scène qui représente à elle seule cette pluralité des histoires.

default 1.311.1 Critique "Casting JonBenet" (Netflix) : sonder la fascination d'un drame universel

Les deux dernières séquences de Casting JonBenet sont sans aucun doute les plus réussies : on assiste, dans un travelling latéral incroyable, au tournage de la scène finale, au résultat de ce casting. Une dizaine de couples Patsy/John jouent ensemble, sur la même scène et les mêmes décors, toutes ces interprétations et ces versions du drame ; toutes ces visions résonnent comme autant de passés possibles et probables, mais également comme autant d’histoires personnelles qui se trouvent derrière chacun des acteurs et des actrices. Le film qui commençait avec une dizaine de JonBenet se clôt finalement sur une seule fillette, symbole bien sûr de la véritable JonBenet, mais aussi de toute une série de drames sans fins et à la fois si personnels et universels.

Grâce à un format très maîtrisé et adapté, et à une réalisation adroite et délicate, Casting JonBenet se démarque du simple intérêt à un fait divers dramatique, et parvient à capturer toutes les histoires et les visions de cette histoire irrésolue. Un film brillant doté d’une fin incroyable, qui parle avec justesse de notre fascination si justifiée pour ces drames universels.

 

Bande-annonce Casting JonBenet de Kitty Green :