Approchez Ô passionnés du cinéma. Vous devez avoir parfaitement conscience que ceux qui écrivent toutes ces lignes sur ce site regardent de nombreux films. Le cinéma est un art extrêmement large regroupant tout un tas de genres de films. Dans ce temple du septième art se regroupe une petite quantité de films que l’on aime surnommer les « must see ». Des films très, peu ou pas connus qui méritent une attention particulière. Ils seront parfois mauvais, parfois excellents, mais ils méritent d’être vus pour leur contenu. C’est pourquoi nous créons cette rubrique où nous analyserons différents films, choisis de manière aléatoire, que nous critiquerons d’un point de vue cinématographique pour comprendre pourquoi tel ou tel film mérite une attention particulière malgré parfois son peu de qualité.
Pour cette première approche, nous parlerons de Horns. Film réalisé par Alexandre Aja en 2013, le film est une adaptation du roman de Joe Hill, fils du grand Stephen King. À l’affiche, le célèbre Daniel Radcliffe qui joue son deuxième rôle après la saga Harry Potter (La Dame en Noir, pour ceux qui se demandent quel était le premier). À ses côtés, Juno Temple (Mr Nobody, The Dark Knight Rises) ou encore Max Minghella (The Social Network, The Darkest Hour). Le film raconte l’histoire d’Ignatius, soupçonné d’avoir assassiné sa fiancée, Merrin Williams. Rejeté par tous ceux qu’il connaît, il a sombré dans le désespoir et le malheur. Un matin parmi tant d’autres, il se réveille avec une paire de cornes sur la tête. En découvrant que ces dernières lui permettent de faire avouer à n’importe qui leurs plus noirs secrets, il va se mettre en tête de retrouver le véritable tueur.
Si vous aimez les films où la religion prend une place plus ou moins importante (certains penseront à DaVinci Code), Horns marque déjà un point dans votre camp. Et ce côté religieux est plus que bien traité. En effet, même si le personnage que l’on suit au cours de l’histoire n’est en aucun cas religieux, le film fait référence à de nombreux aspects du monde du culte. À commencer par son prénom, Ignatius, qui fait directement référence à un Saint : Ignace d’Antioche, connu pour ses lettres sur la martyre. Pourtant Ig (petit surnom de notre héros), n’a rien d’un Saint. Merrin, le prénom de sa petite amie est une référence au père Merrin dans L’Exorciste. Dans la mise en scène du film, l’action tend progressivement à faire passer Merrin pour le diable. Quand on y réfléchit tous les personnages se sont tournés vers elle. Le père de Ig qui était jaloux de son propre fils par rapport à elle, son meilleur ami qui avait des sentiments pour elle, son propre frère, qui lui aussi avait des sentiments pour elle. Et même si elle n’apparaît qu’au cours d’une infime partie du film, c’est elle qui est a l’origine de la chute d’Ig. On peut encore parler des décors, rappelant parfois le jardin d’Eden. Tous ces éléments montrent qu’Aja n’a pas réalisé son film de n’importe quelle manière car ces éléments ne sont pas à première vue apparents. Il faut parfois aller chercher les choix cinématographiques du réalisateur.
Revenons sur cet aspect cinématographique justement. Après la mort de sa petite amie, Ig devient pratiquement alcoolique. Le réalisateur nous montre ce basculement de manière très symbolique dans les premières scènes. Effectué en deux temps, il nous montre d’abord cette scène idyllique où Ig et Merrin profitent de leur moment dans leur jardin d’Eden.
Puis dans un deuxième temps on nous montre la chute du protagoniste, allongé dans sa cuisine, une bouteille d’alcool a la main. Le plus intéressant reste la transition entre ces deux scènes : un panoramique circulaire, passant à travers le niveau du sol symbolisant le passage de l’autre côté du héros. Le réalisateur, qui est un adepte de films d’horreur, n’a rien placé au hasard dans son film. Le décor par exemple, a un rôle important et une place particulière. Le film a été tourné au Canada, dans le British Columbia. On y retrouve les sapins, les lacs et tout ce qui correspond au décor qu’on connaît du Canada. Et les endroits qu’il choisit de filmer font directement référence au jardin d’Eden avec sa flore luxuriante.
Aja se lance dans la réalisation d’un film qui semble à première vue destiné aux adolescents, mais qu’il mène progressivement vers quelque chose de plus cru, plus gore, plus méchant. On met le spectateur face à un anti-héros qui va devoir faire face à ses démons, et affronter le reste de son entourage pour parvenir à ses fins.
Nous allons à présent consacrer une entière partie au déroulement de l’histoire et aux personnages principaux. Comme dit précédemment, le film part, d’un premier point de vue, sur un film typique pour ados. On suit ce personnage et son monde idyllique qui bascule et qui se confronte à ses proches pour découvrir les faits. Mais à l’inverse de ces films codifiés, le personnage va mettre la ville à feu et à sang (littéralement) pour découvrir la vérité. Il découvre son habilité à faire dévoiler aux gens leur plus noir secret et devient un anti-héros qui devra embrasser ses démons plutôt que d’y faire face. C’est à ce point précis que le film chamboule les codes et rajoute un bon point à sa valeur. Ig ne va pas seulement accepter ses démons, il ne va faire qu’un avec eux. Mais la rupture des codes atteint son paroxysme à la fin du film.
En effet, le film se finit de deux manières différentes (SPOILER ALERT). Dans un premier temps, une sorte de bad happy ending où Ig découvre le véritable tueur, se confronte à lui et finit par gagner, son rival mourant de ses blessures. Mais une deuxième fin vient succéder à celle-ci. On retrouve une scène semblable à la première, où Ig et Merrin sont tous les deux, dans un monde idyllique : les retrouvailles au Paradis. Dans ce sens, Aja caricature et se moque de ces films où tout finit trop bien pour que ce soit vrai : Ig va au Paradis alors qu’il est à moitié devenu un démon.
Pour finir cette argumentation, parlons quand même de la performance de ces acteurs pas tous aussi connus que notre cher Daniel Radcliffe. L’acteur sort de la saga Harry Potter, et avait du mal à se séparer du personnage éponyme. Dans Horns, il nous montre qu’il en est capable, et qu’il n’est plus le gentil sorcier le plus connu de notre génération. Alcoolique, intrépide, il nous fait vivre cette incompréhension d’être accusé à tort. En ce qui concerne le reste du casting, chacun d’entre eux réussit clairement à se faire une place dans ce film par leur conflit individuel avec le héros, chacun apporte quelque chose contre Ig et ils ne sont pas tous ligués contre lui dans une unité. Ce qui apporte une certaine fluidité et encore une fois, casse les clichés.
En conclusion, Horns est définitivement un film à voir. Peu médiatisé, il renferme de nombreux aspects intéressants pour le grand public, comme pour les cinéphiles. Même si ce fond teenage reste ambiant, il n’est pas néfaste vu la façon dont Aja s’en sert. Caricaturer ses codes et son ambiance rend le film attractif et lui ajoute une touche de second degré par la situation. Alors si vous avez l’occasion de voir ce film, n’hésitez pas une seule seconde !