Dans le cadre de la saison Hollandaise, le Musée de Montmartre accueille une exposition monographique sur le peintre néerlandais Kees Van Dongen (1877-1968). Ce contemporain et ami de Picasso se distingue par sa recherche picturale constante allant du fauvisme aux portraits mondains, en passant par l’illustration.
Découpée en cinq parties, l’exposition s’articule autour des grandes periodes de creation de Van Dongen, entre ses débuts sur la butte, le choc pictural du Bateau-Lavoir, la montée en puissance matérialisée par ses différents ateliers, et enfin la gloire, avec ses portraits mondains et son depart pour Monaco.
Montmartre un haut lieu d’émulation artistique
Au tout début du XXe siècle, le jeune peintre Kees van Dongen arrive à Montmartre, attiré par la liberté creative qui se degage de ses nombreux ateliers et cabarets où se cotoyent les peintres sans le sous de toutes nationalités. Rapidement, il intégre un petit atelier au sein de la residence d’artistes, le “Bateau-Lavoir”. Sur place, il se lie d’amitié avec de nombreux artistes dont Pablo Picasso ou encore Otto van Rees. Alors que Picasso rend célèbre le Bateau-Lavoir et lance véritablement le mouvement cubiste avec Les Demoiselles d’Avignon, Van Dongen se focalise sur la vie nocturne montmartroise.
Lors de ses années passées sur la Butte de Montmartre, il rencontre Maximilien Luce, Charles Camoin, Paul Signac, Matisse, Otto van Rees et son épouse Adya, Derain, Apollinaire, Vlaminck, etc.
Un peintre en perpétuel renouvellement
A ses débuts en tant que dessinateur, on note une influence de Toulouse Lautrec dans la composition et la forme, avec ses cadrages en diagonale et ses larges cernes noir. Vers 1904, il rencontre Paul Signac qui influence son style. Van Dongen, alors proche des recherches des Fauves sur la couleur, s’intéresse alors au néo-impressionnisme. Passant d’une oeuvre sombre héritée de ses origines flamandes, il travaille de plus en plus sur la couleur.
Après sa rencontre avec Jasmy en 1915, il entre dans le grand monde. Il peint de plus en plus de portraits de figures politiques comme Charles Rappoport ou d’écrivains tel Anatole France. Dans les années 1920, il reçoit de nombreuses commandes qui assoient sa reputation de peintre mondain. La palette change de nouveau pour des teintes plus claires, toutes en nuances.
La place de la femme
Frappé par les Demoiselles d’Avignon, Van Dongen se penche sur la représentation du corps de la femme. Contrairement à la vision de l’époque, les modèles, dont Fernande Olivier, sont représentées dans une sorte de monumentalité qui tranche avec l’érotisme des autres peintres. L’oeuvre la plus emblématique, de ce point de vue, est sans conteste Les Lutteuses de Tabarin qui représente, dans un hiératisme saisissant, dix femmes pratiquant la lutte. Ces jeunes femmes, sans corset, vêtues d’un justaucorps dévoilant leurs formes, n’ont pourtant rien de sexuel. Les regards sont fermes tout comme la posture qui n’a rien d’aguicheuse.
Cette monumentalité et cette fierté féminines se retrouvent dans de très nombreuses œuvres postérieures, dont Danseuse espagnole.
Au contact de la haute société, il défraie parfois la chronique avec ses portraits de femmes alanguies et monumentales à la fois, d’une sensualité toute en retenue.
La scénographie, toute en sobriété, permet d’admirer l’évolution de l’artiste et sa maturation parfois violente et parfois douce. Une partie de l’exposition permanente, l’appartement et l’atelier de Suzane Valadon, est intégrée au parcours, pour nous donner une idée de la vie d’artiste à cette époque.
L’exposition s’achève sur le succès du peintre qui ne se démentira plus jusqu’à sa mort, en 1968, à Monaco.